Identifiez dans le
texte les caractéristiques de la pensée anarchiste.
(Fiche d'activité 1ere)
Lisez
la définition sous le texte. Elle a été construite à partir du texte de
Bakounine et comporte plusieurs idées différentes identifiées par un code
couleur. Retrouvez et soulignez dans le texte avec le même code couleur les
passages qui ont permis de déduire les idées de la définition.
« La liberté de l’homme consiste uniquement en
ceci qu’il obéit aux lois naturelles parce qu’il les a reconnues comme telles,
et non parce qu’elles lui ont été extérieurement imposées par une volonté
étrangère (à lui-même).
Supposez une académie de savants, composée des
représentants les plus illustres de la science1 ; supposez que
cette académie soit chargée de la législation, de l’organisation de la société
et que, ne s’inspirant que de l’amour le
plus pur de la Vérité, elle ne lui dicte que des lois absolument conformes aux
plus récentes découvertes de la science. Et bien, je prétends que cette
législation et cette organisation seront une monstruosité. (…) C’est qu’une
académie scientifique revêtue de cette souveraineté pour ainsi dire absolue, et
fût-elle composée des hommes les plus illustres, finirait infailliblement et
bientôt, par se corrompre elle-même, et moralement et intellectuellement. (…)
Le savant officiel patenté (…) perd sa spontanéité, sa hardiesse
révolutionnaire et cette énergie incommode et sauvage qui caractérise la nature
des plus grands génies, appelés toujours à détruire les mondes caducs et à
jeter les fondements des mondes nouveaux. (…) C’est le propre du privilège et
de toute position privilégiée que de tuer l’esprit et le cœur des hommes.
L’homme privilégié soit politiquement soit économiquement est un homme intellectuellement
et moralement dépravé. Voilà une loi sociale qui n’admet aucune exception, et
qui s’applique aussi bien à des nations toutes entières qu’aux classes, aux
organisations et aux individus. C’est la loi de l’égalité, condition suprême de
la liberté et de l’humanité.
(…) L’affaire de tous les pouvoirs établis est de
s’éterniser en rendant la société confiée à ses soins toujours plus stupide et
par conséquent plus nécessiteuse de son gouvernement et de sa direction. Mais
ce qui est vrai pour les académies scientifiques l’est également pour les
assemblées constituantes et législatives, lors même qu’elles sont issues du
suffrage universel. (Celui-ci) n’empêche pas qu’il ne se forme en quelques
années un corps de politiciens, privilégiés de fait, non de droit, qui, en se
vouant exclusivement à la direction des affaires publiques d’un pays, finissent
par former une sorte d’aristocratie ou d’oligarchie politique.
(…) S’ensuit-il que je repousse toute autorité ?
Loin de moi cette pensée. Lorsqu’il s’agit de bottes, j’en réfère à l’autorité
du cordonnier2 ; s’il s’agit d’une maison, d’un canal ou d’un
chemin de fer, je consulte celle de l’architecte ou de l’ingénieur. (…) Je les
écoute librement et avec tout le respect que méritent leur intelligence, leur
caractère et leur savoir, en réservant toutefois mon droit incontestable de
critique et de contrôle. (…) Je m’incline devant l’autorité des hommes spéciaux
parce qu’elle m’est imposée par ma propre raison. J’ai conscience de ne pouvoir
embrasser dans tous ses détails et ses développements qu’une très petite partie
de la science humaine.(…) D’où résulte, pour la science comme pour l’industrie,
la nécessité de la division et de l’association du travail. Je reçois et je
donne, telle est la vie humaine. Chacun est autorité dirigeante et chacun est
dirigé à son tour. D’où il s’ensuit qu’il n’y a point d’autorité fixe et
constante, mais un échange continu d’autorité et de subordination mutuelles,
passagères et surtout volontaires.
(…) Voilà dans quel sens nous sommes réellement des
anarchistes. »
Extrait de Bakounine, Dieu et l’Etat, 1882 (édition posthume)
1 :
C’est le projet du philosophe grec antique, Platon, quand il propose une
république de philosophes. Mais c’est aussi comme cela que Bakounine analyse le
projet d’Etat communiste proposé par les Marxistes.
2 :
C’est ce qu’on appelle une autorité de compétence.
L’anarchisme est une idéologie
politique qui s’est construite à la fin du 19e siècle à partir de la
volonté de concilier l’exercice absolu de la liberté
des individus avec le respect absolu de l’égalité entre les individus. Il s’ensuit que la société anarchiste devra refuser tout
privilège et qu’elle
ne reconnaitra aucun pouvoir officiel. Mais
la société anarchiste n’est pas une société sans règle ni autorité. C’est une société dans laquelle
les individus acceptent au cas par cas une autorité de compétence. Ceci
nécessite un système politique basé sur la démocratie directe.
A la fin du XIXe siècle, la IIIe République intente une série de procès contre les groupes anarchistes. Le premier de ces procès se déroule devant le tribunal correctionnel de Lyon en 1883 au nom de la défense de la République contre les "ennemis de l'Etat". Il s'agit donc de définir leur doctrine. Voici la réponse que les accusés font au tribunal :
"Les anarchistes, Messieurs, sont des citoyens qui, dans un siècle où l'on prêche partout la liberté des opinions, ont cru de leur devoir de se recommander de la liberté illimitée [...] Nous voulons la liberté et nous croyons son existence incompatible avec l'existence d'un pouvoir quelconque, quelles que soient son origine et sa forme. [...] Les anarchistes se proposent donc d'apprendre au peuple à se passer du gouvernement comme il commence à apprendre à se passer de Dieu. Il apprendra également à se passer de propriétaires. [...] Nous voulons en un mot l'égalité : l'égalité de fait comme corollaire ou plutôt comme condition primordiale de la liberté."
Extrait tiré de Raphaël Kempf, Ennemis d'Etat : les lois scélérates des anarchistes aux terroristes, La fabrique, 2019, p.11
Histoire du mouvement anarchiste
Documentaire en 2 parties de Tancrède Ramonet
Lien vers des posts complémentaires :
La révolution russe (pour lien avec anarchisme voir ep 1 de Ni Dieu, ni maître autour de 20 min)