Blog de diffusion de ressources pour l'enseignement en lycée de l'Histoire et de la Géographie, de la HGGSP, mais aussi des comptes-rendus de lectures en lien avec les cours. Parce que je suis par ailleurs doctorante en Histoire médiévale italienne, le Moyen Age tient une place particulière dans ce blog. Vous trouverez rarement les corrections des fiches d'activité que je propose sauf quand elles servent de support à une séance méthodologique.
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lundi 1 juin 2020
L'économie de l'Europe à la Renaissance
Une petite carte faite par mes soins, avec mes faibles moyens, mais j'en ai besoin pour le cours sur l'ouverture atlantique et je n'ai pas trouvé l'équivalent mieux fait.
dimanche 12 avril 2020
"Les raisins de la colère" en classe de Terminale
Dans le cadre du 1er thème d'Histoire du programme de Terminale (chap 1 : l'impact de la crise de 1929) et pour compléter/approfondir/réactualiser le thème de la question sociale et du mouvement ouvrier au 19e siècle vu en classe de 1ere, je propose d'utiliser des extraits du film de John Ford, les Raisins de la colère d'après le chef d'oeuvre de Steinbeck. Comptez deux heures.
En version courte, il faut insister sur le fait que le livre comme le film sont contemporains des années de crise (film de Ford date de 1940) et que Ford fut considéré comme un cinéaste du New Deal.
Analyse de plusieurs séquences du film
1° Une crise économique absurde aggravant la violence sociale.
Extrait scène 5 dans le découpage du DVD (de 12 min à 18 min : le flash back du voisin)
Que se passe-t-il ? Quelle est la condition sociale de cette famille paysanne ?
En quoi cette scène est une critique du système ?
apport extérieur (du prof) pour compléter les relevés d''analyse de la scène : explication du système du fermage + Dust Bowl
synthèse rédigée à distribuer aux élèves
On complètera avec l'extrait du livre ci dessous
Les objectifs sont multiples :
- fournir aux élèves des images concrètes, passer par les ressentis pour leur faire comprendre l'importance du traumatisme causé par les conséquences sociales de la plus grave crise économique du XXe siècle,
- réactualiser avec eux les fondements de l'analyse marxiste de l'économie capitaliste,
- poser, si nécessaire, les bases de l'analyse filmique,
- leur faire comprendre que tout peut être source pour l'historien.
On commencera par présenter l'oeuvre de Steinbeck et le film de J. Ford. S'appuyer éventuellement pour cette présentation sur les supports proposés par le dossier 187 de "Collège au cinéma".
En version courte, il faut insister sur le fait que le livre comme le film sont contemporains des années de crise (film de Ford date de 1940) et que Ford fut considéré comme un cinéaste du New Deal.
Puis rapide présentation de l'argument : Après avoir purgé une peine de prison, Tom Joad (Henri Fonda) revient dans la ferme familiale alors que la crise de 29 ruine tout le pays et qu'une grave sécheresse achève d'expulser les paysans de "leurs" terres. Avec les siens, il décide de partir en Californie dans l'espoir de trouver du travail comme ouvriers agricoles.
Analyse de plusieurs séquences du film
1° Une crise économique absurde aggravant la violence sociale.
Extrait scène 5 dans le découpage du DVD (de 12 min à 18 min : le flash back du voisin)
Que se passe-t-il ? Quelle est la condition sociale de cette famille paysanne ?
En quoi cette scène est une critique du système ?
=> assez facilement (et le prof structurera) les élèves en disent que c'est une critique du droit de propriété (propriété d'usage "les tombes des ancêtres" contre "papiers avec des écritures"), que la mécanisation dévalorise le travail de l'homme, que la toute puissance de l'argent/manque d'argent déshumanise les rapports humains + la question de la responsabilité individuelle dans ce système économique (qui est responsable ?)
Bilan : c'est la fin d'un monde
Dernière question sur les procédés proprement visuels, filmiques qui indiquent et renforcent cette idée de fin du monde (jeu sur les ombres, bande son...)
apport extérieur (du prof) pour compléter les relevés d''analyse de la scène : explication du système du fermage + Dust Bowl
synthèse rédigée à distribuer aux élèves
On complètera avec l'extrait du livre ci dessous
Doc
: L’absurdité de la crise
« Des hommes capables
de réussir des greffes, d’améliorer les produits, sont incapables de trouver le
moyen pour que les affamés puissent en manger (…)
Le travail des hommes et
de la nature doit être détruit pour que se maintiennent les cours, et c’est là
une abomination qui dépasse toutes les autres. Des chargements d’oranges jetés
n’importe où. Les gens viennent de loin pour en prendre, mais cela ne se peut
pas. Pourquoi achèteraient-ils des oranges à 20 cents la douzaine, s’il leur
suffit de prendre leur voiture et d’aller ramasser pour rien ? Alors les
hommes armés de lances d’arrosage aspergent de pétrole les tas d’oranges, et
ces hommes sont furieux d’avoir à commettre ce crime et leur colère se retourne
contre les gens venus ramasser les oranges. Un million d’affamés ont besoin de
fruits, et on arrose de pétrole les montagnes dorées. Et l’odeur de pourriture
envahit toute la vallée (…)
Il y a là un crime si
monstrueux que cela dépasse l’entendement. Les enfants atteints de pellagre
doivent mourir –de sous nutrition- parce que chaque orange doit rapporter un
bénéfice. »
John Steinbeck, Les
raisins de la colère, 1939, 1947 pour l'édition et la traduction française.
- Présenter
le document et expliquer le qualificatif "roman social".
- Relever,
nommer et expliquer les aspects économiques de la crise
- Relever,
nommer et expliquer les aspects sociaux de la crise
- Justifier
le titre en reformulant l’idée principale du texte.
- Montrer
que la crise et le système économique en général délite les rapports
sociaux.
2° Libéralisme versus socialisme : face à la crise des choix moraux et des choix de société
Plusieurs scènes qui se répondent et se complètent :
Extrait scène de l'arrivée dans le camps Hooverville (scène 13 à 1H04 jusqu'à la fusillade)
Identifiez les habitants de ce camps (qui sont-ils ? pourquoi sont-ils là ? comment survivent-ils ?)
Pourquoi le début de la scène n'a aucun dialogue ? Quel est l'effet recherché ?
Qu'auriez-vous fait à la place de Ma Joad ? (scène du repas)
Comment est construite (image et son) l'opposition habitants du camps/sheriff ?
Pourquoi l'homme qui proteste est qualifié d'agitateur ?
Extrait 3 l'arrivée au Ranch jusqu'au dialogue Casey/Tom Joad (scènes 15 et 16 : de 1H16 à 1H26)
En général, les élèves ne comprennent pas ce qu'il se passe devant le Ranch (lock-out) car ils ne font pas le lien entre la fin de la séquence et son début. Ne pas hésiter à leur apporter cet élément de réponse
Quelles sont les conditions de travail au Ranch ? Pourquoi peut-on affirmer que les ouvriers agricoles se font exploiter ?
=>Au prof de faire le lien avec les explications économistes et notamment marxistes : salaire/temps de travail ; appropriation de la valeur ajoutée / salaire versé ne permet que de reconstituer sa force de travail / prolétariat
Quand Tom Joad retrouve Casey, on comprend que le Ranch recrute car les ouvriers précédents se sont mis en grève. Quelle est la conséquence directe de cette grève sur les salaires ? Pourquoi ?
=>Fonctionnement du marché du travail, les prolétaires mis en concurrence. Prolonger sur les conditions de succès de ce mouvement et discuter autour de la réponse de Tom Joad ("tout ce qu'ils voient, c'est 5$ aujourd'hui")
3° L'Etat social ou la révolte ?
Extrait 4 : L'arrivée au camps fédéral (scène 18 )
5 minutes pour opposer ce camps et celui vu précédemment. Quel est le message ?
Extrait 5 : la scène finale
Expliquer aux élèves pourquoi Tom Joad doit partir.
Les deux fins / En quoi la 2e fin imposée par le studio rend le ton plus optimiste, mais désamorce la portée révolutionnaire de la première fin ?
Conclure sur les récompenses obtenues par le livre comme le film et ouvrir sur le titre de Bruce Springsteen, the ghost of Tom Joad, qui témoigne de l'actualité des thèmes abordés par le film.
vendredi 10 avril 2020
Un exemple d'agriculture durable : cacao en Cote d'Ivoire (video + questionnaire)
Petite activité vidéo pour les élèves de seconde sur le commerce équitable
L'exemple est la culture du cacao : la vidéo est disponible ici
Le questionnaire est le suivant :
La correction :
1)
Présentez le
marché du commerce équitable ? (type de produits, taille du marché,
évolution du marché, pays leaders)
9)
Qui
travaille sur les petites exploitations familiales ?
L'exemple est la culture du cacao : la vidéo est disponible ici
Le questionnaire est le suivant :
Le commerce équitable (« fairtrade » en anglais), un outil
du développement durable
Analyse de la video : cacao équitable en Côte d’Ivoire
1)
Présentez le
marché du commerce équitable ? (type de produits, taille du marché, évolution
du marché, pays leaders)
2)
En Côte d’Ivoire,
on cultive principalement les fèves de cacao pour produire le chocolat. Dans
quel type de pays se déroule la transformation des fèves en chocolat ?
Quel type d’entreprise la réalise ? Un ivoirien trouve t-il facilement du
chocolat ? Pourquoi ?
3)
Pourquoi ne
trouve-t-on des cacaoyers que dans les régions tropicales ?
4)
Qu’est-ce qu’une
plantation agricole (recherchez la définition dans un dictionnaire) ?
Pourquoi le système de production des plantations n’est-il pas adapté à la
production des fèves de cacao ?
5)
Pourquoi les
petits producteurs de fèves de cacao se détournent-ils de cette activité ?
Avec quelles conséquences ?
6)
Combien d’étapes
(et de temps) faut-il pour produire cette matière première ?
7)
Quel est l’importance
de la culture du cacao pour la Côte d’Ivoire ?
8)
Quels sont les
avantages de produire du cacao pour une coopérative du commerce équitable
plutôt que de vendre directement sa production à un grossiste d’Abidjan ?
9)
Qui travaille sur
les petites exploitations familiales ?
10)
Proposez une
définition de « commerce équitable »
BILAN ORGANISE
Expliquez pourquoi et comment la production de cacao en système de
commerce équitable permet d’appliquer chacun des trois piliers du développement
durable. Rédigez une petite introduction, un développement organisé en 3
paragraphes et une petite conclusion.
Correction : Le commerce équitable (« fairtrade » en anglais), un outil du développement
durable
Un marché qui augmente.
Plus de 30 000 produits référencés « commerce équitable », la plupart
du temps vendus en supermarché. La plupart de ces produits sont des produits
agricoles. Les principaux marchés se trouvent au RU, en All, en France et en
Suisse.
2)
En Côte
d’Ivoire, on cultive principalement les fèves de cacao pour produire le
chocolat. Dans quel type de pays se déroule la transformation des fèves en
chocolat ? Quel type d’entreprise la réalise ? Un ivoirien trouve
t-il facilement du chocolat ? Pourquoi ?
Le cacao est
commercialisé par quelques grandes entreprises exportatrices car les principaux
marchés sont en Occident (par ex, 11 kg /habitant et par an en Allemagne). Le
cacao est produit localement et subit une première transformation (pâte et
beurre de cacao), mais la fabrication du chocolat ne se fait pas sur place.
Elle se fait en usine en Europe ou dans d'autres pays du « Nord ».
C'est ce qui explique qu'il est difficile de trouver du chocolat en Côte
d'Ivoire, pourtant premier pays producteur de fèves de cacao.
3)
Pourquoi
ne trouve-t-on des cacaoyers que dans les régions tropicales ?
Il faut des températures
chaudes et constantes toute l'année et des pluies bien réparties.
4)
Qu’est-ce
qu’une plantation agricole (recherchez la définition dans un
dictionnaire) ? Pourquoi le système de production des plantations n’est-il
pas adapté à la production des fèves de cacao ?
D'ordinaire, les
produits tropicaux sont cultivés dans de grandes exploitations agricoles qui
pratiquent la monoculture qu'on appelle des plantations. Le système des
plantations a été introduit par les Français et les Britanniques dans leurs
colonies au 19e siècle. Aujourd'hui, le cacao est cultivé à 90 % par de petits
producteurs. Le cacaoyer nécessite des soins constants toute l'année sinon,
l'arbre tombe malade. Ces soins nécessitent l'oeil humain et aucune machine
n'est capable de le remplacer. La production n'est donc pas très bonne sur une
plantation. Pour une productivité maximale, il faut que le cacaoyer soit sur un
terrain où d'autres arbres le protège des rayons du soleil, des caféiers et des
palmiers.
5)
Pourquoi
les petits producteurs de fèves de cacao se détournent-ils de cette
activité ? Avec quelles conséquences ?
La production de fèves
de cacao pour les petits agriculteurs ne permet pas de gagner suffisamment pour
vivre convenablement. Dans le village pris en exemple dans la vidéo, un
habitant sur deux vit avec moins de 20€ par mois. Le travail du cacao est dur,
dangereux et n'offre pas de répit. De plus, les prix sont faibles et fluctuent
sans arrêt.En 1980, une T de fèves rapportait 5000$. En 2000, le prix avait
chuté à 1200$, puis a remonté jusqu'à 3000 en 2014-2015. C'est la conséquence
de la spéculation internationale. Beaucoup , surtout les jeunes, arrêtent donc
d'entretenir les terres et partent à la ville (exode rural).
6)
Combien
d’étapes (et de temps) faut-il pour produire cette matière première ?
Cueillette qui dure
plusieurs mois car les fruits ne mûrissent pas au même rythme. Puis il y a le
cabossage = les fèves sont détachées des cabosses. Puis elles sont mises à
fermenter à la chaleur pendant plusieurs jours. Pendant cette étape, la chair
se détache des fèves en libérant leur jus. La qualité de la fermentation donne
la qualité du chocolat. Les fèves sont ensuite séchées au soleil, puis triées.
7)
Quelle est l’importance de la culture du cacao pour
la Côte d’Ivoire ?
Pour ce pays, c''est le
2e produit d'exportation après le pétrole. 2/3 des Ivoiriens travaillent dans
l'agriculture et la culture du cacao fait vivre 6 millions de personnes en Côte
d'Ivoire.
8)
Quels sont
les avantages de produire du cacao pour une coopérative du commerce équitable
plutôt que de vendre directement sa production à un grossiste d’Abidjan ?
Dans l'exemple donné par
la vidéo, la dame qui cultive le cacao sur une toute petite exploitation
familiale (3,5 ha) gagne 115€ par mois, ce qui est un bon revenu pour les
agriculteurs de Côte d'Ivoire. Avec ce revenu, elle fait vivre toute sa famille
(6 enfants et 10 petits-enfants). Elle produit pour la coopérative équitable
qui lui donne des formations pour apprendre les bons soins, ainsi que des
jeunes plants pour remplacer les vieux arbres (20 ans environ, c'est la durée
de vie d'une cacaoyer). Gràce à la coopérative, la production a quasiment
triplé de 500 kg à près de 1,5 tonne. Au moment des récoltes, les producteurs
de la coopérative s'entraident. Il n'y a donc pas à engager des travailleurs
saisonniers.
Au lieu de vendre à un grossiste
peu cher, Emma livre ses fèves à la coopérative pour 1/3 de plus que le prix du
marché libre. De plus, elle n'a pas à livrer ses sacs (de presque 70 kg
chaque). La coopérative revend ces fèves à des chocolatiers en Europe.
Les familles. Les
enfants sont au travail de façon occasionnelle (le mercredi, le samedi, les
vacances) quand ils ne sont pas à l'école. En Côte d'Ivoire, l'école est
obligatoire et gratuite. Mais, même si tous les parents préfèrent voir leurs
enfants à l'école, chez les plus pauvres, les enfants doivent travailler au
champs. Les spécialistes estiment que des dizaines de milliers d'enfants sont
dans ce cas. C'est une main d'oeuvre non payée, indispensable.
10)
Proposez une définition
de « commerce équitable »
En supprimant certains intermédiaires et en vendant
plus cher sur les marchés consommateurs grâce au label « commerce
équitable », le commerce équitable permet de faire vivre les petits producteurs. En plus d'être
avantageux économiquement, c'est aussi intéressant socialement car les
conditions de travail sont meilleures. Enfin, le travail des producteurs
équitables est plus respectueux de l'environnement. Les coopératives de
commerce équitable s'engage aussi dans des actions de sensibilisation des
populations sur d'autres sujets que la production agricole : comme le
respect des femmes, la scolarisation ….= soutien aux projets communautaires.
Mais les coopératives sont limitées par un marché de
produits équitables qui n'augmente pas très vite. En Allemagne, le chocolat
équitable représente 0,15% de marché.
BILAN ORGANISE
Expliquez pourquoi et comment la production de cacao en système de
commerce équitable permet d’appliquer chacun des trois piliers du développement
durable. Rédigez une petite introduction, un développement organisé en 3
paragraphes et une petite conclusion.
Organisé sur la base des 3 piliers du
DD = croissance économique, limitation des inégalités sociales, protection de
l'environnement.
Idées principales :
Le commerce
équitable en permettant aux petits producteurs de vivre décemment limite
l'exode rural. L'aide technique permet d'augmenter les productions. Il soutient
donc la croissance économique des zones rurales. De plus, l'augmentation des
revenus permet aux enfants d'aller à l'école , ce qui profitera économiquement
au pays quand ces enfants devenus grands seront une main d'oeuvre mieux formée.
En soutenant des
projets communautaires, il contribue au développement social. Il développe
l'entraide et la vie communautaire. Les coopératives ont un rôle d'éducation
populaire.
Enfin, grâce au
revenus garantis, les petits paysans ne délaissent pas leurs terres, pas plus
qu'ils ne se lancent dans l'aventure des pesticides ou des OGM.
jeudi 9 janvier 2020
Révolution industrielle ex de Krupp
Un géant
industriel : l’usine Krupp à Essen en 1912.
L'exemple le plus grandiose peut-être d'une concentration
embrassant de multiples objets est offert par l'usine Krupp qui, en 1845
occupait 122 ouvriers; en 1887, 45 000 ouvriers et employés; en 1912, 70 000
ouvriers en chiffres ronds. Le charbon est extrait des fosses qui sont la
propriété de l'établissement, et sa consommation annuelle s'élève à plus de 2
millions et demi de tonnes, dont 900 000 pour la seule aciérie d'Essen. Cela
correspond par jour de travail à une arrivée d'environ sept trains de chemins
de fer complets et à pleine charge. Plus de 7 500 machines-outils, 18
laminoirs, 80 presses hydrauliques, 430 générateurs, 550 machines à vapeur et
presque 1 000 grues sont mis en marche à Essen. À la place du marteau-pilon,
autrefois célèbre sous le nom de Fritz, qui possédait un poids de chute de 50
tonnes et contribua, pendant plus de 50 ans, à la renommée de la maison, se
trouvent aujourd'hui de puissantes presses à forger hydrauliques, dont la
monstrueuse puissance de 5000 tonnes peut être à peine conçue par notre
imagination. [...] En fait de machines-outils et de machines de travail,
l'aciérie en renferme 7 200 qui produisent les objets pacifiques les plus
variés, mais aussi le matériel de guerre. Un chemin de fer étreint l'ensemble
de l'usine de ses 150 kilomètres de voies, relie les ateliers séparés et assure
les transports au moyen de 50 locomotives et de 2 400 wagons. [...1 Dans le
laboratoire chimico-physique, où chaque coulée de l'usine est éprouvée dans sa
composition et ses qualités, il est annuellement accompli environ 60 000
essais, dont l'exécution finale nécessite plus de 500 000 opérations séparées.
[...] Les forges Frédéric-Alfred sont ainsi les plus importantes de leur espèce
en Europe. Un port long de plus de 500 mètres forme la voie nécessaire à leurs
arrivages. Les bateaux du Rhin leur amènent les minerais des armateurs de
Rotterdam, aussi bien que ceux des mines de l'Allemagne occidentale. Le long du
quai vertical, de puissants ponts roulants assurent le transport du minerai
vers les places de déchargement et les réservoirs. Des ascenseurs l'élèvent de
là jusqu'aux gueulards des hauts-fourneaux pour y subir la fusion après mélange
avec le coke. Toutes les quatre ou six heures environ a lieu la coulée. Fort
heureusement avec les progrès techniques marche de pair le développement
grandiose des institutions de prévoyance ouvrière. La caisse auxiliaire de
maladie, fondée en 1853, s'est développée par l'adjonction d'une caisse de
retraite pour les veuves et les orphelins qui dispose, aujourd'hui, d'un avoir
de plus de 22 millions de marks. En outre, il existe une société d'assurances
sur la vie, qui facilite aux employés les contrats de cette nature; une
fondation pour les ouvriers et invalides, destinée à compléter les versements
des différentes caisses et possédant un capital supérieur à 7 millions de
marks; une assurance contre les accidents des employés et une caisse d'épargne.
Comme autres institutions prospères en faveur des ouvriers, il faut citer
l'économat d'Essen, le casino des employés, le casino des maîtres ouvriers, une
école ménagère, quatre écoles industrielles, une salle de lecture de plus de
soixante mille volumes, une bibliothèque scientifique professionnelle de
cinquante mille volumes, une société d'éducation, une clinique dentaire, un
hôpital, etc.; enfin, un asile de vieillards, où les ouvriers infirmes ou
retraités peuvent, près de leurs femmes, terminer leurs jours.
Wilhelm
Roscher, Économie industrielle, Paris, Giard et Brière, 1918, p.
185-187. Traduit
de la 8e édition allemande, 1913. La première édition avait été publiée en
1881.
Doc
d’accompagnement : une biographie
de Krupp . Alfred Krupp, 1812-1887,
né à Essen. Il reprend l’entreprise familiale fondée par son père qui ne
comptait alors que 7 personnes. Il mit au point un procédé de production de
l’acier (1847), fabriqua les 1ers canons lourds en acier, dont le tube était
coulé d’une seule pièce et importa de Grande Bretagne, le procédé Bessemer
(1862). Il développa considérablement le site de Essen en concentrant
différentes activités depuis les mines de charbon et de fer, jusqu’aux
chantiers navals et à l’armement.
- Présenter le
document
- En quoi l’usine
Krupp est elle à la fois le reflet de la 1ère révolution
industrielle et de la modernité technologique de la 2e
révolution industrielle ?
- Quels sont les
différents facteurs de développement qui ont permis la naissance de ce
géant industriel ?
- Expliquer en quoi la
politique sociale de Krupp est une avancée, un modèle dans l’ Europe de
l’époque et met à mal l’idéologie marxiste ?
- Concluez en évoquant
l’intérêt et la portée générale d’un tel document
Proposition de correction.
Présenter le document :
Le texte présenté ici est extrait d’un livre intitulé
l’Economie industrielle s’attachant à décrire les aspects de l’industrie et de
son développement. L’auteur W. Roscher, probablement un économiste allemand, a
réédité et mis à jour son travail depuis 1881. L’édition présentée ici est
celle de 1913 qui a été traduite en français en 1918 ce qui est un signe du
succès de son ouvrage. La date de 1913 est importante. En effet, l’Allemagne
qui s’est industrialisée tardivement est, à cette date, la 1ère
puissance industrielle d’Europe devant les Britanniques et les Français. Par
ailleurs la situation internationale est tendue du fait d’une compétition
internationale entre les puissances européennes. L’auteur présente dans cet extrait l’usine
sidérurgique Krupp à Essen en 1912. Il s’attache à montrer la puissance industrielle
de cette usine par une description flatteuse de ses dimensions. Mais il évoque
également les progrès sociaux que cette industrie permet. La fierté nationale
apparaît derrière cet « exemple le plus grandiose » d’industrie.
En quoi l’usine Krupp est elle à la fois le reflet de
la 1ère révolution industrielle et de la modernité technologique de
la 2e révolution industrielle ?
L’entreprise Krupp est d’abord une entreprise
familiale fondée au début du XIXe siècle et elle reste d’une taille modeste encore
en 1845 puisqu’elle emploie « 122 ouvriers ». Cette entreprise
s’appuie sur les ressources de la 1ère révolution industrielle qui
est d’abord le charbon, lequel est « propriété de l’établissement »
(l3) La spécialité de l’entreprise est d’abord la métallurgie, autre secteur de
la 1ère révolution industrielle avec un marteau pilon « d’un
poids de chute de 50 tonnes » mais également des « forges Frederic
Alfred » et des hauts fourneaux. L’entreprise a ainsi pu se développer
avec la demande croissante de charbon et de fer permettant de développer les
machines à vapeur, mises au point par James Watt en 1769 et qui sont au nombre
de 550 dans l’usine (L6), mais également les chemins de fers et les rails qui
se développe dans toute l’Europe depuis l’Angleterre mais également en
Allemagne puisque autour de l’usine Krupp existent « 150 kilomètres de
voies, relaint les ateliers séparés (…) au moyen de 50 locomotives et de 2400
wagons. »
Mais l’entreprise s’est surtout développée à la fin du
XIXe siècle puisqu’en 1887, « 45000 ouvriers et employés
« travaillent à Essen. Alfred Krupp
a mis au point un procédé de production de l’acier et importé le procédé
Bessemer (1862) permettant une production massive d’acier « puisque une
coulée à lieu toutes les quatre ou six heures ».(L21) et que la production
nécessite 900000 tonnes de charbon à elle seule (L4). L’acier, nouveau produit
beaucoup plus résistant bénéficie des recherches en physique-chimie puisque un
laboratoire réalise environ 60000 essais. La chimie est effectivement une
branche industrielle développée en Allemagne. La production bénéficie également
d’une nouvelle source d’énergie à travers les « 430 générateurs »
fournissant l’électricité permettant un travail plus sûr et plus rapide avec un
gain de place pour remplacer certaines machines à vapeur. Enfin, les nouvelles
machines pour la production et le travail de l’acier sont légions chez Krupp
« 7500 machines outils, 18 laminoirs, 1000 grues » et de puissantes
presses à forger hydrauliques » d’ ‘une « monstrueuse puissance
de 5000 tonnes » (L8-10)
Quels sont
les différents facteurs de développement qui ont permis la naissance de ce
géant industriel ?
L’auteur nous livre dès la 1ère ligne son
admiration devant « l’exemple le plus grandiose (…) d’une concentration
embrassant de multiples objets. » Le mot est lâché. La concentration
financière et verticale des Konzern allemands permettent de prendre le contrôle
d’une filière à tous les stades de production puisque Krupp est propriétaire
des mines de charbon (L3) et produits « des objets pacifiques les plus
variés mais aussi le matériel de guerre » (L 12 ) Ce contrôle permet
de réaliser des économies sur les stades de production en limitant les
intermédiaires et d’être en situation de contrôle des prix afin d’être compétitif
face à la concurrence.
Le rôle de l’entrepreneur est ensuite évoqué par le
document d’accompagnement puisque Alfred Krupp met au point un procédé de
production de l’acier et se dote des meilleures techniques par l’achat
outre-manche du procédé des fours Bessemer en 1862. C’est l’essor des progrès
techniques (L21).
Les transports jouent également un rôle clé dans le
développement de l’usine Krupp qui est doté « d’un port long de 500
mètres » permettant les importations de minerais de Rotterdam et d’Allemagne occidentale. (L 17) Les
chemins de fer permettent également la circulation des matières 1ères et des
produits. Les échanges peuvent donc se développer et les ports permettent
l’essor du commerce qui tire la croissance et la production industrielle.
Le rôle de l’Etat est évoqué dans le texte à travers
ses commandes de « matériel de guerre » (L12) ce qui témoigne du
contexte tendu de l’époque et de la réussite d’une entreprise à s’adapter à des
demandes militaires.
La main d’œuvre abondante fournit ensuite une
explication au développement de Krupp qui emploie « 70000 ouvriers en
1912 ». L’industrie bénéficie d’un exode rural massif et d’une population
abondante, vivant près du site, permettant d’augmenter la production. Cette
productivité est d’ailleurs accentuée par les nouvelles méthodes de travail
évoquées dans le texte. L’exécution finale de l’acier nécessite « plus de
500 000 opérations séparées » (L15) C’est un référence à l’OST
organisation scientifique du travail qui est divisé, simplifié,
chronométré selon les méthodes de
F.Taylor. La productivité s’en trouve accrue et les coûts de production
réduits.
Expliquer en quoi la politique sociale de Krupp est une
avancée, un modèle dans l’ Europe de l’époque et met à mal l’idéologie
marxiste ?
L’auteur évoque le « développement grandiose
des institutions de prévoyance ouvrière » allant de pair avec les progrès
techniques (L21). Visiblement, l’entrepreneur Krupp mène une politique sociale
avant gardiste pour l’époque puisqu’il fonde une caisse auxiliaire de maladie
dès 1853 (L 23) qu’il y adjoint une caisse de retraite pour les veuves et les
orphelins, des sociétés d’assurance, un économat, des casions, des écoles,
bibliothèques, cliniques etc. (L27 à 32). C’est une avancée pour les ouvriers
d’Essen car en Europe, les caisses de
retraite, les allocations diverses, les assurances maladies sont encore rares.
En France, il faut attendre l’intervention de l’Etat et des lois au début du
XXe siècle pour voir une amélioration des conditions de vie des ouvriers
(1910 : loi sur les retraites ouvrières ; 1930 assurances
sociales ». dans la majorité des cas, les ouvriers sont mal lotis et ont
des conditions de vie et de travail déplorables.
Krupp semble faire exception et mène une politique
sociale favorable aux ouvriers, empêchant ainsi les conflits et les luttes de
classes développées par Marx. Mais cette politique paternaliste d’aide « aux veuves, aux orphelins, aux
vieillards »(l 27-32) a des objectifs. Elle peut attirer la main d’œuvre
vers l’entreprise mais elle la garde également.
Les « quatre écoles industrielles, les société d’éducation »
permettent de former une main d’œuvre pour l’avenir tandis que les hôpitaux
permettent de soigner et de recueillir les naissances qui feront de futurs
ouvriers. Derrière cette politique sociale se cache une politique de
recrutement.
Concluez en évoquant l’intérêt et la portée
générale d’un tel document
L’auteur de ce texte nous montre à travers sa
description emphatique de l’usine Krupp toute sa fierté du développement
industriel de l’Allemagne qui est venue tardivement à l’industrialisation.
L’auteur est fier de la réussite industrielle de son pays qui est passé
rapidement en tête des pays industrialisés européens. Sa description précise,
détaillée de l’usine et de son développement permettent de mieux cerner le
processus de développement industriel d’une entreprise et d’un pays. Mais
l’optimisme, la joie des progrès sociaux permis par les progrès techniques ne
doivent pas cacher certains aspects moins joyeux. Les conditions de travail
restent pénibles, même avec le fordisme et le taylorisme qui se mettront en
place. De plus, la pratique paternaliste de Krupp a pour effet de garder
l’ouvrier sur place, disponible en permanence et de permettre un renouvellement
facilité de la main d’œuvre.
J.D. Rockfeller et la Standard Oil Compagny
Montrer en organisant vos
connaissances de cours au service de l’analyse des documents que le cas de
Rockefeller et de sa compagnie est exemplaire de l’économie capitaliste
libérale qui se met en place à la fin du 19e siècle.
Doc 1 : Eléments de biographie
Ce
fils de colporteur américain (1839- 1937) se lance dans les affaires à 16 ans.
Il investit à partir de 1863 dans une branche industrielle naissante, les
raffineries de pétrole. En 1870, il dirige la Standard Oil company, un cartel
puis un trust qui assure plus de 80% des activités pétrolières des EUA. Cette
firme est au début du XXe siècle (avant les lois anti-trust américaines
1911-1914) la plus puissante au monde. Il fut l'homme le plus riche de tous les
temps, avec une fortune estimée à environ 200 milliards de dollars américains
de 2012. Sa famille a été à la tête d'un empire durant près de deux
siècles : la Standard
Oil deviend Esso (des initiales SO), puis ExxonMobil.
Rockefeller voyait volontiers dans son succès un signe d’élection : « L'argent me vient de Dieu », disait-il.
Doc 2 : La Standard
Oil , de la naissance à l’empire mondial
« Nous
avons progressivement étendu notre marché au monde […] La production pour
l’exportation était plus économique si elle était effectuée dans les villes
côtières. Des raffineries furent donc installées à Brooklyn, Bayonne,
Philadelphie et Baltimore.[…] Nous avons aussi découvert que le transport en
barils coûtait plus cher parfois que le contenu.[…]Nous avons donc opté pour le
système de l’oléoduc.[…] En 1867, toutes les firmes Rockefeller se sont unies.
En 1870, nous avons organisé la Standard Oil
Company (en rachetant des concurrents) avec un capital d’un million de
dollar.[…] Nous avons trouvé des investisseurs : le capital a atteint 2,5
puis 3 millions de dollars.[…] Nous n’avons pas hésité à investir des millions
de dollars dans les méthodes de baisse des coûts en multipliant les oléoducs,
les tankers et les wagons-citernes. Nous avons construit des stations-essence
dans les centres ferroviaires de chaque partie des Etats-Unis.
Pendant
des années, la SOC
s’est développée pas à pas […] La compagnie a aujourd’hui 3000 wagons-citernes
qui approvisionnent en essence les villes et les plus petits hameaux d’Europe,
du Japon, de Chine, d’Inde et des principaux pays du monde.[…] Depuis de
nombreuses années, elle rapporte chaque semaine aux Etats-Unis plus d’un
million de dollars-or.[ …] La compagnie paie bien ses 100 000employés,
elle les prend en charge lorsqu’ils sont malades et les pensionne lorsqu’ils
sont vieux.[…] Elle lutte contre la concurrence du pétrole extrait des vastes
gisements de Russie… »
J.D.Rockefeller, Random Reminiscences of Men and Events,
1909.
Doc 3 : L'université Rockefeller
Prestigieuse
université privée américaine, spécialisée dans la recherche médicale. Elle fut
fondée en 1901 grâce à des capitaux donnés par J.D. Rockefeller.
Doc 4 : Caricature américaine contre la Standard Oil (1884)
Doc 5 : Une publicité
pour l’essence de la Standard Oil
(1913)
La correction :
Objectif : Un destin d’homme et une entreprise exemplaires de
l’économie libérale de la fin du 19e s.
= Le sujet nous invite à reconstruire à partir de
l’exemple une def du libéralisme et du capitalisme,
à la fois dans son aspect économique :
économie de marché, du libre-échange et de la liberté laissée aux entreprises +
économie financiarisée (circulation de l’argent, investissements/profits/
banques)
et dans son aspect « social » : rôle
des chefs d’entreprises qui prennent des risques et sont récompensés (ou non)
de ses risques car ils possèdent leurs entreprises.
Doc 1
nous apprend :
Un self-made-man qui a su “investir
(ses économies de 8 ans de travail comme ?) dans une branche industrielle
naissante” : raffinage de pétrole
Une industrie qui se développe
rapidement, permettant la naissance de fortunes rapides (R = « homme le
plus riche de tous les temps »)
Possession privée des moyens de production puisque la SOC
appartient à la famille de Rockefeller.
Croyance dans des capacités particulières (« l’argent
me vient de Dieu ») : la réussite vient récompenser le mérite.
La croissance économique de la fin du 19e siècle est tirée
par des trusts (groupes industriels = cartel, concentration horizontale. La
S.O.C. contrôle « 80% des activités pétrolières US ». cf doc2
« en rachetant les concurrents »)
Doc 2 nous apprend :
Développement mondial quasiment
dès l’origine de la compagnie vers Europe, Asie… Bénéfices rapatriés dans le
pays d’origine (EUA)
Implantation des usines (raffineries) en fonction des
objectifs commerciaux => sur les ports.
Innovation technologique (oléoduc etc) née de considérations
de réduction des coûts de production.
Nécessité de l’investissement. L’argent se trouve auprès des
banques.
Production de masse + méthodes
pour développer une consommation de masse (pub, stations essence)
Paternalisme et pol salariale généreuse.
Grande entreprise (100 000 employés)
Doc 3 nous apprend :
La société se préoccupe de son image de marque. Nouvelle
forme de marketing : le mécénat caritatif.
Doc 4 nous apprend :
Critique contre les trusts (« la pieuvre ») =>
action de l’Etat pour distorsion de la concurrence => (doc 1) lois
anti-trust.
Doc 5 nous apprend :
Pol de franchise pour des agents qui commercialisent
l’essence de la compagnie (« special agent SOC »)
Correction rédigée (à partir de la copie de Sabrina)
Au 19e siècle, la
révolution industrielle s’accompagne d’un long cycle de développement
économique qui touche les EUA dans le dernier tiers du siècle. C’est également
au 19e siècle qu’une pensée libérale naît pour accompagner le
capitalisme qui soutient la circulation généralisée des biens, des personnes et
de l’argent. En quoi le cas de R. et de sa compagnie sont exemplaires de cette
économie capitaliste libérale qui se met en place. Pour répondre à cette
question, nous allons tout d’abord
constater que R. a utilisé des méthodes capitalistes pour développer la
Standard Oil Company puis qu’il répond de façon libérale à la question posée
par son enrichissement « excessif ».
En quelques décennies, Rockefeller
a bâti un empire industriel basé sur les activités de raffinage pétrolier. La
S.O. emploie en 1909 100 000 employés et a déployé ses activités sur tous
les continents (Europe, Asie et pas seulement en Amérique du nord où elle
contrôle absolument tout le marché). La recherche de nouveaux marchés, tout comme
la sécurisation de ses parts de marchés est une caractéristique de l’économie
capitaliste basée sur la concurrence (ici le pétrole russe). C’est pourquoi, en
plus de la mondialisation, il a progressivement racheté tous ses concurrents
sur son marché domestique (constitution d’un cartel) puis a opéré une
concentration verticale en se positionnant sur toutes les activités
pétrolières, jusqu’à constituer un trust. Par ailleurs, comme tout chef
d’entreprise capitaliste, R. a constamment cherché à augmenter les profits de
son entreprise en réduisant les coûts de production. Il a localisé ses
raffineries sur les ports des littoraux américains ; Il a investi d’énormes
sommes d’argent dans le développement de nouvelles technologies de transport du
pétrole (oléoduc, tankers, barils). Il a aussi cherché à augmenter ses ventes
en comprenant très tôt l’intérêt de la publicité qui vante le produit, en
créant un logo pour sa marque, en franchisant ses distributeurs. Comme beaucoup
de grands patrons de son époque, il pratiqua aussi le mécénat caritatif :
l’université Rockefeller, spécialisée dans la recherche médicale, fonctionnait
grâce à ses dons. Celui-ci, outre l’aspect moral, présentait comme autre
avantage de servir à améliorer l’image de marque de l’entreprise et donc ses
ventes.
Au début du 20e siècle,
la SO faisait donc des chiffres d’affaire faramineux : un million de $-or
par semaine, pour un capital investi de 3 millions de $. Rockefeller a fait
appel à des investisseurs privés (banques t/ou actionnaires) qui ont fait de
bonnes affaires en lui prêtant de l’argent. Ils étaient intéressés aux
résultats de l’entreprise. Pour autant, la SO appartenait à Rockefeller, puis à
ses descendants. C’est lui qui en 1863 a investi ses économies dans la société
d’origine et a donc pris le risque financier initial. Sa bonne gestion, le pari
qu’il a fait, au bon moment, de miser sur une industrie naissante et pleine
d’avenir, lui ont permis de devenir l’homme le plus riche de tous les temps. Sa
fortune est estimée à 200 milliards de dollars actuels. Il avait donc bien fait
fructifier son capital de départ et retiré la majeure partie des bénéfices de
son entreprise. R. est le parfait exemple du patron libéral. Il possède son
entreprise et les personnes qui y travaillent sont ses employés. Il les paye
bien, dit-il. Il est paternaliste : la SO « les prend en charge
lorsqu’ils sont malades et les pensionne lorsqu’ils sont vieux ». Mais ils
ne partagent pas les bénéfices. Pour R., ils ne sont pas responsables du succès
de la SO. Ce sont sa chance, sa vision claire, ses bons choix, bref ses
capacités particulières, dont il pense qu’elles sont un don de Dieu, qui lui
valent sa fortune.
En conclusion, l’histoire de R. et
de la SO sont un bon exemple des réussites industrielles et personnelles permises
au tournant du XXe siècle par l’économie capitaliste. Cependant
l’exceptionnelle domination économique du trust fondé par R. est aussi sa
faiblesse. On lui reproche son gigantisme tentaculaire et entre 1911 et 1914,
l’Etat américain démantèle l’entreprise avec ses lois anti-trust établies pour
restaurer une concurrence libre et non faussée.
Un autre sujet possible : la version courte
John D Rockefeller et la Standard Oil
Compagny
« Nous avons
progressivement étendu notre marché au monde […] La production pour
l’exportation était plus économique si elle était effectuée dans les villes
côtières. Des raffineries furent donc installées à Brooklyn, Bayonne,
Philadelphie et Baltimore.[…] Nous avons aussi découvert que le transport en
barils coûtait plus cher parfois que le contenu.[…]Nous avons donc opté pour le
système de l’oléoduc.[…] En 1867, toutes les firmes Rockefeller se sont unies.
En 1870, nous avons organisé la Standard Oil Company (en rachetant des
concurrents) avec un capital d’un million de dollars.[…] Nous avons trouvé des
investisseurs : le capital a atteint 2,5 puis 3 millions de dollars.[…]
Nous n’avons pas hésité à investir des millions de dollars dans les méthodes de
baisse des coûts en multipliant les oléoducs, les tankers et les
wagons-citernes. Nous avons construit des stations-essence dans les centres
ferroviaires de chaque partie des Etats-Unis.
Pendant des années, la SOC
s’est développée pas à pas […] La compagnie a aujourd’hui 3000 wagons-citernes
qui approvisionnent en essence les villes et les plus petits hameaux d’Europe,
du Japon, de Chine, d’Inde et des principaux pays du monde.[…] Depuis de
nombreuses années, elle rapporte chaque semaine aux Etats-Unis plus d’un
million de dollars-or.[ …] La compagnie paie bien ses 100 000 employés,
elle les prend en charge lorsqu’ils sont malades et les pensionne lorsqu’ils
sont vieux.[…] Elle lutte contre la concurrence du pétrole extrait des vastes
gisements de Russie… »
J.D.Rockefeller, Random Reminiscences of Men and Events,
1909.
En organisant vos connaissances de cours au service de
l’analyse de ce texte, montrez que le cas de Rockefeller et de sa compagnie est
exemplaire de l’économie capitaliste, industrielle et commerciale,
paternaliste, qui se met en place à la fin du 19e siècle
Revolution Industrielle - Exemple de question problématisée : l'analyse du sujet
En quoi la révolution
industrielle a-t-elle changé les structures de production économique et les modes de vie des Européens
au 19e siècle ? Etablissez une liste
organisée d’exemples.
Analyse de la question
Un
thème, une période, un lieu. Fixe les bornes de la question à ne pas dépasser
(sinon = Hors-sujet) => colonisation, commerce, cycles de croissance
et de crise, ou transformations
économiques au XXe siècle, tout cela est HS => au pire, ça vous coûte des
points, au mieux, c’est du temps passé pour rien.
Des mots clefs = de quoi il va falloir
parler => vous permet de sélectionner plus finement dans les connaissances
de cours. => Structure de production = où (=> usine + pays),
comment ? (mécanisation, grands
ateliers, innovations), qui ?
(développement du prolétariat) ////Modes de vie (= consommation, lieux de vie,
loisirs, confort…
Le groupe verbal est le plus souvent l’élément le
plus important à prendre en compte, car il désigne quasiment toujours l’objectif de la question : ici, il
faut montrer des changements structurels donc définitifs => démarche
avant/après = comparaison. Il faudra utiliser du vocab qui montre le chgt (ex.
urbanisation).
Une
réflexion plus approfondie sur l’objectif de la question doit vous permettre d’aboutir
au sens à donner à votre argumentation. Ici, il faut lier les deux
thématiques ensemble. Structures de production et modes de vie ont été
transformées. Sont-ce deux phénomènes distincts ? Non, c’est parce que les
structures de production changent que les modes de vie changent.
Une
consigne. =
Comment organiser la réponse. La consigne ici insiste sur le fait qu’il faut
apporter des exemples et les organiser (chronologiquement ou thématiquement ou
dialectiquement
ici = cause/csq tout en faisant attention à la chrono et à
classer par type de csq) + en quoi = dans quelle mesure ? De
quelle ampleur ? =>
changements radicaux ou pas ? choisir donc les exemples qui marquent le plus la
nouveauté.
Plan possible pour la réponse argumentée
Commencer par situer la « révolution
industrielle » = fin XVIIIe s, Angleterre, machine à vapeur et charbon,
passage de l’atelier à l’usine. Puis généralisation dans le courant du 19e
siècle.
Csq1 CHANGEMENT DE CADRE:
augmentation md’o industrielle venue des
campagnes, urbanisation (Ex. mi 19s, la pop. urb. du RU = 50% pop. tot.) et croissance du PIB (Ex. chiffre pour le RU),
enrichissement mais au prix des inégalités sociales
Csq2 DE NOUVEAUX HORIZONS:
création de nvx secteurs d’activités qui
permettent un élargissement des cadres de vie des pop : Ex1 nvx moyens de
transport (1830 chemin de fer Manchester-Liverpool , steamers puis fin 19e
siècle, voitures individuelles). Ex2 Idem pour les medias, le transport et la
conservation du son et de l’image (photographie, cinéma, téléphone, télégraphe
=> donner les dates)
Csq3 VERS LA FIN DE LA SURVIE ?:
le passage à l’industrialisation s’accompagne
d’un dvlppt inoui des sciences et des techniques débouchant sur des innovations
qui améliorent le mode de vie des pop. Ex1 : chimie + médecine =>
hygiénisme, médicaments => baisse de la mortalité. Ex2 : énergie =>
éclairage au gaz puis à l’électricité dans les villes puis les logements. +
chauffage => confort …
dimanche 18 août 2019
L'automobile dans la 2e révolution industrielle
Un exemple de réponse argumentée
La seconde révolution
industrielle (1850-1960) a définitivement ancré le monde occidental dans la
modernité économique. A ce titre, on peut faire du secteur de l’automobile un
modèle d’industrialisation de la 2nde révolution industrielle.
Le
secteur de la construction automobile naît au tournant du XIXe siècle et du XXe
siècle. C’est d’abord une industrie de luxe, qui fait construire encore
essentiellement à la main, des automobiles pour une toute petite frange très
fortunée de la population. Les choses changent cependant assez vite à la faveur
de la première guerre mondiale, et sous l’influence d’innovations venues des
Etats-Unis.
L’industrie automobile se lance
dans la production de masse dès les années 1910. Le mouvement part des usines
Ford qui en 1908 produisent les premiers une voiture en grande série = la Ford T. En France, grande
patrie de l’automobile européenne, André Citroën lance en 1919 la Torpedo A 10 CV, première
voiture française produite en grandes séries. Ce changement d’échelle dans ce
secteur d’activité est rendu possible par des innovations dans le mode de
production. En 1912, Frédéric Taylor, un ingénieur américain publie les Principes d’organisation scientifique des
entreprises. Ses expérimentations sur la parcellisation du travail, la
réduction des temps inutiles, ses nouvelles fixations de normes de production
en fonction de la rentabilité et de la productivité sont tout de suite adoptées
par les chefs d’entreprises les plus novateurs. C’est dans l’automobile, couplé
avec la mécanisation, que le taylorisme est d’abord appliqué (1913). La chaîne
est née, d’abord dans les usines Ford, puis vite adoptée partout ailleurs. Les
ateliers s’agrandissent jusqu’à devenir gigantesques : Dans les années 30,
à l’usine Ford de Red River, 80 000 ouvriers travaillent ; chez
Renault ; 25 000 employés ; chez Citroën, l’usine parisienne du
quai de Javel s’étend sur 90
hectares . Les voitures ne sont plus seulement des objets
de luxe, façonnées par des ouvriers spécialisés amoureux de leur métier. Elles
deviennent essentiellement des objets standardisés, de conception assez simple,
destinés à une consommation de masse. La Ford
T est produite à une moyenne de un million d’exemplaires par
an. Ceci caractérise la 2nde révolution industrielle et la
différencie de la 1ère révolution.
Ceci dit, les modèles doivent
tout de même évoluer et le secteur automobile est porté par des innovations
permanentes : en 1922, la
Citroën B-12 est la première voiture au monde dotée d’une
carrosserie monopièce en acier. En 1934, la Citroën 7 CV est la première traction
avant : sa suspension et ses roues indépendantes en font une voiture d’une
« conception entièrement nouvelle ».
La révolution
des modes de production dans le secteur automobile s’explique par la nécessité pour les chefs d’entreprise d’adapter leur activité à une concurrence
extrêmement forte. On compte aux Etats-Unis, déjà avant la 1ère
guerre mondiale, pas moins de 7 marques différentes qui se partagent le marché
intérieur. Le marché étant tout de même encore limité, le secteur était donc
très concurrentiel : les marques automobiles sont obligées d’innover dans
tous les domaines si elles veulent survivre. Les modernisations productives
permettaient donc de produire plus, plus vite (650 tractions avant sortent tous
les jours des usines Citroën en 1934) et moins cher. L’argument du prix devient
en effet primordial. Les ventes de la
Ford T ont commencé à décoller quand son
prix a baissé de 850 $ en 1909 à 550 $ en 1915.
Pour ces mêmes raisons, les
industriels automobiles innovent dans les méthodes de vente et de marketing.
Ils utilisent massivement la publicité pour se vanter leurs produits (forcément
plus rapides, plus confortables que les autres …) et se différencier de la
concurrence. En France, André Citroën fait figure de pionnier : il invente
la communication événementielle avec les « croisières » noire (1924)
et jaune (1933) : parce que les voitures de cette marque se sont montré
capables de traverser les continents africain et asiatique, elles acquièrent de
ce fait une réputation de robustesse et de fiabilité. De plus, ces événements
associent à la marque des valeurs positives comme l’aventure et l’exotisme si
en vogue en ces temps d’expositions coloniales. Pour ancrer encore davantage la
marque dans l’esprit des futurs consommateurs, Citroën a aussi l’idée en 1925
d’illuminer la tour Eiffel, monument patrimonial français et symbole de
modernité industrielle, avec des lettres de 30 mètres de haut à son
nom. Enfin, comme toutes les autres marques d’ailleurs, il dote ses voitures
d’un logo facilement identifiable, les doubles chevrons renversés.
Toutes ces innovations marketing
permettent le passage à une consommation de masse. Ford le premier avait
d’ailleurs mis en place une politique salariale élevée (5$ par semaine) pour
permettre à ses propres ouvriers d’économiser et d’accéder au crédit pour
acheter leurs voitures. Cette politique connue sous le nom de Fordisme n’est
pas immédiatement reprise par les autres constructeurs qui, eux, continuent
longtemps à payer mal leurs salariés à la pièce, mais elle préfigure ce qui se
fera de façon massive après la 2nde guerre mondiale, dans tous les
secteurs industriels d’ailleurs. D’une autre manière, mais pour obtenir les
mêmes résultats, le directeur de General Motors, entre 1923 et 1956,
« planifie l’obsolescence [des modèles] et les politiques de prix »
permettant de faire changer les goûts des consommateurs tout en leur donnant la
possibilité de changer de voiture assez souvent.
Enfin,
les politiques industrielles et financières des groupes automobiles sont elles
aussi des modèles pour les autres secteurs industriels. Le cas de General
Motors est à bien des égards exemplaire. Le fondateur William Durant en fait,
presque dès sa création, une société par actions, côtée en bourse. Ce système
lui permet d’obtenir des fonds propres,
sans dépendre des banques, et avec l’avantage que, si son entreprise fonctionne
bien, le cours de ses actions montant, son capital grossit de façon
automatique. Mais les besoins en capitaux sont si importants qu’il doit tout de
même emprunter à des banques d’affaires 15 millions de $ en 1909. Il perd son
indépendance (les banquiers entrent au conseil d’administration et peuvent
nommer le PDG : d’ailleurs ils « démissionneront » Durant en
1910) mais il gagne en puissance financière. Cette puissance lui permet de
poursuive ses opérations de concentration industrielle. Entre 1908 et 1910, GM devient un groupe
détenant plusieurs marques automobiles qui se complètent plutôt que de se
concurrencer. La concentration est aussi verticale, avec le rachat de
fournisseurs de composants et de fabricants de camions. Par ailleurs, la
taille, la puissance financière et industrielle du groupe lui permet d’être en
position de force dans ses rapports avec les pouvoirs publics et donc d’obtenir
l’octroi de marchés avantageux : le remplacement des tramways par des bus
par exemple. Pourtant, cette puissance n’est parfois pas suffisamment
importante pour éviter d’être intégré à des holding détenu par de riches
familles capitalistes industrielles venues d’autres secteurs comme les Dupont
de Nemours, qui ont fait leur fortune dans la chimie, ou comme A. P. Sloane,
l’industriel du roulement à billes.
Au total, nous avons
effectivement montré que le secteur de l’industrie automobile fut
particulièrement innovant, tant dans le domaine de la production et des
innovations, que dans celui de la commercialisation, du marketing et des
opérations financières. Ces avancées sont le fait de capitaines d’industrie
caractéristiques du premier âge capitaliste et qui utilisent tous les moyens
que l’économie moderne met à leur disposition. Leurs groupes industriels tirent
la croissance des économies des pays occidentaux. La révolution automobile
qu’ils initient change aussi considérablement les paysages et les modes de vie
des sociétés modernes.
Identifier les différentes étapes formelles de l'exercice
puis reconstituer le plan détaille.
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