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dimanche 10 mars 2024

Le procès d'assises

 


En DGEMC, le film permet la présentation de la procédure pénale ainsi que la réflexion des élèves autour de l'administration de la preuve, de la vérité judiciaire et  de l'intime conviction. 

Bien sûr, il s'agira de faire délibérer les élèves, comme s'ils étaient les jurés.

Un (léger) découpage du film sera utile pour ne laisser que les informations dont les jurés ont connaissance. Les interactions de Sandra et son fils sont donc à mettre de côté. Le film alternant de longues scènes, sans montage serré, c'est possible à mettre en œuvre.


Vous trouverez en téléchargement ici un fichier qui vise à organiser cette activité.


dimanche 4 février 2024

Existe t-il un droit à vivre dans un environnement sain ?

 Voici la transposition en activité pour les élèves de DGEMC d'un cours donné par Mme PASCALE MARTIN-BIDOU dans le cadre d'un DU de l'université Panthéon Assas (formation dédiée aux enseignants de DGEMC)


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Vous avez le droit à votre ordinateur et d’accéder à pearltrees pour le vocabulaire

Etudiez le dossier documentaire en vous aidant des questions (réponses sur un brouillon)

Une fois l’étude du dossier documentaire terminée, rédiger une synthèse (voir sujet en fin de poly)

 

Les documents

 

1.   La reconnaissance du droit à l’environnement en droit

   En droit international

Déclarations de principes :

Exemple, résolution AGNU 28 juillet 2010, reconnaissant « le droit à l'eau potable et à l'assainissement sûrs et propres comme un droit de l'homme essentiel à la pleine jouissance de la vie et du droit à l'exercice de tous les droits de l'homme ».

Exemple, résolution AGNU (assemblée générale des Nations-Unies) 28 juillet 2022 reconnaissant que « le droit d'accès à un environnement propre, sain et durable est un droit humain universel ».

 

Convention et traités

Convention de Ramsar (Iran) en 1971 pour la protection des milieux et zones humides

 

1ere dédiée spécifiquement à l’environnement = Convention de Rio qui découle du 1er sommet de la Terre tenu à Rio en 1992 : sur la diversité biologique

 

   Les textes français

La reconnaissance législative

Loi montagne (1985) et Loi Littoral (1986)

 

Loi sur l’eau (1992) => Ou des textes plus spécialisés, par ex : Article L. 210-1 du Code de l'environnement : « Dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis, l'usage de l'eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous ».

 

Article L. 110-2 du code de l’environnement (le code de l’environnement est créé en 2000) : « les lois et règlements organisent le droit de chacun à un environnement sain ». (< Loi Barnier de 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement) = 94 articles qui vont changer 6 codes. C’est la 1ere loi générale.

 

En 2021 la loi « Climat et résilience » reprend une partie des propositions de la Convention citoyenne pour le Climat et vise à faire entrer les préoccupation environnementale dans notre quotidien autour de thématique comme « se déplacer, se nourrir »… Elle créé un délit de mise en danger de l’environnement (passible de 3 ans de prison et 250 000 euros d’amende) quand on expose l’environnement à un risque, même si celui-ci ne se réalise pas. + un délit d’écocide quand il y a une atteinte grave et durable (plus grave donc plus durement puni)

 

La protection constitutionnelle

= Charte de l'environnement : Article 1er.” Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.”. La charte ajoute un art 2 qui dispose une obligation, pour les personnes publiques comme les personnes privées, à préserver l’environnement

 

Question

Il s’agit de montrer le caractère récent de cette législation et d’expliquer le processus d’élargissement progressif du champ de compétence du droit en matière de protection de l’environnement.

 

Il s’agit de définir quel(s) type(s) de droit(s) nouveau(x)  est/sont créé(s)

 

2.      Les moyens de protection

   Au niveau national

Le juge administratif

1er ex : 2005 le juge de Châlons-en-Champagne (TA) saisi d’un référé-liberté pour empêcher la tenue d’un technival (une rave party dans un lieu environnementalement fragile), répond qu’on est bien face à un nouvel objectif à valeur constitutionnelle

Ordonnance du CE de sept 2022 : extrait « M. B... C... et Mme A... C... ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au département du Var de suspendre les travaux de recalibrage de la route départementale n°29 au lieu-dit " Les Martins ", sur le territoire de la commune de la Crau. (…) Considérant 5. En outre, le droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, tel que proclamé par l'article premier de la Charte de l'environnement, présente le caractère d'une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Toute personne justifiant, au regard de sa situation personnelle, notamment si ses conditions ou son cadre de vie sont gravement et directement affectés, ou des intérêts qu'elle entend défendre, qu'il y est porté une atteinte grave et manifestement illégale du fait de l'action ou de la carence de l'autorité publique, peut saisir le juge des référés sur le fondement de cet article

Rappeler de quel ordre juridique relèvent TA et CE + signification de ces initiales. Expliquer en quoi consiste un référé-liberté.

Montrer que le droit à l’environnement implique une obligation de ne pas faire (une atteinte à l’environnement), mais aussi une obligation de protéger, donc de faire.

A vote avis, comment le CE a-t-il statué dans l’affaire de sept 2022.

 

Le Conseil constitutionnel

Ex 1 Décision QPC 2013-346 du 11 octobre 2013 relative à l'interdiction de la fracturation hydraulique pour l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures

Ex 2 : Décision DC du 4 août 2016, relative à la loi pour la reconquête de la biodiversité

Ex3 : Décision QPC du 31 janvier 2020 : la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, constitue un objectif de valeur constitutionnelle.” (à l’occasion d’une loi relative aux conditions de commercialisation de certains produits phytosanitaires : il s’agissait de déroger à l’interdiction du l’emploi du glyphosate pour la production des betteraves sucrières) + « Les limites apportées par le législateur à l’exercice d’un droit à vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ne sauraient être que liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées à un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi ».

 

Expliquez ce quest une QPC et comment elle se déclenche.

 

Comment comprenez-vous la décision du CC du 31 janv 2021 et singulièrement la deuxième citation ?

 

   La protection par la Cour européenne des droits de l’homme

C’est une protection par ricochet car les textes fondateurs sont silencieux sur ce point et le texte de la Conv EDH. La CEDH utilise d’autres droits qui sont garantis par le texte de la Conv EDH pour protéger le droit à un environnement sain = le droit à la vie (art 2 Conv EDH) etc

 

Ex1 : Le droit à l’environnement via le droit à la vie

Article 2 de la Convention. Affaire Öneryildiz/Turquie (arrêt de grande chambre du 30 novembre 2004) : impact des activités industrielles dangereuses par nature sur le droit à la vie des individus.

 

Ex2 : Le droit à l'environnement via le respect de la vie privée

Article 8 de la convention qui garantit le droit à la vie privée et notamment le respect du domicile. (affaire Lopez Ostra/Espagne, arrêt du 9 décembre 1994) = « des atteintes graves à l’environnement peuvent affecter le bien-être d’une personne et la priver de la jouissance de son domicile de manière à nuire à sa vie privée et familiale, sans pour autant mettre en grave danger la santé de l’intéressé »

 

Ex3 : Le droit à l’environnement via le droit de propriété

Contrôle de proportionnalité : juste équilibre entre l’intérêt général - la protection de l’environnement - et l’intérêt particulier - l’atteinte à la propriété (art.1er protocole 1). Le droit de propriété cède face à la protection du littoral dans les affaires Depalle et Brosset-Triboulet / France (Grande chambre 29 mars 2010).

 

Toutefois cette protection est encadrée et limitée du fait même qu’elle est dérivée.

   Il faut qu’il y ait atteinte à un droit garanti par la Convention, qu’on peut mesurer.

De plus, il y a difficulté parfois à établir

   Le lien de causalité entre le fait générateur et la nuisance

   Un seuil de gravité

Il faut un seuil de gravité minimum. Flamenbaum et autres /France, 13 décembre 2012 (prolongation de la piste principale de la ligne d’aéroport de Deauville). La CEDH tranche en faveur de la France car elle considère que les autorités ont maintenu un juste équilibre entre les nuisances sonores et l’intérêt général.

 

Rappelez ce qu’est la CEDH et les mécanismes de sa saisine.

Comment comprenez-vous l’expression « protection par ricochet ». Montrez que le droit progresse ici par la jurisprudence.

Quelles sont les conditions pour que la protection de la CEDH s’applique en termes de protection de l’environnement ?

 

 

Le sujet de synthèse

Le droit à vivre dans un environnement sain : la construction progressive d’un droit

Vous suivrez le plan des documents = deux parties les textes / la protection

Aidez-vous des questions pour construire votre raisonnement


mardi 28 novembre 2023

La transition, un changement global

 Une proposition d'étude de cas pour introduire le programme de 2nde en Géographie et apporter le vocabulaire utile  (acteur,  développement et développement durable, enjeu, risque, transition, démocratie participative) ainsi qu'un rappel des indicateurs les plus communément utilisés (mesure du peuplement, de la richesse, de la forme de structure économique). 


Il se base sur cette émission de radio  (à faire écouter par les élèves chez eux) dont on fait le bilan en classe en s'aidant de la fiche ci-dessous.



jeudi 16 novembre 2023

L'indépendance de la Grèce

Dans le cadre du cours de 1ere HGGSP sur le thème de la Puissance, je fais un chapitre consacré aux Etats et à leur forme de domination et d'expansion (titre Empire et Hégémonie cf l'activité qui introduit la notion d'hégémonie). Après une première partie sur les empires qui se termine par l'étude du jalon sur l'empire ottoman, une 2e partie est consacrée à la forme des Etats-Nation. Elle débute par l'étude de cas de la Grèce des années 1820-1830. Puisqu'il ne faut pas empiéter sur le programme du tronc commun (PPO la liberté de la Grèce), on passe très vite sur le courant philhellène qui constitue une opinion publique en Europe de l'Ouest favorable à l'intervention aux côtés des Grecs révoltés contre les Ottomans, on fait une analyse du tableau de Delacroix , scènes de massacre de Scio, pour en montrer les procédès visant à créer du pathétique, 



puis et surtout, on analyse le texte suivant :

    L'insurrection qui va conduire la Grèce à l'indépendance débute le 25 mars 1821, après 400 ans de domination ottomane. Un premier congrès national est réuni à Épidaure pour rédiger une Constitution (1/13 janvier 1822). Il adopte également un Acte d'indépendance pour expliquer les raisons du soulèvement et les difficultés du pays.
Source : La traduction a été publiée par Dufau dans le supplément à la collection des constitutions, chez Pichon et Didier, 1830.

Déclararation d'indépendance de la Grèce. 

Donné à  Épidaure, le 15 (27) janvier 1822, et l'an 1er de l'indépendance.

signé : Alexandre Mavrocordato, président du Congrès. 

La nation grecque prend le ciel et la terre à témoin que, malgré le joug affreux des Ottomans qui la menaçait d'une ruine entière, elle existe encore. Pressée par les mesures aussi iniques que destructives que ces tyrans féroces, après avoir violé leurs capitulations ainsi que tout esprit d'équité, rendaient de plus en plus oppressives, et qui ne tendaient à rien moins qu'à l'anéantissement du peuple soumis, elle s'est trouvée dans la nécessité absolue de courir aux armes pour mettre à l'abri sa propre conservation. Après avoir repoussé la violence par le seul courage de ses enfants, elle déclare aujourd'hui devant Dieu et devant les hommes, par l'organe de ses représentants légitimes réunis dans le congrès national, convoqué par le peuple, son indépendance politique.

Descendants d'une nation distinguée par ses lumières et pas la douce civilisation, vivant à une époque où cette même civilisation répand, avec une profusion vivifiante, ses bienfaits dur les autres peuples de l'Europe, et ayant sans cesse le spectacle du bonheur dont les peuples jouissent sous l'égide protectrice de la loi, les Grecs pouvaient-ils rester plus longtemps dans un état aussi affreux qu'ignominieux, et voir avec apathie le bonheur qu'ils sentaient que la nature a également réservé à tous les hommes ! Des motifs si puissants et si justes ne pouvaient sans doute que presser le moment du réveil, où la nation, pleine de ses souvenirs et de son indignation, devait réunir ses forces pour revendiquer ses droits et venger la patrie d'une tyrannie dont rien n'égale l'horreur.

Telles sont les causes de la guerre que nous avons été forcés d'entreprendre contre les Turcs. Loin d'être fondée sur des principes de démagogie et de rébellion, loin d'avoir pour motifs les intérêts particuliers de quelques individus, cette guerre est une entreprise nationale et sacrée ; elle n'a pour but que la restauration de la nation et sa réintégration dans les droits de propriété, d'honneur et de vie ; droits qui sont le partage des peuples policés nos voisins, mais qui étaient arrachés aux Grecs par une puissance spoliatrice.
Des clameurs publiques, peu dignes d'hommes nés libres et élevés au sein de l'Europe chrétienne et civilisée, dirigées contre notre cause, sont parvenues jusqu'à nous. Mais quoi ! les Grecs seuls, de toutes les nations européennes, devraient-ils être exclus comme indignes de ces droits que Dieu a établis pour tous les hommes ? ou bien étaient-ils condamnés par leur nature, à un esclavage éternel qui perpétuait chez eux la spoliation, les violences et les massacres ? Enfin la force brutale de quelques hordes barbares qui, sans être jamais provoquées, vinrent, précédées du carnage et suivies de l'esprit de destruction, s'établir au milieu de nous, pouvait-elle jamais être légalisée par le droit des gens de l'Europe ? Les Grecs, sans l'avoir jamais reconnue, n'ont jamais cessé de la repousser par les armes, toutes les fois qu'une espérance ou des circonstances favorables se sont présentées.

Partant de ces principes et sûrs de nos droits, nous ne voulons, nous ne réclamons que notre rétablissement dans l'association européenne où notre religion, nos moeurs et notre position nous appellent à nous réunir à la grande famille des chrétiens et à reprendre, parmi les nations, le rang qu'une force usurpatrice nous a ravi injustement. C'est dans cette intention aussi pure que sincère que nous avons entrepris cette guerre, ou plutôt que nous avons concentré les guerres particulières que la tyrannie musulmane a fait éclater sur les diverses provinces et sur nos îles, et nous marchons d'un commun accord à notre délivrance, avec la ferme résolution de l'obtenir ou d'ensevelir enfin à jamais nos malheurs sous une grande ruine digne de notre origine qui, dans ces calamités, ne fait que peser davantage sur nos coeurs.

[...]


 Deux axes d'analyse sont donnés aux élèves 

1) Quelles sont les justifications de la révolte apportées par ce texte ? Autrement dit comment la domination ottomane est-elle qualifiée ?

2) Relever toutes les occurrences du mot "nation" et le champ lexical qui lui est associé. Comment peut-on distinguer "nation", "peuple", "patrie" ? Quelles sont, dans ce texte, les fondements de la nation grecque ?

lundi 8 mai 2023

Une nouvelle constitution pour la France ?

Une proposition pas encore testée d'activité de fin d'année en EMC Terminale. La séquence prend place après le cours sur la République et ses évolutions (partie hist) et en EMC sur la constitution de la Ve (actualité liée à la réforme des retraites oblige...)


En guise d'introduction

Une nouvelle constitution pour la France ?

Comme le dit Pierre Rosanvallon (La société des Egaux, Seuil, 2011, p.105), en France « l’essence du social est comprise sur un mode politique ». Dit autrement, cela signifie qu’en France, pour régler des problèmes et dysfonctionnements sociaux, on a spontanément l’idée de transformer la forme politique : ainsi, la France est la championne des pays démocratiques pour son nombre de constitutions (15 depuis 1789) et lois constitutionnelles (plus d’une centaine).

En ce moment, dans l’actualité, on parle de « crise démocratique » et l’idée de passer à une 6e République revient en force. De fait, le fonctionnement de la Ve République a souvent été critiqué. Je vous propose donc une activité de réflexion autour des problèmes et limites de la Ve République et surtout sur des pistes d’amélioration de cette dernière.

 

TRAVAIL DE GROUPE et EVALUATION FLASH

·         Groupe 1 : thème = les valeurs inscrites dans le préambule de la Ve République et à inscrire dans le préambule de la Vie République

Pour rappel, les valeurs (et les droits qui en découlent) sont l’aune à laquelle on mesure la validité de toutes les lois de la République. Les droits se sont additionnés et complétés au fil des décennies, mais peut-être ne couvrent-ils pas tous les champs possibles et ne répondent-ils pas tous aux nouvelles problématiques. Par exemple, les individus ont des droits, mais les communautés ? Peut-on attribuer des droits aux choses, à la nature ? Faut-il une extension des protections économiques ?

 

·         Groupe 2 : thème = le fonctionnement des pouvoirs politiques

Comment assurer un fonctionnement efficace des institutions pour plus de démocratie ? Pour rappel, la démocratie française doit assurer la juste représentation de tous les citoyens dans leur diversité, et permettre l’exercice plein et entier de leurs droits. Elle doit aussi susciter la création d’un Etat qui administre efficacement la France et la représente auprès des acteurs internationaux.

 

·         Groupe 3 : thème = Le contrôle de l’exercice des pouvoirs et la citoyenneté

Le contrôle de l’action de l’Etat est un des fondements de la démocratie. Il peut être interne (les différents pouvoirs se contrôlent mutuellement, un conseil constitutionnel vérifie la constitutionnalité des lois) ou externe (les citoyens et/ou la justice contrôlent l’action de l’Etat). La démocratie représentative est souvent critiquée car elle ne permet pas en France une implication active et régulière des citoyens à la vie politique.

 

Vous allez avoir 2 ou 3 heures pour réfléchir à ces questions, compléter la fiche de groupe, préparer l’intervention orale. Des documents se trouvent dans Pearltrees. Vous vous autoévaluerez et vous présenterez à l’oral l’état de vos réflexions.

samedi 1 octobre 2022

Thucydide et l'hegemon athénien

 Voici une proposition d'activité à faire avec les 1ere SPE sur le thème de la puissance. Personnellement, je fais une leçon ayant pour objectif de définir et comparer deux formes d'exercice de la puissance, la forme hégémonique et la forme impérialiste. Le thème de la Puissance est mon 1er thème de l'année et c'est à l'occasion de cette leçon que je fais la première analyse de document-source que je présente ici. L'intérêt de ce choix réside à mon sens dans le fait que, parce que l'on peut s'appuyer sur les acquis de 2nde sur Athènes, les guerres médiques, la ligue de Delos, la guerre du Péloponnèse (qu'il convient bien sur de réactiver !), la mise en activité proprement dite sur le texte de Thucydide peut se faire quasi immédiatement.

Hégémon, le modèle athénien

Les élèves ont à disposition les documents suivants :

1) Un 1er extrait de Thucydide pour définir la notion d'hegemon

Les Athéniens reçurent ainsi l’hégémonie du plein gré des alliés […] : ils fixèrent quelles villes devaient leur fournir contre le Barbare de l’argent ou bien des navires – le principe officiel étant de ravager le pays du Roi en représailles pour les torts subis. […] le tribut qui fut fixé à l’origine se montait à quatre cent soixante talents ; on le déposait à Délos, et les réunions se faisaient dans le sanctuaire. Cependant, les Athéniens, dont l’hégémonie, au début, s’exerçait sur des alliés autonomes, et invités à délibérer dans des réunions communes, devaient [s’opposer] non seulement au Barbare, mais à leurs propres alliés, lorsque ceux-ci se montraient rebelles, et aux éléments péloponnésiens mêlés dans chaque affaire. […] : les Athéniens montraient des exigences strictes. […]. Aussi bien, d’une façon générale, l’autorité des Athéniens ne s’exerçait-elle plus comme avant, avec l’agrément de tous ; et, de même qu’ils ne faisaient plus la guerre sur un pied d’égalité avec les autres, de même il leur était aisé de châtier les dissidents. […] aussi Athènes voyait-elle croître sa flotte, grâce aux frais qu’ils assumaient, tandis qu’eux-mêmes, en cas de défection, entraient en guerre sans armements ni expérience.

Thucydide, Histoire de la guerre du Péloponnèse, I.96-99

Vocabulaire :

tribut : c’est la somme d’argent payée par les cités à Athènes contre sa protection militaire, pour la dédommager des frais supplémentaires que coûtent l’entretien d’une armée. Ce tribut s’appelle le « trésor » de la Ligue de Délos, laquelle est l’ensemble des cités qui payent cette somme à Athènes. D’abord localisé à Delos, il fut amené à Athènes par Périclès.

talent : monnaie athénienne équivalant à 6000 drachmes. Avec la Ligue de Délos, la monnaie athénienne va s’imposer dans toutes les cités alliées. Si l’on fait une opération de conversion, on s’aperçoit que 460 talents valent 2 760 000 drachmes, soit 2 760 000 journées d’un ouvrier travaillant sur le chantier de construction de l’Acropole, à la fin du Ve siècle avant J.-C.

autonomes : des cités autonomes sont des cités qui se donnent à elles-mêmes leurs propres lois donc qui se gouvernent seules.

dissidents : les cités qui refusent d’obéir (ici à Athènes)

 

Questions

1e étape : Quel est le plan du texte ?

R- Ici, la meilleure façon de couper le texte est de distinguer trois parties :

  • mode de fonctionnement de la Ligue de Délos
  • évolution de la Ligue de Délos entre les guerres médiques et la guerre du Péloponnèse
  • analyse des causes de cette évolution

 2e étape : Quel est le contenu du document : Comment pourrait-on le résumer en une phrase ? Choisissez entre les propositions

a) Les Athéniens ont profité d’un contexte militaire difficile pour établir leur hégémonie sur le monde grec.

b) La Ligue de Délos reposait sur la participation volontaire de tous ses membres : l’attitude d’Athènes fut mal acceptée par les cités alliées.

c) Pendant les cinquante années qui se sont écoulées entre les guerres médiques et la guerre du Péloponnèse, l’alliance militaire rassemblée autour d’Athènes pour répondre à la menace perse est devenue un empire maritime sous domination athénienne.


3e étape : relever la phrase qui définit ce qu'est l'hégémonie selon Thucydide, puis à différents endroits du texte, la façon dont l'auteur caractérise cette hégémonie.

R- Les élèves identifient la première phrase. L'hégémonie est donc une forme de domination consentie par ceux sur lesquelles elle s'exerce.

Ceci s'explique par :

-l'existence d'un but commun ("ravager le pays du Roi en représailles pour les dommages subis")

-ce but et les modalités pour y parvenir sont négociées ("ils fixèrent", "délibérer dans des réunions communes", "avec l'agrément de tous")

-cette domination n'est pas complète : les alliés restent "autonomes"


2) Une feuille de rappels et précisions historiques, pour aider à la contextualisation et à l'analyse

(très largement piqué sur le site Herodote.com)

Les informations de cette feuille sont largement utilisées pour l'introduction du commentaire de texte qui suit


3) Un deuxième extrait de Thucydide qu'il va s'agir de présenter et d'analyser, dans le format de l'épreuve de baccalauréat. Mon objectif ici est double. Du point de vue méthodologique, rappeler les bases de la méthode du commentaire de texte et d'initier à la spécificité de la Spé, l'analyse critique. Du point de vue didactique, c'est la première fois dans l'année que les élèves touchent du doigt la composante "Science Politique" du programme ; l'aspect un peu solennel de l'exercice, isolé, formellement identifié comme "théorie politique", leur permet de comprendre que la Sce-Po de HGGSP revient à étudier des auteurs qui ont forgé des théories et des concepts politiques qui vont nous permettre de mieux comprendre les exemples historiques et/ou géopolitiques du programme.


Activité

Dans un 1er temps, les élèves découvrent le texte et ses deux grands thèmes : l'hégémonie athénienne et ses transformations et la justification par Thucydide de la domination athénienne faisant intervenir une théorie naturaliste des relations entre Etats (= les deux questions sous le texte)

Ensuite, je leur demande de rédiger l'introduction (en ayant rappelé les différents points qui composent obligatoirement l'introduction du commentaire de doc). Nous avons réfléchi à la problématisation ensemble. Pour cela, je leur ai demandé de trouver comment mettre en lien l'enjeu principal du texte (= défendre la domination athénienne contre les critiques) avec l'idée principale du contexte (= la défaite athénienne dans la guerre du Péloponnèse). Nous en sommes arrivés à la question suivante : "En quoi/dans quelle mesure/comment la pratique athénienne de l'hégémonie sur les cités grecques peut permettre de comprendre la défaite de la cité-Etat ?"

Au moment de la correction des questions, on relève dans le texte les éléments du texte sur lesquels s'appuyer pour les deux parties

partie 1 : comment Thucydide répond-il aux critiques formulées à l'encontre d'Athènes ?

En rose

partie 2 : comment Thucydide justifie-t-il la domination athénienne par une théorie réaliste/naturaliste des relations entre Etats ?

En bleu



Enfin, les élèves sont remis en phase de réflexion, personnelle ou en groupe, pour élaborer un plan détaillé qui répond aux deux questions posées, intègre les citations, et complète au besoin les allusions du texte par des connaissances extérieures. Voici ce que ça donne après la mise en commun

1) l'hégémonie ath

  • une hégémonie juste. Thucydide parle de "mesure" (l.15)

- pcq'elle est régulée par des "conventions" et des lois (lignes 16-17)

-pcq ces règles placent Athènes et ses alliés "sur un pied d'égalité" (ligne 21) 

pcq les alliés ont la possibilité ont la possibilité d'intenter des procès à Athènes et de les gagner (l.16)

  • une hégémonie nécessaire pour le bien des cités de la Ligue
- Cette hégémonie a été "offerte" (l.6) <=> exposer les circonstances de la naissance de la Ligue, menace perse ...

- (l.4 -5) La domination ath doit être "une main de fer" pour pouvoir assurer la protection de la Grèce (évocation de "danger" sans que ce soit bien clair si c'est se mettre en danger pour la Ligne ou juste pour Athènes) + (l.23 "leur avoir conservé l'essentiel", allusion sans doute à la Liberté des cités alliées)

-T. insiste dans la l.6-7 que Athènes ne dirige pas son empire pour son  "intérêt"

  • Mais une hégémonie critiquée ( des critiques et des haines cf l.3 et l.15)
- sentiment d'injustice <=> reprendre la critique formulée dans le 1er texte étudié de Thucydide = pendant qu'Athènes se renforce militairement avec l'argent des alliés, ceux-ci n'ont même plus de quoi se défendre.

-"abus de pouvoir" (l.24) <=> donner des exemples historiques, au minimum le transfert du trésor de Délos à Athènes et un exemple d'une guerre de Athènes contre un allié révolté

- Il est reproché à Athènes d'être autoritaire (l.7) et de "chicaner" = contraindre ses alliés par des procès


2) De l'idéalisme au réalisme

ma proposition

  • Si l'on en croit T., Athènes assume une domination impériale
- il dit "empire" ("accepter un empire" l.6) et pas "Ligue"

- on ne dirige pas un empire en respectant des valeurs telles que "le sens de l'honneur" ou en écoutant les craintes de ses alliés (l.6 et 7)

- Athènes est présentée comme étant contrainte à cette manière de diriger l'empire (l.4 et l.22), mais elle n'abuse pas de son pouvoir (comme cela a été indiqué dans la partie 1)

Par souci d'efficacité donc, Athènes aurait, selon T., une conduite réaliste de sa politique.

  • Un Etat se conduit comme un être humain, en respectant des lois présentées par T. comme "naturelles"

- "Notre manière de faire n'a rien que de banal et de conforme aux usages humains" (l.5-6), "ce n'est pas nous qui avons inventé cela" (l.6-7)

- or,  le "penchant naturel de l'homme" est de "dominer les autres" (l.12) donc Athènes cherche à dominer

-D'ailleurs, d'autres cités en Grèce dominent elles-aussi (.18 à 20). Il n'y a pas que Athènes. Ici T. fait allusion à Sparte

- La nature veut que les forts dominent les faibles , et la violence est une nécessité découlant de la loi du plus fort (fin du texte)

  • Justice ou raison du plus fort ?
- Ce sont les faibles qui avancent les idées de justice ("le plus faible ne doit pas nécessairement se soumettre au plus fort") pour compenser leur faiblesse.(fin du texte)

- La justice est le résultat d'une négociation entre les hommes ou entre les Etats. C'est ce qui explique que les hommes s'irritent de subir l'injustice, rupture d'un pacte/ contrat d'égalité des droits. Puisqu'il y a eu contrat, ils peuvent donc espèrer restaurer le contrat, mais ne peut pas remettre en cause ni lutter contre la loi du plus fort. C'est une "necessité" (fin du texte)

- Il est donc difficile pour un Etat puissant (comme pour un individu) de s'imposer à lui-même des limitations ("digne d'éloge"...). Or c'est pourtant ce que fait Athènes.


Une autre proposition pour la partie 2, celle bien plus simple des élèves

  • Les Etats se comportent comme les Hommes
  • Dans les relations internationales, la domination n' a "rien que de banal"
  • La négociation de règles (le droit/la justice) peut tempérer les rapports de domination entre les Etats, mais il n'est jamais supérieur au désir de domination des Etats.


Je ne travaille pas dans ce TD la conclusion avec les élèves. Je me contente de leur signaler qu'il faudrait en l'occurence rappeler en conclusion, pour répondre à la problématique, que Sparte a agrégé dans une alliance, la ligue du Péloponnèse, toutes les cités mécontentes d'Athènes.


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La trace écrite du cours qui va avec l'exercice



La suite des événements ? Maintenant que la notion d'hégémonie est finement maitrisée, on va pouvoir avec les élèves passer à l'étude de l'hégémonie américaine (ses formes, sa mise en place, ses limites et remises en cause). Ici et pour approfondir, le lien vers un autre article sur ces notions d'hégémonie et d'impérialisme se basant sur des éléments plus contemporains.


>Donné en DM, voici le corrigé/barème : fiche Pearltrees


vendredi 17 juin 2022

Japon : passer du texte au croquis

 Une proposition pour un exercice de 2nde, dans le cadre du cours sur les risques

J'ai fait le texte volontairement long, avec un peu de gros pour montrer aux élèves qu'il faut sélectionner les informations dans le texte et que toutes les informations ne sont pas forcément adaptées au sujet ou forcément cartographiable ; c'était leur premier croquis, l'occasion de dérouler toute la méthode.

L'exercice a plutôt bien fonctionné, mais encore une fois, il avait été préparé collectivement.

Sujet : Passer du texte au croquis            

Exercice Le Japon, un pays vulnérable ?

 Le texte

Le milieu naturel japonais est contraignant et soumis aux risques naturels

Le Japon est situé sur une zone de contact de plusieurs plaques océaniques. C’est une zone d’éruptions volcaniques et de séismes nombreux. Pour les surmonter, les Japonais ont trouvé des technologies de pointe qu’ils vendent à l’étranger. De plus, leur façade littorale pacifique est soumise aux typhons et aux tsunamis. 

C’est un archipel. Du point de vue du relief, il n’y a quasi que des montagnes (88%) sur les 4 grandes îles : Hokaïdo, Honshu, Shikoku, et Kyushu.

Un espace soumis aux risques industriels

 Ils possèdent peu d’hydrocarbures, ce qui explique le recours au nucléaire. On trouve des centrales nucléaires civiles dans des plaines littorales habitées, mais surtout sur la façade littorale de la mer du Japon, moins peuplée (c’est la partie du Japon qu’on nomme le « Japon de l’envers »)

Les zones densément habitées sont les rares plaines littorales de la façade pacifique. Ainsi, les métropoles de cette région forment la plus grande mégalopole du monde   Tokyo : 32 millions d’habitants, 30% de l’industrie   Nagoya : 10 millions d’habitants, 13% de l’industrie   Osaka-Kobé-Kyoto : 17 millions d’habitants, 20% de l’industrie.  

C’est donc là que se concentrent aussi les activités : 85% sur la ligne Tokyo-Kobé. Les littoraux sont des espaces surchargés, ce qui a amené à délocaliser certaines industries qui occupaient beaucoup d’espace. L’agriculture est défavorisée par le relief. Ils ont donc adapté le matériel à la petitesse des terres. Pour gagner de l’espace, les Japonais construisent des terre-pleins sur le littoral pacifique (Japon "de l’endroit") pour y loger les activités de loisirs, les activités de service et industrielles, les aéroports …

C’est donc là que se concentrent aussi les risques : la forte concentration des hommes et des activités renforce les risques technologiques et la pollution

Mais un espace bien maîtrisé 

Dans ce milieu insulaire, le Japon a développé un système de ponts pour pouvoir raccorder les différentes îles. Ces ponts sont capables de résister aux cyclones et aux séismes de très forte amplitude (construction aux fondations antisismiques). Un mur anti-tsunami est en construction au large de la plaine de Sendai, là où avait eu lieu la catastrophe de Fukushima en 2011. De même, le réseau de voies ferrées est très important, ainsi que le transport aérien. Le secteur des télécommunications et de l’information est très dynamique, et leur flotte maritime est très développée : c’est la 4ème du monde.

 La maîtrise de leur espace et la gestion du risque est donc un facteur incontestable de leur puissance. 

 Fiche consigne

Vous devez reconstituer un croquis de synthèse à partir du texte qui en est, en quelque sorte l’analyse.

  • Combien de thèmes dans le texte et donc combien de parties dans la légende ?
  • Quels éléments du texte  vous donnent des repères spatiaux. Entourez dans le texte et positionnez-les sur le fond de carte. C’est ce qu’on appelle de la NOMENCLATURE = noms de lieux
  • Repérer dans le texte les différentes idées. Certaines peuvent être cartographiables (c’est-à-dire représentables par un figuré sur le fond de carte), d’autres non. Fluotez dans le texte les éléments qui vous semblent importants et représentables. Demandez-vous quel figuré vous allez utiliser pour chaque idée + comment la nommer rapidement, mais clairement dans la légende


La grille de correction



dimanche 29 mai 2022

Les jeunes et le vote en France

 Une proposition de séance pour la 1ere HGGSP, thème de la démocratie représentative.


Je suis partie d'une émission d'Arrêt sur Images que vous trouverez ici.

Le questionnaire pour prélever les informations de l 'émission se trouve ici.

Séance testée et validée. Ça marche du feu de dieu avec les élèves.

lundi 14 mars 2022

Analyser avec les élèves le discours de Poutine d'entrée en guerre

 

La mise en scène du pouvoir


Je mets ci-joint le fichier word du discours de Poutine du 24 février dans une version abrégée et vous trouverez à la suite les éléments d'analyse linéaire que l'on peut mener avec les élèves de SPE HGGSP.

J'espère que cela pourra vous être utile. C'est un document de travail préparatoire pour le professeur.

Merci aux Clionautes sur le site duquel j'ai récupéré le texte intégral ! 


lundi 20 décembre 2021

Jouons à la diplomatie internationale en temps de crise avec la série The Brink

 Une proposition pour le thème "Puissance" du programme d'HGGSP 1ere.

The Brink (une seule saison, la saison 2 ayant été annulée)


Dans l'article de Pierre Langlais (Télérama, 22/06/2015) , cette mini-série de HBO est présenté comme un objet "quelque part entre "Docteur Folamour" et un "Homeland" du rire.

En voici l'argument (repris de l'article cité ci-dessus) :

"Créée par Roberto Benabib (ancien de Weeds) et son frère Kim sous influence du Docteur Folamour de Stanley Kubrick, The Brink place littéralement le monde « au bord » d'une guerre nucléaire quand un militaire illuminé prend le pouvoir au Pakistan, et menace d'effacer Israël de la surface du globe. Le voisin Indien n'étant pas rassuré non plus, on est à deux doigts de la catastrophe. Deux hommes semblent pouvoir l'éviter : Walter Larson (Tim Robbins), le Secrétaire d'état américain – un séducteur à la santé sexuelle inversement proportionnelle à sa santé, tout court – et Alex Talbot (Jack Black), un employé de l'ambassade américaine à Islamabad – incompétent, maquereau du dimanche quand Larson est de passage en ville.
Produite et mise en scène par Jay Roach, réalisateur de Austin Powers et du téléfilm politique d'HBO Game Change (l'homme de la situation, donc), cette pochage géopolitique oscille entre blagues énormes à la nullité assumée et satire de la politique internationale (...). Le délire complet n'est jamais loin, mais les frères Benabib semblent vouloir conserver un fond de satire, et donc une once de réalisme dans les relations diplomatiques – on se doute bien qu'une série qui implique Washington, Jérusalem et Islamabad tient de quoi être politiquement très incorrecte, et peut se payer la tête des amitiés plus ou moins hypocrites des uns et des autres. En effet, pour éviter une Troisième Guerre mondiale, Larson et Talbot vont décider de soutenir un autre fou (plus conciliant, quoi que…), de provoquer un autre coup d'état, tout en tâchant de calmer les pulsions belliqueuses des uns et des autres."

La proposition a de quoi réjouir le prof d'Histoire-Géographie tant elle fourmille d'allusions, voire de clins d'oeil appuyés à des événements historiques. Par exemple, des jeunes filles réfugiées à l'ambassade américaine du Pakistan sont l'enjeu d'une négociation entre le secrétaire d'Etat américain et l'homme que ce dernier souhaite mettre au pouvoir au Pakistan pour remplacer son frère complètement dingue. Lors de leur conversation, Walter Larson rappelle comment Reagan a utilisé l'affaire des otages de l'ambassade américaine à Téhéran pour renforcer sa popularité et il sous-entend que leur libération, juste après l'élection présidentielle, a été négociée entre Reagan et l'ayatollah Khomeiny. De même, les quelques scènes de l'évacuation de l'ambassade à Islamabad sont filmées de manière à rappeler l'évacuation en urgence de l'ambassade de Saïgon en 1975. 
D'autres moments jouent avec les clichés et les idées reçues sur la puissance et le poids diplomatiques des différents pays. La réplique sur les tambours chinois de la cérémonie d'ouverture des JO de 2008 à Pékin  m'a personnellement fait sourire car elle exprime exactement ce que j'ai pensé en la découvrant.



Certes, la satire reste superficielle et en dépit des très nombreuses références, elle manque de fond et de réflexion. The Brink n'est en aucun cas une série qui permettrait d'engager avec les élèves un travail de compréhension des enjeux internationaux, même pas ceux de la géostratégie. En revanche, on peut l'utiliser dans une première approche et pour changer un peu des supports sérieux qu'on utilise d'habitude pour les  "relevés d'information".

Je joins à ce post les liens vers le découpage vidéo 1 et le découpage vidéo 2, ainsi que le questionnaire pour les élèves. L'idée est ensuite d'organiser un kahoot.

samedi 13 novembre 2021

L'organisation politique de Florence au moment savonarolien

Si, dans les programmes scolaires, nous n'avons le temps que de présenter le système démocratique mis en place à Athènes à la fin du VIe siècle avant JC, il serait pourtant utile de prendre du temps pour présenter d'autres systèmes d'organisation de gestion et de vie politique, notamment au Moyen Age. Etudier avec les élèves, dans une démarche comparative les différentes formes de systèmes républicains (Athènes, Rome, les communes italiennes médiévales) permettrait d'aiguiser leur regard sur la longue durée de la mise en place de l'idéal démocratique.



Le palais de la Seigneurie (dit "palazzo vecchio")
qui abritait les conseils de la commune.


Dans le "laboratoire italien" des formes politiques, Florence tient une place particulière étant donné la masse de documentation et donc d'études qui lui sont consacrées. A partir du XIIe siècle, cette commune a expérimenté toutes les formes d'organisation civique : partant d'une autonomie communale, elle devient République plus ou moins oligarchique selon les époques, puis passe sous la domination quasi seigneuriale des Medicis, puis au XVIe siècle la capitale de leur duché. J'ai consacré un billet de blog à une sommaire présentation de la première république et aux ordonnances de Giano della Bella, dans le cadre d'un cours de DNL italien. Aujourd'hui, je vais présenter de façon plus classique le fonctionnement du "regime democratico temperato" mis en place en décembre 1494, alors que la descente du roi de France Charles VIII avait initié les guerres d'Italie et après que la Seigneurie a chassé Pierre de Médicis, le fils de Laurent le magnifique. Je m'appuye sur l'article de Guidobaldo Guidi, "Il Savonarola e la partecipazione alla vita politica", paru dans Savonarole. Enjeux, débats, questions, Actes du Colloque International (Paris, 25-26-27 janvier 1996), Paris, 1997, p.35-44. Mais avant, je reprends, pour introduire le propos, une large citation de l'article de Jean Bourier et Yves Sintomer, "La République de Florence (12e-16e siècle). Enjeux historiques et politiques" (dans Revue française de Sciences politiques, 2014/6, vol.64, p.1055-1081) ainsi que la chronologie qui est fournie en annexe. Cet article constitue une bonne entrée en matière pour ceux qui voudraient avoir un aperçu général de l'histoire institutionnelle de Florence.


"Du 13e au 16e siècle, et plus particulièrement lors du moment « républicain » où elle se fait le héraut de la « liberté florentine » (Florentina libertas), Florence constitue une référence centrale pour l’histoire politique du monde occidental. Tôt libérée des rapports féodaux, elle est, pendant deux siècles et demi, et malgré quelques éclipses, le lieu d’une véritable réinvention de la politique, au sens où Moses I. Finley et Christian Meier entendent celle-ci [1]Moses I. Finley, L’invention de la politique. Démocratie et… – un débat public sur les choses de la cité appuyé sur des procédures permettant aux citoyens une participation politique institutionnalisée. Mais elle l’est aussi au sens des luttes et intrigues pour le pouvoir lorsqu’elles sont tranchées in fine sur la place publique, plutôt que confinées dans les coulisses, et qu’elles s’effectuent dans un champ largement autonome, en particulier à l’égard de la religion, et partiellement professionnalisé. Si les origines et les premiers temps de la Commune de Florence restent en partie dans l’ombre, c’est avec l’affirmation du Popolo, en liaison étroite avec les associations de métiers, qu’elle devient une cité de premier plan. (les phrases en gras sont de mon fait) Avec Venise et Gênes, c’est l’une des cités-États qui, durant la Renaissance, résiste le plus longtemps à la montée des nouvelles Seigneuries princières, celles des Visconti puis des Sforza à Milan, des Gonzague à Mantoue ou des Este à Ferrare et à Modène. Dans les représentations et discours de l’époque, elle incarne la version « populaire » de la République, quand la ville des doges en représente la version « aristocratique ». La mutation politique que Florence expérimente dès le 13e siècle participe de l’invention ou de la réinvention de techniques délibératives ou électives et de modes de scrutin qui seront typiques de la politique moderne. La cité-État a rompu progressivement avec l’univers de pensée féodal, avec la théologie politique de l’empire et avec les formes institutionnelles et idéologiques de l’autorité qui en étaient le corollaire. Quelques siècles avant que ne s’impose l’idée de la souveraineté populaire, une communauté politique quasi fédérative basée initialement sur les corporations (les Arts) et d’autres groupes fondés sur un statut spécifique reconnu par la cité (les quartiers, l’organisation regroupant les partisans du guelfisme, etc.), typique des communes médiévales, cède progressivement la place, au cours des 14e et 15e siècles, à une République plus unitaire.

La politique est dans la cité toscane tout à la fois étonnamment proche et foncièrement différente de la nôtre. Quelques aspects méritent ici d’être mentionnés. La délibération publique se déploie de façon importante, en particulier à partir de la fin du 14e siècle, mais dans des assemblées quasi informelles, les consulte e pratiche, qui discutent presque quotidiennement des questions sensibles, et non dans les Conseils législatifs, lieux qui sembleront son habitat « naturel » quelques siècles plus tard. L’élection et le vote au scrutin majoritaire sont employés et affinés mais, jusqu’à la fin du 15e siècle, ces modes de scrutin ne sont pas couplés à l’idée du consentement du peuple, typique des gouvernements représentatifs modernes. Florence voit émerger une véritable classe politique, quasi professionnalisée en ce qu’elle pratique cette activité à plein temps, dominée par les grandes familles qui exercent un large contrôle, à travers leurs réseaux, sur la vie politique. Mais elle voit aussi s’affirmer la participation active de milliers de citoyens à la gestion des affaires publiques à travers un mélange de cooptation, de tirage au sort et de rotation rapide des mandats. Elle développe nombre des techniques d’administration modernes, comme l’impôt proportionnel fondé sur un recensement très précis des richesses immobilières et mobilières, dans le cadre d’un vaste État territorial en cours de constitution, qui occupe au 15e siècle toute la vallée de l’Arno, des Apennins à la mer, au niveau de Pise et de Livourne. C’est aussi à Florence que la notion moderne de république est créée, à partir du moment où Leonardo Bruni (1ere moitié du XVe siècle) oppose le régime républicain au régime princier et où la république n’est plus simplement synonyme de bon gouvernement. Cependant, l’idéologie officielle de la cité toscane est marquée par l’idéal d’une représentation politique qui n’est pas la représentation-mandat mais la désignation des personnes les plus impartiales, les plus justes et les plus utiles pour l’harmonie communale, personnes qui forment une pars pro toto pouvant engager la collectivité."


Une longue chronologie commentée accompagne l'article dont je tire l'exercice suivant :

Une exercice pour les 1ere SPE HGGSP, thème démocratie

Rapide historique de la commune de Florence

1154-1159 : la commune qui a reçu l’autorisation de la part de son seigneur, l’empereur, d’administrer elle-même la justice civile et criminelle, se dote de ses premiers statuts constitutionnels

1166 : première mention d’un Conseil de Boni Homines (les « bons hommes »)

1180-1220 : années de la mise en place du système des Arts (les corporations de Florence qui se dotent de représentants)

1244 : le popolo (ensemble des citoyens non nobles et non riches = petit peuple des artisans et des ouvriers, à jour de leurs impôts) s’organise et se dote de deux capitaines. En 1250, une insurrection renverse le groupe des notables qui dirigeait la cité et met en place le premier régime du Popolo. Celui-ci va durer 10 ans.

Tensions entre deux factions rivales : les guelfes et les gibelins.

1293 : approbation des Ordonnances de Justice qui visent à diminuer la puissance politique des plus riches et à expulser les nobles de la vie politique florentine. Création du gonfalonier de justice et du gouvernement élu de la « Seigneurie », constitué de prieurs des Arts.

1342-1346 : krach financier. Les grandes familles de la banque florentine font faillite. Les Arts mineurs par la suite rééquilibrent le pouvoir à leur profit.

1378 : révolte populaire des Ciompi (artisans du textile) qui imposent une nouvelle constitution ouvrant la vie politique aux petits ouvriers et artisans.

1382 : Fin du gouvernement des Arts. Etablissement d’un régime oligarchique, hostile au popolo minuto (les plus pauvres) qui perd tout accès au gouvernement. Officiellement cependant, le cadre de la République est conservé.

1434 : A partir de cette date, la famille des Medicis parvient à s’imposer comme l’unique famille dirigeant effectivement la ville. Les institutions sont conservées, mais sans autonomie.

1478 : échec de la tentative de coup d’Etat menée par les Pazzi contre les Medicis

1494 : la commune de Florence chasse Pierre de Medicis et met en place un régime constitutionnel à nouveau élargi aux plus pauvres.

1512 : retour des Medicis au pouvoir à Florence.


En 1ere SPE sur le thème de la démocratie, j'insiste sur les antagonismes de classes à Athènes et surtout à Rome qui ont conduit à la mise en place d'institutions de compromis permettant aux riches comme aux pauvres,, aux aristocrates comme au plébéiens de constituer un seul peuple de citoyens, participant, chacun à leur mesure, à la vie politique. Les dosages sont le résultat de rapports de force constamment renégociés et mouvants. On retrouve cette même idée dans l'histoire de Florence. La chronologie a aussi l'avantage de montrer que noblesse et richesse ne sont pas forcément synonyme : à Florence, des magnats de la banque et de la finance s'imposent au pouvoir, sans être nobles et en ayant précisément profité de l'expulsion de la noblesse féodale après les Ordonnances de Justice.

Le questionnement pour les élèves pourrait être le suivant

1)      Repérer les différents types de pouvoir à Florence :

·         Avant le milieu du XIIe siècle, qui est le seigneur de Florence ? Avant 1293, quelle classe sociale dirigeaient la ville ? Que vous suggère l’appellation « Bons Hommes » pour désigner ceux qui dirigent Florence à cette époque ? A partir de 1280, quel groupe social prend de plus en plus d’importance et s’organise ?

·         Au XIVe siècle, quelles organisations contrôlent la commune ? Est-ce toujours le cas au XVe siècle ?

·         Qu’est-ce qu’un « régime du popolo » ?

2)      Comprendre les luttes sociales et politiques à Florence

·         « Fluotez » dans la chronologie toutes les mentions témoignant de tensions sociales et politiques.

·         Quelle typologie des tensions peut-on établir ?




Focus sur un régime du popolo : la "République savonarolienne"

(remarque : l'expression est impropre, mais ce n'est pas l'objet ici d'un débat de spécialiste)




 R) coquille : lire pratica et non praticha

+ le Grand Conseil ne débat pas, il vote les lois. En de très rares cas seulement, la Seigneurie appelle au débat au sein du Grand Conseil. En temps ordinaire, cela se faisait au sein des pratiche.


Précision sur le système d’élection aux magistratures de la commune

C’est un système extrêmement compliqué en 3 étapes et que je simplifie sans être d'ailleurs certaine d'avoir tout compris. Ce n’est donc pas un suffrage direct, mais indirect.

Les membres du Grand Conseil sont réunis dans un premier temps par quartier. L’élection dure toute la journée.

Etape 1 : tirage au sort. Trois bourses/sacs ont été préparées pour chaque quartier et pour chaque collège électoral (2 bourses pour les arts majeurs, 1 pour les arts mineurs) avec les noms des personnes qui pouvaient prétendre participer à la désignation des candidats (faire partie du Grand Conseil, être majeur, être à jour des devoirs de citoyens, être membre d’un Art…). En tout, on tirait au sort 108 personnes (3 par quartier pour chaque mandat à désigner).

Etape 2 : désignation des candidats à l’élection. Juste après le tirage au sort, chacun de ces tirés au sort proposait son candidat pour la Seigneurie en choisissant parmi les membres de Grand Conseil. Leurs candidats doivent habiter leur quartier et faire partie soit des Arts majeurs (6 « seigneurs + gonfalonier soit 7 postes à pourvoir) soit des Arts mineurs (2 postes), comme eux d’ailleurs.

Etape 3 : élection. Puis tous les membres du Grand conseil procédaient au vote (non = fève blanche, oui = fève noire) pour chaque poste (9) et pour chaque nom proposé (12x9), en respectant le fait que chaque quartier devait avoir deux élus. Un notaire procédait le jour suivant au dépouillement. On conservait la personne qui avait reçu le plus grand nombre de fèves noires, à condition qu’il ait reçu au moins 50% des suffrages. Il fallait au moins 1000 votes. Sinon, on recommençait (!)

Pour les magistratures mineures, on se contentait d’un tirage au sort.

Pour les élèves, avec un peu de concentration car c'est compliqué, ils peuvent repérer le rôle souverain du Grand Conseil, le rôle de la Seigneurie comme organe du pouvoir exécutif, la séparation des pouvoir, les mandats courts et la collégialité des magistratures, le contrôle de l'action des magistrats.

Dans un 2e temps, on peut leur demander (comme pour la comparaison avec Rome) si ce système est réellement démocratique au regard des critères athéniens. Ils repéreront que les participants à la vie politique sont, comme à Athènes, une minorité, mais que , contrairement à Athènes, le petit peuple est désavantagé à plusieurs niveaux (exclu du Grand Conseil, minoritaire à la Seigneurie). Cependant, la procédure de désignation des magistratures, leur garantit (contrairement au cursus honorum romain) d'avoir des élus.

Enfin, on peut leur faire identifier les différentes échelles administratives (le quartier, la commune) et les niveaux de compétence enchassés. Puis l'importance à Florence du monde économique qui structure en fait la vie politique.


Remarque : Le mode de scrutin pour la désignation des magistrats florentins a fait l’objet de nombreux débats et a changé en juin 1495 puis en mai 1498 et en mai 1499. Il est un enjeu de la "liberté florentine", c'est-à-dire de l'effectivité de son autonomie. Il vise à éviter la mainmise des factions sur le gouvernement (Seigneurie, 10 de Liberté ...) et notamment le retour au pouvoir des partisans des Medicis. En 1499, l'institution du gonfaloniérat de Justice à vie, confié à Piero Soderini, veut faire de Florence une République enfin stable.


Ci dessous, la version simplifiée pour les élèves, avec le questionnaire



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