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dimanche 24 novembre 2024

Technopolice : vers la fin de la protection de la vie privée ?

Billet réalisé à partir de l'émission de Blast , Technopolice, vers un néofascisme en France ? (invité :  Félix Tréguer, chercheur associé au centre 'internet et société' du CNRS et militant à la Quadrature du Net) et dans une moindre mesure l'émission du Media, OSAP (invitée Vanessa Codaccioni, professeure au centre Sciences Politiques de Paris 8). Interview passionnant, plus théorique toutefois, mais qui vient apporter un cadre plus général de réflexion.





Un nouveau marché s'est ouvert depuis une bonne dizaine d'année en Occident, comme ailleurs : celui de la techno-sécurité. C'est la promesse de revenus juteux pour les entreprises de ce secteur qui vendent leurs logiciels autant à l'export qu'auprès des Etats démocratiques occidentaux. De nouvelles techniques à base de surveillance algorithmique et de croisement de fichiers ont ainsi été déployées par la police en France depuis 2011 et ce, sans encadrement juridique sérieux. Dans nos sociétés traumatisées par le matraquage médiatique et politique permanent autour des questions de sécurité (ce que V. Codaccioni appelle "la gouvernementalité par la peur"), un déploiement progressif de techniques intrusives de surveillance a forcé toutes les barrières et les garde-fous. Désormais, semble-t-il, les outils sont prêts pour la mise en place d'un Etat sécuritaire mettant en cause l'Etat de droit, au sens où il garantit les libertés fondamentales de l'individu.

Extrait du livre de Felix Treguer


En France, la reconnaissance faciale a commencé à être employée à partir de 2011. Il s'agit de comparaison faciale entre des images de la police et des photos d'identité issues des affaires policières (condamnés, suspects, témoins), mais aussi de documents d'état civil. L'ensemble a été regroupé dans le fichier TAJ de la police : en 2019 20 millions de fiches individuelles et 8 millions de photos faciales pour une utilisation massive (plus de 1600 fois/jour). La technologie algorithmique de reconnaissance a permis d'automatiser et d'accélérer la montée en charge de la constitution et de l'utilisation de ce fichier.

En mai 2021, le gouvernement soumet au Parlement la loi dite "Sécurité globale". Elle élargit et normalise l'usage des moyens de surveillance de la population :

  • Les services pouvant visionner les images de vidéoprotection sont élargis. Les polices municipales peuvent visionner les images tirées des caméras aux abords des commerces. Afin de "sécuriser les transports publics", certains agents de la RATP et de la SNCF ont accès à la vidéoprotection de la voie publique sous la responsabilité de l’État.
  • L’usage par les policiers et gendarmes des caméras piétons est généralisé. Lorsque la sécurité des agents est engagée, les images peuvent être transmises en direct au poste de commandement ainsi qu'aux agents impliqués dans la conduite et dans l'exécution de l'intervention. La possibilité d'utiliser ces images dans les médias pour l'information du public a été supprimée par le législateur afin de ne pas risquer d'alimenter une "guerre des images".
  • Le régime juridique de l’usage des drones par les forces de l’ordre, pratiqué jusqu'alors en l’absence de cadre clair, est défini : les cas de recours aux drones sont précisés et des garanties posées. Sur amendement du gouvernement, à titre expérimental pour cinq ans, les policiers municipaux peuvent également recourir à des drones pour "assurer l’exécution des arrêtés de police du maire".
Cependant, une partie de cet article a été censuré par les juges constitutionnels qui ont jugé que "le législateur n'a pas assuré une conciliation équilibrée entre les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions et le droit au respect de la vie privée".


Mais comment sont inscrites les photos dans le fichier TAJ, et sur quels critères une personne y est inscrite ? Les images prises par les caméras sont-elles conservées ? Aucun débat public sur ce point et aucun contrôle d'une autorité indépendante : un simple décret en 2012 est venu entériner la pratique policière de la reconnaissance faciale. La surveillance algorithmique des images de caméras (VSA) étant désormais possible, il semble que l'on prenne le même chemin avec le contrôle des mouvements et circulation des individus dans l'espace public. Un décret l'avait autorisé de façon provisoire pour les Jeux Olympiques de Paris (été 2024) et jusqu'en 2025, avec une définition de 6 ou 7 cas d'usage (du port d'armes à la station immobile prolongée dans l'espace publique). Mais récemment, le 1er ministre Michel Barnier vient d'indiquer qu'il avait l'intention de répondre "à une demande forte de sécurité, comme les dernières élections l'ont montré" (sic) par la généralisation de cette méthode qui permet aussi la reconnaissance faciale en direct. Par 226 voix contre 117, en juin 2023 le Sénat avait adopté une proposition de loi destinée à expérimenter pour une durée de trois ans le recours à la reconnaissance faciale "augmentée" dans l’espace publique.

 




Potentiellement, d'ici quelques mois, le temps que les algorithmes progressent et que le cadre légal soit créé, ce sera une surveillance totale de notre espace public qui sera possible. Par l'effet des différentes expérimentations à titre provisoire, des autorisations partielles, et par l'effet de pratiques non réglementées qu'on a imposées par le fait, ces dispositifs se sont disséminés dans la société. Loi après loi, les exceptions sont ôtées et ce qui était au départ inacceptable le devient : les lignes rouges se déplacent, elles finissent inévitablement par sauter. C'est ce qu'on appelle l'effet-cliquet.

(sur le site d'Amnesty. JO 2024 : Pourquoi la vidéosurveillance algorithmique pose problème )

En complément, écouter le débat sur le Media avec sénateur EELV Thomas Dossus et Katia Roux, chargée de plaidoyer pour Amnesty France, émission enregistrée à l'occasion du vote du Sénat évoqué plus haut : https://www.youtube.com/watch?v=ZBsxod0nvP8


Quels garde-fous ?
  • Les autorités indépendantes : 1978 : création de la CNIL (Commission Nationale Informatique et Libertés)
Or, en 2004 une réforme du droit des données fait perdre à la CNIL sa capacité de blocage (son pouvoir d'avis conforme). L'avis de la CNIL n'est plus que consultatif. D'une manière globale, son rôle a évolué et ses membres le conçoivent davantage comme une agence d' accompagnement du marché de l'innovation dont il s'agirait plutôt de s'assurer de fixer des normes de conformité et de bonnes pratiques (logique de la compliance).


Le droit ?
Le Conseil d'Etat et le Conseil constitutionnel sont les deux plus hautes juridictions de la Justice française et elles doivent s'assurer que les lois (CC) et les actes administratifs (CE) n'outrepassent pas l'état de droit : elles ont un rôle de protection des libertés et des droits des citoyens. Mais les limites que le Conseil Constitutionnel met aux innovations législatives sécuritaires paraissent bien timorées (voir plus haut). Le Conseil d'Etat, plusieurs fois saisi par des référés-liberté a bien sanctionné certaines pratiques abusives de la police et gendarmerie française (per ex. les décisions contre l'usage des drones), mais il statue dans le cadre des lois existantes, qui sont elles de plus en plus nombreuses à permettre la surveillance généralisée. Comme se le demande Vanessa Codaccioni, quel éventuel futur gouvernement remettrait radicalement en cause la logique sécuritaire actuelle et abolirait les lois existantes ? Cela ne s'est quasiment jamais vu dans l'histoire récente de la France.


Le droit européen, de son côté, interdit par principe la cybersurveillance et la conservation de données personnelles (ce qu'est en partie le fichier TAJ). Celle-ci n’est autorisée qu’à titre exceptionnel, lorsqu’elle est nécessaire et proportionnée pour préserver certains intérêts supérieurs. Mais les lois françaises passées sont conformes européens puisque
  • les mesures de surveillance généralisée en cas de menace grave pour la sécurité nationale, les mesures de surveillance ciblée pour “la lutte contre la criminalité grave et de la prévention des menaces graves contre la sécurité publique”, dès lors que la durée de conservation des données est limitée à ce qui est strictement nécessaire et que les personnes concernées “disposent de garanties effectives contre les risques d’abus” ;
  • Et l’analyse automatisée et le recueil des données en temps réel est conforme au droit européen dès lors que “l’État membre se trouve confronté à une menace grave pour la sécurité nationale, qu’il est limité aux personnes à l’égard desquelles il existe une raison valable de soupçonner qu’elles sont impliquées d’une manière ou d’une autre dans des activités de terrorisme”, et qu’il existe un recours juridictionnel ou administratif effectif.


UPDATE fin Janvier 2025
Désormais, les maques sont tombés. Depuis l'investiture de Donald Trump aux Etats-Unis, avec le salut nazi d'Elon Musk et les décrets en rafale pris par Trump, nul ne peut ignorer que le projet politique porté par la Tech californienne et la finance spéculative (nouvel avatar du capitalisme) est raciste, réactionnaire et violent. C'est pourquoi les instruments de surveillance de masse dont les gouvernements (tous plus ou moins susceptibles de basculer en Occident) se sont dotés depuis quelques années sont particulièrement dangereux.

J'ajoute donc le transcript d'un passage de Sylvie Laurent dans cette émission de Au Poste-Mediapart que je recommande. Et je recommande également la lecture des ouvrages de Sylvie Laurent. 


" E.M. préside [...] à quelque chose qui est le fait d'orchestrer et de permettre un processus de violence et d'exclusion sociale dont il faut s'attendre à ce qu'il prenne des proportions tout à fait extraordinaires. Et ça me permet de revenir sur la Tech ; les gens se demandent quel est le projet de la Tech et pourquoi cette espèce de fusion avec l'Etat, avec le régalien [...] ce qu'ils ont en commun et ce qu'ils ont tous compris, c'est que face à la Chine et aux nécessités de financement et la productivité un petit peu ralentie, il fallait investir massivement dans ce qui est l'avenir des sociétés occidentales [...] l'industrie de la surveillance, de l'incarcération, et la gestion des populations jugées en surplus. Et aujourd'hui, l'essentiel des investissements qui sont faits par la Tech, de Anduril, les sociétés d'armement jusqu'à certains programmes de la Nasa, en passant bien sûr par Meta, Oracle bien sûr, ce sont des programmes qui proposent des drones, des caméras de surveillance, des bracelets électroniques ; c'est un projet de collection de données sans précédent qui vise principalement à vendre aux quatre coins du monde un système de biométrie, de surveillance, d'incarcération numérique etc Et donc, ce projet là me semble être incarné dans la photo par E.M. [...] et les rafles ont commencé, à l'heure où nous parlons, dans les grandes villes des Etats-Unis."


Ainsi, comme dans les années 1970 où le retournement économique avait produit la mondialisation généralisée et le neolibéralisme pour l'accompagner, je souscris tout à fait à l'analyse de Sylvie Laurent qui voit dans la recherche de nouveaux gisements de profits une des raisons du basculement dans le neo-fascisme.


UPDATE Mars 2025
technopolice, technojustice, on va toujours plus loin.




lundi 22 juillet 2019

Versailles, miroir du pouvoir royal

s'appuyer sur le site Internet : www.chateauversailles.fr

PPO : Versailles, le "roi soleil" et la société de cour

I- Le château

  • Simple relais de chasse de Louis XIII, Versailles, après de nombreux et luxueux travaux, devient la résidence de Louis XIV en 1682. C'est un immense château de style classique situé à proximité de Paris. C'est là que s'installe la cour.



* En observant le tableau, décrivez le site du château

* En vous aidant du plan ci dessous et des documents et informations données par votre manuel, indiquer les points cardinaux dans les rectangles. Signaler où se « lève »" le soleil et où se « couche » le soleil par rapport au château.


* Dans quelle partie du château sont situés les appartements du roi ? (château neuf ou château vieux = ailes de l’avant cour). Repérer sur le plan la place de la chambre du roi à l’intérieur du château. Sur quel axe se trouve t-elle ? Pourquoi y a t-il deux chambres royales ?
 * Dans quelle partie du château sont situés les bâtiments administratifs ?
* Placer sur les pointillés la cour de marbre, la cour royale, la galerie des glaces, les jardins.


II- Le roi met en scène son pouvoir

1) Des lieux importants


* Quelle est la fonction de la Galerie des glaces ? A quelles activités sert-elle ?


Photo (C) RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Tony Querrec


Décidé au lendemain de la paix de Nimègue (1678) qui mettait fin à la guerre de Hollande, la décoration de la galerie des glaces constitue une vraie révolution dans la représentation du roi. Pour sacraliser ce que l’entourage du roi considère comme une victoire, une séance du conseil secret décide de modifier le projet que Charles Le Brun (le peintre) avait initialement prévu –une série sur le thème d’Apollon et d’Hercule-. Si l’on en croit les auteurs de l’époque, Le Brun réagit avec une rapidité incroyable en réalisant en seulement 2 jours le projet complet de la voûte, véritable ensemble à la gloire du roi. Exaltant les hauts faits du roi lors des guerres précédentes, les peintures illustrent l’histoire officielle du royaume, en représentant Louis XIV sous ses traits véritables, en roi de guerre et de triomphe, terrassant les ennemis par sa seule présence. D’autres peintures reprennent des exemples du bon gouvernement de Louis XIV, en protecteur des arts …

D’après Joël Cornette, Louis XIV et Versailles, TDC n° 850, février 2003.




* En vous appuyant sur les documents ci-dessus , déterminer les différentes fonctions de la galerie des glaces. Justifier à chaque fois par des exemples et un raisonnement précis.




2) L'art au service de la propagande royale
  •  Louis XIV utilise l'art pour renforcer sa gloire et imposer l'idée de sa toute puissance. Comment ?
* Quel motif décoratif retrouve t-on partout à Versailles ? Pourquoi ?
(symbolique du soleil + précision historique : le soleil d'or est depuis le roi Charles VI -XIVe siècle- un des emblèmes personnels du roi de France. Voir Chronique de Charles VII par Jean Chartier, ed de Valet de Vireville, vol 2, p.165)




* Pourquoi Louis XIV a t-il fait placer sa statue face au soleil levant ?
A quel thème sont consacrées les peintures des Grands Appartements du roi (appartements officiels)
 * Expliquer la référence constante au dieu Apollon






Eloge de Jean Chapelain (1595-1674)
« Quel astre flamboyant sur nos provinces erre ?
N’est-ce point Mars…
N’est-ce point Jupiter …
N’est-ce point le Soleil…
Non, l’astre dont l’éclat tient nos yeux éblouis
Est un astre plus grand qui tous les trois embrasse,
C’est le fort, c’est le bon, c’est le sage Louis."

Parodie et critique anonyme de cet éloge

"Quel est ce bel esprit à la perruque antique
Dont l’art ostentateur à nos yeux éblouis,
Dont le remerciement petit, mais extatique
Donne un mauvais sonnet pour trois cents bons louis ?
Est-ce un Tasse nouveau…
Un Virgile françois…
Non, c’est un faux Caton qui s’habille en poète,
Riche au siècle où Malherbe est mort dans la disette,
C’est le froid, c’est le dur, c’est le sec Chapelain"



* (texte 1) Pourquoi peut-on dire que cet auteur veut flatter le roi ?

* Quelles critiques l’anonyme fait-il sur le texte de Chapelain et sur Chapelain lui-même ?


3) Tout un cérémonial


S'appuyer sur le MOOC, accessible à partir du site chateauversailles.fr , la partie 2 : http://www.chateauversailles.fr/decouvrir/ressources/mooc-louis-xiv-versailles (attention, nécessite une incsription) et sur le manuel (Hachette p. 175)
  •  Louis XIV rassemble les nobles autour de lui à la cour. Il les divertit et distribue des pensions. La noblesse perd donc son pouvoir et est sous le contrôle du roi : il la domestique pour éviter qu'elle ne se révolte.
* Recherchez dans une chronologie historique le nom d'une révolte nobiliaire au moment de la Régence de Louis XIV.

 * Combien de personnes vivent à la cour ?

* Quel est l’intérêt pour les nobles de vivre à Versailles ?


* Quel est l’emploi du temps de la journée du roi ? 
Qui assiste au lever du roi ? Quelle est la fonction de la barrière entre le lit et le reste de la pièce ? Pourquoi peut-on dire que le lever du roi est une cérémonie ? Quelle est la signification de cette mise en scène ?

 *Qu’est-ce que l’étiquette ?

* A quoi sert un tel cérémonial ?

« Le sociologue Norbert Elias a montré comment le système de cour perfectionné par Louis XIV a été l’outil de sa politique de domination de la noblesse. Tous savaient que chaque détail d’une cérémonie étaient la marque d’une faveur. Ainsi, lors d’une audience solennelle, les huissiers ouvraient les portes des appartements à un ou deux battants selon le rang de celui qui était reçu. De façon plus quotidienne, les courtisans n’ignoraient pas que le droit au fauteuil, à la chaise à dossier ou au tabouret était strictement codifié. Beaucoup restaient debout des heures durant. Les vêtements, les gestes à observer en toutes circonstances …tous ces détails obéissaient à un code strict : ôter son chapeau, le remettre, se lever, s’asseoir, se mettre à genoux, s’avancer de quelques pas, faire une ou plusieurs révérences…Ce système était fondé sur la manipulation des hommes par le roi."
D’après Joël Cornette, Louis XIV et Versailles, TDC n° 850, février 2003.




III/ Versailles, centre du pouvoir royal

Louis XIV, un monarque absolu


"Toute puissance, toute autorité résident dans la main du Roi [...] Tout ce qui se trouve dans l'étendue de nos Etats de quelque nature que ce soit nous appartient.[...] Celui qui a donné des rois aux hommes a voulu qu'on les respectât comme ses lieutenants, se réservant à lui seul le droit d'examiner leur conduite. Sa volonté est que quiconque est né sujet obéisse sans discernement. [...] J'étais résolu à ne point prendre de premier ministre et à ne pas laisser faire par aucun autre la fonction de roi pendant que je n'en aurais que le titre. Mais au contraire, je voulus partager l'exécution de mes ordres entre plusieurs personnes afin d'en réunir toute l'autorité en la mienne seule."
Extrait du Mémoire pour l'instruction du dauphin, mss Bibliothèque nationale

Compréhension du texte :
  1. Expliquez le mot "dauphin" et l'expression "sans discernement"
  2. Relevez les mots ou expressions caractérisant le pouvoir du roi
  3. Qui est "celui a donné des rois aux hommes" ?
  4. Schématisez de façon simple la relation décrite par le texte entre Dieu, le roi, le peuple.

Analyse du texte :
  1. Quand et dans quel contexte Louis XIV a t-il résolu de gouverner seul ? Etait-ce courant dans l'histoire des rois de France (voir Henri IV et Louis XIII, ses prédécesseurs
  2. A l'aide du manuel, établissez qui sont les exécutants des décisions royales, au niveau du gouvernement comme au niveau des "provinces"
  3. A l'aide du manuel, listez les limites du pouvoir royal
Bilan
Proposez une définition de Monarchie absolue de droit divin




dimanche 21 juillet 2019

Deux extraits de lettres de Louis XI sur les révoltes urbaines


LETTRE 67,   Mars 1463 "au duc de Nemours"

"…vous connaîtrez clairement qu'il y a trahison conspirée en la ville de Perpignan et pour ce, incontinent ces lettres vues, si vous n'y êtes, allez-y hâtivement. Et si la matière est disposée que vous en puissiez trouver la vérité et atteindre cette trahison, comme ainsi ferez, si vous voulez, gardez que incontinent vous fassiez prendre ceux que l'on soupçonnera, et si vous trouvez que ainsi soit, faites-en faire justice du plus grand jusques au plus petit. Et si vous ne pouvez trouver nuls langages ni nulle apparence -combien qu'il est bien fort que la chose se puisse celer, car on saura bien ceux qui la peuvent avoir menée, et aussi il faut qu'ils en aient parlé à plusieurs et, s'ils n'en ont parlé, si faut-il considérer ceux qui ont le peuple si à commandement qu'ils le pourraient faire émouvoir sans leur en parler- vous pourrez aviser ceux de qui vous aurez suspection, et incontinent les m'envoyer sous ombre de se venir excuser d'aucunes choses dont on les aura accusés. …."

Source : l'édition de certaines des lettres de Louis XI par Henri Dubois, Livre de poche, 1996


Lettre à Imbert de Batarnay et à Yvon du Fou (1474) sur la répression de l'émeute de Bourges qui s'est dressé contre les dépenses des fortifications de la ville (source Louis XI, de Gaussin)

"Comme vous le savez ceux qui se sont rebellés ne doivent jouir de l'impunité…en ce qui concerne vos prisonniers, je vous prie de les punir si rigoureusement que cela serve d'exemple aux autres et de n'épargner personne…j'entends que ceux qui auront mérité d'être exécuté soient exposés sur leurs portes…de plus tâchez de savoir q'il n'y a pas de gros bonnets qui aient pris part à la révolte , car les pauvres n'ont pu le faire d'eux-mêmes"
(Lettres, V, DCCXCVII )





Des révoltes fréquentes

 A Angers, les "pauvres gens de métiers", armés de "gros tricots et autres bâtons" pillèrent durant 3 jours les maisons des officiers, des bourgeois et des prêtres. Les autorités furent débordées. La répression contre les pillards fut rude. Cf Guillaume Oudin " Bien peu de temps après, plusieurs furent punis pour leur forfait, car les uns furent noyés, les autres décapités, les bras et jambes coupés, et les corps mis au gibet". Comme à Alençon, les habitants tinrent "plusieurs et diverses assemblées sans aucune autorité de justice, dans lesquelles ils ont conclu de ne pas obéir aux mandements des commissaires".
La miquemaque de Reims se place un mois environ après le sacre de Louis XI, qui avait donné aux gens quelque espérances quant à la levée des taxes. Assi lorsque les officiers des finances "firent mettre à l'encan les gabelles et autres impositions habituelles pour les adjuger (aux) conditions les plus avantageuses", l'émeute éclata. On accusa les officier d'avoir fabriqué un édit, "poussé par leur esprit de lucre et par leur audace". Les registres furent brûlés, leurs maisons pillées, ils durent prendre la fuite. Les troupes royales sont envoyées et les bourgeois de Reims arrêtèrent "quelques personnes du commun" qui passaient pour les auteurs de la sédition. La répression fut sans aucune commune mesure avec le mouvement : les 9 "principaux coupables" dont 3 femmes furent exécutés ; le cadavre de l'un d'eux, réputé leader du mouvement, fut écartelé ; 25 autres personnes furent bannies du royaume, 13 de Reims parmi lesquelles certaines furent battues et fustigées, "oreilles et poings coupés". 57 autres qui avaient fait amende honorable eurent les poings coupés ou furent frappées d'amendes…En tout,, plus de 180 personnes. Les notables de Reims firent intervenir le duc de Bourgogne qui implora la grâce du roi. => Chastellain "
A Aurillac, "cité grandement peuplée et grandement marchande" où deux partis s'opposaient dans les années 1472-1473 : celui du roi et celui d'Armagnac, avec Jacques, vicomte de Carlat et de Murat et Jean, son frère, évêque de Castres et abbé d'Aurillac, à ce titre seigneur de la ville. Entre les uns et les autres, depuis le Bien Public, ce n'était qu'embuscade, "détrousse de marchands".cf les propos du marchand du parti Armagnac, Bernard Salesses, qui à l'époque de Péronne (1468) parcourait la ville en criant aux royalistes : "allez le querir votre roi ! Il est mort ou prisonnier, au diable soit-il, mort ou vif car tant qu'il vivra il n'y aura  ni paix  ni bien dans ce royaume" Et les Laber, bouchers de leur état renchérissaient, affirmant que sans changement de roi, "le peuple serait opprimé et mangé" (P286) C'est l'époque où les habitants d'Aurillac refusaient d'envoyer leurs contingents de francs archers à Lectoure et en Roussillon (1473). LXI en eut assez et donnait comme instruction à on commissaire, Aubert le Viste "vous n'y saurez frapper mauvais coup, car ils m'ont toujours été traitres ou malveillants, endommagez-les moi bien'. Mais seule la capitulation de Nemours à Carlat, le 9 mars 1476 devait faire entrer Aurillac dans l'obéissance.
L'émeute de Bourges (ville natale de Louis XI) : émeute de 1474 à l'occasion d'un nouveau "subside des  fossés de la ville pour faire face aux dépenses de fortification de la ville ordonnée par le roi => "foulons, vignerons , boulangers ay autres gens de métier et menu peuple". Durant plusieurs jours, la ville appartint aux émeutiers qui tuèrent ou blessèrent les gens du roi. Puis, le notables se concertèrent dans la cathédrale, les uns partisans de la conciliation, "furent de la mauvaise opinion" selon l'expression du roi, les autres réclamèrent une action énergique "de façon à que force demeure au roi et que justice soit obéie", et l'emportèrent.
Troubles du Puy : 1477. Féodaux, bourgeois et peuple s'affrontaient, les premiers s'efforçant de détourner les impôts à leur profit particulier, à l'exemple du vicomte Armand XIII de Polignac qui se fit rigoureusement rappeler à l'ordre par LXI en 1465. L'accaparement des fonctions consulaires par un groupe restreint de familles riches aboutissait à faire porter sur les autres habitants l'essentiel des charges fiscales. De temps à autre, pour arrêter la montée des mécontentements, les hommes en place faisaient quelques concessions comme, en 1469, de permettre à de nouvelles familles riches d'accéder au pouvoir et, en 1473, les délégués des corps de métiers reçurent le droit de participer aux élections consulaires mais la liste des candidats devait être dressée par "7 personnes distinguées par leur vertu" => les plus riches en réalité. Le commun mettait en cause l'honnêteté des dirigeants, les accusait de prélever plus que nécessaire
Idem à Agen été 1481, peuple contre consuls. Les mécontents en appelèrent au Parlement de Bordeaux qui leur accorda un syndic. Les consuls se tournèrent vers le roi qui commit un conseiller concurrent du Parlement pour convoquer " la principale et plus saine partie " des Agennais : les notables acceptaient de ne lâcher que 3 posites consulaires et les "gens vivant noblement" eurent le dernier mot.

Agitation aussi rurale cf paysans de la région de Casteljaloux, contre les collecteurs d'impôts,  réunis dans un bois jurèrent de ne rien payer, de se défendre envers et contre tous" . Le commissaire du roi arrêta quelques séditieux, le tocsin sonna et l'insurrection locale éclata, les manant s'étant "armés et embastonnés".