METHODO :
L’ANALYSE DE TEXTE HISTORIQUE
FAIRE UNE INTRODUCTION
Les Athéniens reçurent
ainsi l’hégémonie du plein gré des alliés […] : ils fixèrent quelles
villes devaient leur fournir contre le Barbare de l’argent ou bien des navires
– le principe officiel étant de ravager le pays du Roi en représailles pour les
torts subis. […] le tribut qui fut fixé à l’origine se montait à quatre cent
soixante talents ; on le déposait à Délos, et les réunions se faisaient
dans le sanctuaire. Cependant, les Athéniens, dont l’hégémonie, au début,
s’exerçait sur des alliés autonomes, et invités à délibérer dans des réunions
communes, devaient [s’opposer] non seulement au Barbare, mais à leurs propres
alliés, lorsque ceux-ci se montraient rebelles, et aux éléments péloponnésiens
mêlés dans chaque affaire. […] : les Athéniens montraient des exigences
strictes. […]. Aussi bien, d’une façon générale, l’autorité des Athéniens ne
s’exerçait-elle plus comme avant, avec l’agrément de tous ; et, de même
qu’ils ne faisaient plus la guerre sur un pied d’égalité avec les autres, de
même il leur était aisé de châtier les dissidents. […] aussi Athènes
voyait-elle croître sa flotte, grâce aux frais qu’ils assumaient, tandis
qu’eux-mêmes, en cas de défection, entraient en guerre sans armements ni
expérience.
Thucydide, Histoire de la guerre du Péloponnèse,
I.96-99
Vocabulaire :
tribut : c’est la somme d’argent payée par les cités à Athènes contre
sa protection militaire, pour la dédommager des frais supplémentaires que
coûtent l’entretien d’une armée. Ce tribut s’appelle le « trésor » de
la Ligue de Délos, laquelle est l’ensemble des cités qui payent cette somme à
Athènes. D’abord localisé à Delos, il fut amené à Athènes par Périclès.
talent : monnaie athénienne équivalant à 6000 drachmes. Avec
la Ligue de Délos, la monnaie athénienne va s’imposer dans toutes les cités
alliées. Si l’on fait une opération de conversion, on s’aperçoit que 460
talents valent 2 760 000 drachmes, soit 2 760 000 journées
d’un ouvrier travaillant sur le chantier de construction de l’Acropole, à la
fin du Ve siècle avant J.-C.
autonomes : des cités autonomes sont des cités qui se donnent à
elles-mêmes leurs propres lois donc qui se gouvernent seules.
dissidents : les cités qui refusent d’obéir (ici à Athènes)
1ère
étape : Quelle est la nature du document ? Présentation S.A.N.D.
a)
C’est un discours destiné à justifier la domination d’Athènes sur ses alliés.
b)
C’est un récit historique qui analyse les causes et les conséquences des faits.
c)
C’est une critique de la domination athénienne.
d)
C’est une narration.
2e étape : compréhension
des points obscurs (s’aider du manuel) pour comprendre le contexte.
Le
texte porte sur la guerre du Péloponnèse et en recherche les causes. Le texte
porte donc sur la situation avant la guerre du Péloponnèse
a) Quand a eu lieu la guerre du
Péloponnèse ? Qui se bat contre qui ? Qui gagne, qui perd ?
b)
En sachant
qu’hégémonie veut dire domination, sur qui les Athéniens sont-ils
hégémoniques ? Comment ont-ils obtenu ce pouvoir ? Quand ? Contre
qui se battait alors Athènes ? Citer les deux batailles qu’elle a gagnées.
3e
étape : Le plan du texte (pas forcément à présenter en intro, mais il faut l'avoir à l'esprit pour faciliter l'analyse)
Ici,
la meilleure façon de couper le texte est de distinguer trois parties :
- mode de fonctionnement de la Ligue de Délos
- évolution de la Ligue de Délos entre les guerres
médiques et la guerre du Péloponnèse
- analyse des causes de cette évolution
Quel
est le contenu du document : Comment pourrait-on le résumer en une
phrase ?
a)
Les Athéniens ont profité d’un contexte militaire difficile pour établir leur
hégémonie sur le monde grec.
b)
La Ligue de Délos reposait sur la participation volontaire de tous ses
membres : l’attitude d’Athènes fut mal acceptée par les cités alliées.
c)
Pendant les cinquante années qui se sont écoulées entre les guerres médiques et
la guerre du Péloponnèse, l’alliance militaire rassemblée autour d’Athènes pour
répondre à la menace perse est devenue un empire maritime sous domination
athénienne.
LA LIBERTÉ DES GRECS MENACÉE ET L’UNITÉ IMPOSSIBLE
Etude d’un texte historique (document-source)
COMPRENDRE UNE ARGUMENTATION
Démosthène
est un homme politique athénien du IVe siècle avant JC, durant la montée de
l’influence macédonienne en Grèce. Appartenant au parti populaire/démocrate, il
tenta par une série de discours que l’on nomme les Philippiques de convaincre
les Athéniens de la nécessité de la guerre contre le roi de Macédoine, au nom
de la défense de l’identité grecque (il dit « hellène ») et de l’indépendance
d’Athènes. Mais beaucoup, y compris à Athènes, étaient favorables à Philippe de
Macédoine et à ses projets d’union des cités grecques, sous sa domination,
contre l’ennemi commun, l’empire perse. Aussi, les discours de Démosthène
restèrent-ils sans effet.
EXTRAITS DU TEXTE DU DISCOURS PRONONCÉ DEVANT L’ECCLESIA EN -341
1
Bien que, dans presque toutes vos assemblées, ô Athéniens! de
nombreux discours vous retracent les attentats commis par Philippe, depuis son
traité de paix, contre vous, contre la Grèce entière ; bien que, d'une
voix unanime, vous disiez, mais sans le faire, que, pour le bien public, il
faut, par nos paroles, par nos actes, arrêter et punir l'injurieuse audace de
cet homme; je vois la négligence et la trahison miner toutes les affaires au
point […] je croirais impossible de mieux organiser la ruine de la république.
Plusieurs causes, sans doute, ont concouru à ce résultat, qu'une ou deux fautes
seulement ne pouvaient amener : mais la principale, si vous examinez bien, vous
la trouverez dans les orateurs plus jaloux d'être vos courtisans que vos sages
conseillers. Fidèles à maintenir ce qui fonde leur propre renommée, leur crédit
personnel, les uns ont les yeux fermés sur l'avenir, et décident que vous ne
savez pas, Athéniens, voir plus loin qu'eux. Accusant, calomniant ceux qui
dirigent vos affaires, les autres ne font qu'armer Athènes contre Athènes, et
ménager à Philippe, par cette diversion, une liberté illimitée et d'action et
de langage. Voilà la politique qui a passé dans vos mœurs, voilà la source de
vos troubles et de vos fautes. Je réclame donc, Athéniens, le droit de vous
exposer librement quelques vérités sans allumer votre courroux. […] jusqu'à présent, Philippe n'a triomphé que de
votre paresse et de votre insouciance; il n'a pas triomphé d'Athènes.
3
D'ailleurs, vous le savez encore, si les Hellènes ont souffert sous la domination de Sparte ou d'Athènes, du moins leurs injustes maîtres étaient de vrais enfants de la Grèce. Ici nos fautes pourraient se comparer aux dissipations d'un fils légitime, né dans une famille opulente : en blâmant, en condamnant sa conduite, nous ne saurions méconnaître ni son titre de fils, ni ses droits à l'héritage dont il abuse. Mais qu'un esclave, qu'un enfant supposé s'avise d'engloutir une succession étrangère, avec quel courroux, grands dieux ! nous flétrirons tous un vol si affreux, si révoltant ! Où est-il donc, notre courroux contre Philippe et ses attentats ! Philippe qui n'est pas Grec, qu'aucun lien n'unit aux Grecs, Philippe qui n'est pas même un Barbare d'illustre origine, misérable Macédonien né dans un pays où l'on ne put jamais acheter un bon esclave !
2
[…] Voici donc comme je
pose, avant tout, l'état de la question : Avons-nous le choix entre la guerre
et la paix ? Parlons de la paix d'abord. […] L'homme qui a tiré l'épée, qui
s'environne d'une armée considérable, jette en avant le nom de paix, et nous
fait une guerre réelle, le seul parti à prendre n'est-il pas de le repousser ?
Après cela, dites, à son exemple, que vous observez la paix, j'y consens ; mais
appeler paix ce qui ouvre au Macédonien, maître de tous les autres pays, la
route de l'Attique, c'est d'abord démence, ensuite c'est désigner une paix
d'Athènes avec Philippe, non de Philippe avec Athènes. Tel est le privilège
qu'il achète au prix de tant d'or répandu : il vous fait la guerre sans que
vous la lui fassiez. […] Mais, grands dieux ! avec le sens commun, quel
homme décidera sur les paroles plutôt que sur les faits, si l'on est en paix ou
en guerre avec lui ? […] Pour moi, loin de convenir que de telles actions sont
conformes à la paix, quand je le vois mettre la main sur Mégare, organiser la
tyrannie dans l'Eubée, pénétrer actuellement dans la Thrace, intriguer dans le Péloponnèse,
exécuter tant de projets avec l'épée, j'affirme qu'il a rompu la paix et
commencé les hostilités : quiconque dispose tout pour ma perte m'attaque dès
lors, bien qu'il ne lance encore ni javelot ni flèche.
[…]
je considère que tous les peuples, à commencer par vous, ont accordé à Philippe
un droit qui fut toujours une source de guerre parmi les Grecs. Quel est ce
droit ? celui de faire tout ce qu'il lui plaît, de mutiler, de dépouiller la
Grèce en détail, d'envahir, d'asservir ses cités. La prééminence sur les
Hellènes fut, pendant soixante-treize années, exercée par vous, vingt-neuf
ans par Lacédémone*; et, dans ces derniers temps, Thèbes reçut de la victoire
de Leuctres une sorte de supériorité : jamais cependant, ô Athéniens ! ni à
vous, ni aux Thébains, ni aux Lacédémoniens la Grèce n'abandonna une puissance
absolue. Au contraire, dès que vous, disons mieux, dès que les Athéniens
d'alors semblaient s'écarter des bornes de la modération envers quelque État,
tous croyaient devoir courir aux armes, et ceux qui n'avaient pas d'injures à
venger se liguaient avec l'offensé. Lacédémone domine à son tour, et notre
suprématie a passé dans ses mains : mais elle essaye de la tyrannie, elle
ébranle violemment les anciennes institutions, et aussitôt tous les Grecs, même
ceux qu'elle a ménagés, se relèvent pour la combattre. […] Néanmoins, toutes les fautes commises,
soit par les Lacédémoniens, soit par nos pères pendant un siècle, sont peu de
chose, Athéniens, ou plutôt ne sont rien, comparées aux attentats de Philippe
contre la Grèce depuis treize ans au plus qu'il a commencé à surgir.
4
[…] Tout ce que nous
sommes de Grecs, nous le savons, nous le voyons, et nous ne sommes pas indignés
! Au lieu de nous envoyer des ambassades réciproques, lâchement indifférents,
isolés derrière les fossés de nos villes, jusqu'à ce jour nous n'avons pu rien
faire pour l'utilité commune, rien pour le devoir, ni former une ligue, ni
réunir nos cœurs et nos bras. D'un oeil tranquille chaque peuple voit cet homme
grandir, semble compter comme gagné pour lui le temps employé à la destruction
d'un autre, et ne donne au salut de la Grèce ni une pensée, ni un effort.
Personne n'ignore pourtant que, semblable aux accès périodiques de la fièvre ou
de quelque autre épidémie, Philippe atteint celui-là même qui se croit le plus
éloigné du péril.
5
D'ailleurs, vous le savez encore, si les Hellènes ont souffert sous la domination de Sparte ou d'Athènes, du moins leurs injustes maîtres étaient de vrais enfants de la Grèce. Ici nos fautes pourraient se comparer aux dissipations d'un fils légitime, né dans une famille opulente : en blâmant, en condamnant sa conduite, nous ne saurions méconnaître ni son titre de fils, ni ses droits à l'héritage dont il abuse. Mais qu'un esclave, qu'un enfant supposé s'avise d'engloutir une succession étrangère, avec quel courroux, grands dieux ! nous flétrirons tous un vol si affreux, si révoltant ! Où est-il donc, notre courroux contre Philippe et ses attentats ! Philippe qui n'est pas Grec, qu'aucun lien n'unit aux Grecs, Philippe qui n'est pas même un Barbare d'illustre origine, misérable Macédonien né dans un pays où l'on ne put jamais acheter un bon esclave !
[…] Greffier, lis mon mémoire.
Suit la lecture de la Proposition de Démosthène pour préparer efficacement la
guerre contre Philippe. Suit un extrait : Il faut nous armer les premiers, il faut donner l’exemple ;
puis convoquer, coaliser, instruire, exciter le reste de la Grèce. Voilà ce qui
convient à la majesté d'Athènes. Ce
serait une erreur de croire que Chalcis ou Mégare sauveront la commune patrie,
tandis que vous fuirez les travaux : trop heureuses ces deux villes si elles
peuvent se sauver elles-mêmes ! A vous seuls appartient cette tâche : noble privilège
que vos ancêtres ont acheté et transmis à leurs enfants par tant de périls et
tant de gloire ! Mais, si chaque Athénien, toujours inactif, n'a d'empressement
que pour ce qui le flatte, d'attention que pour prolonger sa paresse, d'abord
il ne trouvera personne pour le remplacer ; ensuite, le fardeau que nous
repoussons, la nécessité, je le crains, viendra nous l'imposer : car, s'il
existait pour la Grèce d'autres libérateurs, elle les aurait trouvés depuis
longtemps, grâce à votre refus d’agir ; mais non, il n'en est point.
Un
discours pour convaincre
Le
discours de Démosthène est l’œuvre de quelqu’un qui maîtrise les codes de la rhétorique
antique (art de construire ses discours). La partie 1 du discours sert
d’introduction : elle vise à alerter les Athéniens du grand danger qui les
menace. C’est ce qu’on appelle l’exorde : Cette introduction permet à l’orateur de justifier sa prise de parole et de montrer que
l’intérêt du public rejoint le sien à propos du sujet qu’il va traiter. Les paragraphes suivants sont une suite
d’arguments qui ont pour but de prouver la nécessité d’agir contre Philippe de
Macédoine en présentant l’analyse que fait Démosthène de la situation. Il
s’agit de la narration (qui présente les faits) puis de la
division (étude des arguments point par point) et enfin de la péroraison
(conclusion qui en appelle aux sentiments et exalte l’auditoire) Enfin, passée cette
longue justification générale vient l’exposé des mesures réclamées par
Démosthène qui sont elles-aussi justifiées point par point.
Consignes
Reconstituer
l’argumentation de Démosthène. (Tous les élèves)
Chaque
paragraphe, numérotés de 1 à 6, a été résumé en une ou deux phrases.
Reconstituez l’ordre des phrases pour produire le résumé du discours.
a- Donc
Athènes doit défendre la Grèce : elle seule le peut.
b-
Les
cités grecques ne sont pas unies, ce qui profite à Philippe
c- Athènes
marche vers sa ruine mais rien n’est perdu si Athènes réagit
d- Philippe
fait la guerre à la Grèce
e-
Philippe
n’est pas grec : sa domination est donc celle d’une puissance étrangère
f- La
domination de Philippe est contraire à la tradition historique de liberté des
cités grecques.
Une
vision contradictoire de l’unité grecque (groupe 1)
Dans
les deux paragraphes consacrés à la Grèce en général, le premier rappelle
l’histoire de la Grèce : D’après Démosthène, pourquoi n’y eut-il jamais
d’unité de la Grèce ? Expliquez les allusions historiques (phrases
soulignées)
Malgré cela,
pourquoi Démosthène juge-t-il nécessaire l’unité des cités grecques face à
Philippe ?
Les
crimes de Philippe (groupe 2)
Listez
et reformulez au besoin, dans les paragraphes consacrés à l’action de Philippe
de Macédoine, les faits et éléments que Démosthène lui reproche
La
condamnation et l’explication de l’inaction d’Athènes (groupe 3)
Dans
les paragraphes consacrés à Athènes et de la phrase en gras, comment Démosthène
explique -t-il la mauvaise politique des Athéniens face à Philippe ? Quel
devrait être le rôle d’Athènes et pourquoi ce rôle échoit à Athènes plus que
n’importe quelle autre cité grecque ?
R) L’ordre
des questions correspond à un niveau croissant de difficulté