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lundi 1 juin 2020

L'économie de l'Europe à la Renaissance

Une petite carte faite par mes soins, avec mes faibles moyens, mais j'en ai besoin pour le cours sur l'ouverture atlantique et je n'ai pas trouvé l'équivalent mieux fait.


dimanche 12 avril 2020

"Les raisins de la colère" en classe de Terminale

Dans le cadre du 1er thème d'Histoire du programme de Terminale (chap 1 : l'impact de la crise de 1929) et pour compléter/approfondir/réactualiser le thème de la question sociale et du mouvement ouvrier au 19e siècle vu en classe de 1ere, je propose d'utiliser des extraits du film de John Ford, les Raisins de la colère d'après le chef d'oeuvre de Steinbeck. Comptez deux heures.

Les objectifs sont multiples : 
  • fournir aux élèves des images concrètes, passer par les ressentis pour leur faire comprendre l'importance du traumatisme causé par les conséquences sociales de la plus grave crise économique du XXe siècle,
  • réactualiser avec eux les fondements de l'analyse marxiste de l'économie capitaliste,
  • poser, si nécessaire, les bases de l'analyse filmique,
  • leur faire comprendre que tout peut être source pour l'historien.


On commencera par présenter l'oeuvre de Steinbeck et le film de J. Ford. S'appuyer éventuellement pour cette présentation sur les supports proposés par le dossier 187 de "Collège au cinéma".

En version courte, il faut insister sur le fait que le livre comme le film sont contemporains des années de crise (film de Ford date de 1940) et que Ford fut considéré comme un cinéaste du New Deal.

Puis rapide présentation de l'argument : Après avoir purgé une peine de prison, Tom Joad (Henri Fonda) revient dans la ferme familiale alors que la crise de 29 ruine tout le pays et qu'une grave sécheresse achève d'expulser les paysans de "leurs" terres. Avec les siens, il décide de partir en Californie dans l'espoir de trouver du travail comme ouvriers agricoles.

Analyse de plusieurs séquences du film

1° Une crise économique absurde aggravant la violence sociale.

Extrait scène 5 dans le découpage du DVD (de 12 min à 18 min : le flash back du voisin)

Que se passe-t-il ? Quelle est la condition sociale de cette famille paysanne ?

En quoi cette scène est une critique du système ? 
=> assez facilement (et le prof structurera) les élèves en disent que c'est une critique du droit de propriété (propriété d'usage "les tombes des ancêtres" contre "papiers avec des écritures"), que la mécanisation dévalorise le travail de l'homme, que la toute puissance de l'argent/manque d'argent déshumanise les rapports humains + la question de la responsabilité individuelle dans ce système économique (qui est responsable ?)
Bilan : c'est la fin d'un monde

Dernière question sur les procédés proprement visuels, filmiques qui indiquent et renforcent cette idée de fin du monde (jeu sur les ombres, bande son...)

apport extérieur (du prof) pour compléter les relevés d''analyse de la scène : explication du système du fermage + Dust Bowl

synthèse rédigée à distribuer aux élèves

On complètera avec l'extrait du livre ci dessous

Doc  : L’absurdité de la crise

« Des hommes capables de réussir des greffes, d’améliorer les produits, sont incapables de trouver le moyen pour que les affamés puissent en manger (…) 
Le travail des hommes et de la nature doit être détruit pour que se maintiennent les cours, et c’est là une abomination qui dépasse toutes les autres. Des chargements d’oranges jetés n’importe où. Les gens viennent de loin pour en prendre, mais cela ne se peut pas. Pourquoi achèteraient-ils des oranges à 20 cents la douzaine, s’il leur suffit de prendre leur voiture et d’aller ramasser pour rien ? Alors les hommes armés de lances d’arrosage aspergent de pétrole les tas d’oranges, et ces hommes sont furieux d’avoir à commettre ce crime et leur colère se retourne contre les gens venus ramasser les oranges. Un million d’affamés ont besoin de fruits, et on arrose de pétrole les montagnes dorées. Et l’odeur de pourriture envahit toute la vallée (…)
Il y a là un crime si monstrueux que cela dépasse l’entendement. Les enfants atteints de pellagre doivent mourir –de sous nutrition- parce que chaque orange doit rapporter un bénéfice. »
John Steinbeck, Les raisins de la colère, 1939, 1947 pour l'édition et la traduction française.

  1. Présenter le document et expliquer le qualificatif "roman social".
  2. Relever, nommer et expliquer les aspects économiques de la crise 
  3. Relever, nommer et expliquer les aspects sociaux de la crise 
  4. Justifier le titre en reformulant l’idée principale du texte. 
  5. Montrer que la crise et le système économique en général délite les rapports sociaux.

2° Libéralisme versus socialisme : face à la crise des choix moraux et des choix de société

Plusieurs scènes qui se répondent et se complètent :

Extrait scène de l'arrivée dans le camps Hooverville (scène 13 à 1H04 jusqu'à la fusillade)
Identifiez les habitants de ce camps (qui sont-ils ? pourquoi sont-ils là ? comment survivent-ils ?)
Pourquoi le début de la scène n'a aucun dialogue ? Quel est l'effet recherché ?
Qu'auriez-vous fait à la place de Ma Joad ? (scène du repas)

Comment est construite (image et son) l'opposition habitants du camps/sheriff ?
Pourquoi l'homme qui proteste est qualifié d'agitateur ?


Extrait 3 l'arrivée au Ranch jusqu'au dialogue Casey/Tom Joad (scènes 15 et 16 : de 1H16 à 1H26)

En général, les élèves ne comprennent pas ce qu'il se passe devant le Ranch (lock-out) car ils ne font pas le lien entre la fin de la séquence et son début. Ne pas hésiter à leur apporter cet élément de réponse

Quelles sont les conditions de travail au Ranch ? Pourquoi peut-on affirmer que les ouvriers agricoles se font exploiter ?
=>Au prof de faire le lien avec les explications économistes et notamment marxistes : salaire/temps de travail ; appropriation de la valeur ajoutée / salaire versé ne permet que de reconstituer sa force de travail / prolétariat

Quand Tom Joad retrouve Casey, on comprend que le Ranch recrute car les ouvriers précédents se sont mis en grève. Quelle est la conséquence directe de cette grève sur les salaires ? Pourquoi ?
=>Fonctionnement du marché du travail, les prolétaires mis en concurrence. Prolonger sur les conditions de succès de ce mouvement et discuter autour de la réponse de Tom Joad ("tout ce qu'ils voient, c'est 5$ aujourd'hui")

3° L'Etat social ou la révolte ?

Extrait 4 : L'arrivée au camps fédéral (scène 18 )
5 minutes pour opposer ce camps et celui vu précédemment. Quel est le message ?

Extrait 5 : la scène finale
Expliquer aux élèves pourquoi Tom Joad doit partir.
Les deux fins / En quoi la 2e fin imposée par le studio rend le ton plus optimiste, mais désamorce la portée révolutionnaire de la première fin ?

Conclure sur les récompenses obtenues par le livre comme le film et ouvrir sur le titre de Bruce Springsteen, the ghost of Tom Joad, qui témoigne de l'actualité des thèmes abordés par le film.

vendredi 10 avril 2020

Un exemple d'agriculture durable : cacao en Cote d'Ivoire (video + questionnaire)

Petite activité vidéo pour les élèves de seconde sur le commerce équitable

L'exemple est la culture du cacao : la vidéo est disponible ici

Le questionnaire est le suivant :


Le commerce équitable (« fairtrade » en anglais), un outil du développement durable
Analyse de la video : cacao équitable en Côte d’Ivoire

1)      Présentez le marché du commerce équitable ? (type de produits, taille du marché, évolution du marché, pays leaders)
2)      En Côte d’Ivoire, on cultive principalement les fèves de cacao pour produire le chocolat. Dans quel type de pays se déroule la transformation des fèves en chocolat ? Quel type d’entreprise la réalise ? Un ivoirien trouve t-il facilement du chocolat ? Pourquoi ?
3)      Pourquoi ne trouve-t-on des cacaoyers que dans les régions tropicales ?
4)      Qu’est-ce qu’une plantation agricole (recherchez la définition dans un dictionnaire) ? Pourquoi le système de production des plantations n’est-il pas adapté à la production des fèves de cacao ?
5)      Pourquoi les petits producteurs de fèves de cacao se détournent-ils de cette activité ? Avec quelles conséquences ?
6)      Combien d’étapes (et de temps) faut-il pour produire cette matière première ?
7)      Quel est l’importance de la culture du cacao pour la Côte d’Ivoire ?
8)      Quels sont les avantages de produire du cacao pour une coopérative du commerce équitable plutôt que de vendre directement sa production à un grossiste d’Abidjan ?
9)      Qui travaille sur les petites exploitations familiales ?
10)  Proposez une définition de « commerce équitable »

BILAN ORGANISE
Expliquez pourquoi et comment la production de cacao en système de commerce équitable permet d’appliquer chacun des trois piliers du développement durable. Rédigez une petite introduction, un développement organisé en 3 paragraphes et une petite conclusion.


La correction :

Correction : Le commerce équitable (« fairtrade » en anglais), un outil du développement durable
 1)      Présentez le marché du commerce équitable ? (type de produits, taille du marché, évolution du marché, pays leaders)
Un marché qui augmente. Plus de 30 000 produits référencés « commerce équitable », la plupart du temps vendus en supermarché. La plupart de ces produits sont des produits agricoles. Les principaux marchés se trouvent au RU, en All, en France et en Suisse.
2)      En Côte d’Ivoire, on cultive principalement les fèves de cacao pour produire le chocolat. Dans quel type de pays se déroule la transformation des fèves en chocolat ? Quel type d’entreprise la réalise ? Un ivoirien trouve t-il facilement du chocolat ? Pourquoi ?
Le cacao est commercialisé par quelques grandes entreprises exportatrices car les principaux marchés sont en Occident (par ex, 11 kg /habitant et par an en Allemagne). Le cacao est produit localement et subit une première transformation (pâte et beurre de cacao), mais la fabrication du chocolat ne se fait pas sur place. Elle se fait en usine en Europe ou dans d'autres pays du « Nord ». C'est ce qui explique qu'il est difficile de trouver du chocolat en Côte d'Ivoire, pourtant premier pays producteur de fèves de cacao. 
3)      Pourquoi ne trouve-t-on des cacaoyers que dans les régions tropicales ?
Il faut des températures chaudes et constantes toute l'année et des pluies bien réparties.
4)      Qu’est-ce qu’une plantation agricole (recherchez la définition dans un dictionnaire) ? Pourquoi le système de production des plantations n’est-il pas adapté à la production des fèves de cacao ?
D'ordinaire, les produits tropicaux sont cultivés dans de grandes exploitations agricoles qui pratiquent la monoculture qu'on appelle des plantations. Le système des plantations a été introduit par les Français et les Britanniques dans leurs colonies au 19e siècle. Aujourd'hui, le cacao est cultivé à 90 % par de petits producteurs. Le cacaoyer nécessite des soins constants toute l'année sinon, l'arbre tombe malade. Ces soins nécessitent l'oeil humain et aucune machine n'est capable de le remplacer. La production n'est donc pas très bonne sur une plantation. Pour une productivité maximale, il faut que le cacaoyer soit sur un terrain où d'autres arbres le protège des rayons du soleil, des caféiers et des palmiers.
5)      Pourquoi les petits producteurs de fèves de cacao se détournent-ils de cette activité ? Avec quelles conséquences ?
La production de fèves de cacao pour les petits agriculteurs ne permet pas de gagner suffisamment pour vivre convenablement. Dans le village pris en exemple dans la vidéo, un habitant sur deux vit avec moins de 20€ par mois. Le travail du cacao est dur, dangereux et n'offre pas de répit. De plus, les prix sont faibles et fluctuent sans arrêt.En 1980, une T de fèves rapportait 5000$. En 2000, le prix avait chuté à 1200$, puis a remonté jusqu'à 3000 en 2014-2015. C'est la conséquence de la spéculation internationale. Beaucoup , surtout les jeunes, arrêtent donc d'entretenir les terres et partent à la ville (exode rural).
6)      Combien d’étapes (et de temps) faut-il pour produire cette matière première ?
Cueillette qui dure plusieurs mois car les fruits ne mûrissent pas au même rythme. Puis il y a le cabossage = les fèves sont détachées des cabosses. Puis elles sont mises à fermenter à la chaleur pendant plusieurs jours. Pendant cette étape, la chair se détache des fèves en libérant leur jus. La qualité de la fermentation donne la qualité du chocolat. Les fèves sont ensuite séchées au soleil, puis triées.
7)      Quelle  est l’importance de la culture du cacao pour la Côte d’Ivoire ?
Pour ce pays, c''est le 2e produit d'exportation après le pétrole. 2/3 des Ivoiriens travaillent dans l'agriculture et la culture du cacao fait vivre 6 millions de personnes en Côte d'Ivoire.
8)      Quels sont les avantages de produire du cacao pour une coopérative du commerce équitable plutôt que de vendre directement sa production à un grossiste d’Abidjan ?
Dans l'exemple donné par la vidéo, la dame qui cultive le cacao sur une toute petite exploitation familiale (3,5 ha) gagne 115€ par mois, ce qui est un bon revenu pour les agriculteurs de Côte d'Ivoire. Avec ce revenu, elle fait vivre toute sa famille (6 enfants et 10 petits-enfants). Elle produit pour la coopérative équitable qui lui donne des formations pour apprendre les bons soins, ainsi que des jeunes plants pour remplacer les vieux arbres (20 ans environ, c'est la durée de vie d'une cacaoyer). Gràce à la coopérative, la production a quasiment triplé de 500 kg à près de 1,5 tonne. Au moment des récoltes, les producteurs de la coopérative s'entraident. Il n'y a donc pas à engager des travailleurs saisonniers.
Au lieu de vendre à un grossiste peu cher, Emma livre ses fèves à la coopérative pour 1/3 de plus que le prix du marché libre. De plus, elle n'a pas à livrer ses sacs (de presque 70 kg chaque). La coopérative revend ces fèves à des chocolatiers en Europe.
  9)      Qui travaille sur les petites exploitations familiales ?
Les familles. Les enfants sont au travail de façon occasionnelle (le mercredi, le samedi, les vacances) quand ils ne sont pas à l'école. En Côte d'Ivoire, l'école est obligatoire et gratuite. Mais, même si tous les parents préfèrent voir leurs enfants à l'école, chez les plus pauvres, les enfants doivent travailler au champs. Les spécialistes estiment que des dizaines de milliers d'enfants sont dans ce cas. C'est une main d'oeuvre non payée, indispensable.
10)   Proposez une définition de « commerce équitable »
En supprimant certains intermédiaires et en vendant plus cher sur les marchés consommateurs grâce au label « commerce équitable », le commerce équitable permet de faire  vivre les petits producteurs. En plus d'être avantageux économiquement, c'est aussi intéressant socialement car les conditions de travail sont meilleures. Enfin, le travail des producteurs équitables est plus respectueux de l'environnement. Les coopératives de commerce équitable s'engage aussi dans des actions de sensibilisation des populations sur d'autres sujets que la production agricole : comme le respect des femmes, la scolarisation ….= soutien aux projets communautaires.
Mais les coopératives sont limitées par un marché de produits équitables qui n'augmente pas très vite. En Allemagne, le chocolat équitable représente 0,15% de marché.

BILAN ORGANISE
Expliquez pourquoi et comment la production de cacao en système de commerce équitable permet d’appliquer chacun des trois piliers du développement durable. Rédigez une petite introduction, un développement organisé en 3 paragraphes et une petite conclusion.

Organisé sur la base des 3 piliers du DD = croissance économique, limitation des inégalités sociales, protection de l'environnement.
Idées principales : 
Le commerce équitable en permettant aux petits producteurs de vivre décemment limite l'exode rural. L'aide technique permet d'augmenter les productions. Il soutient donc la croissance économique des zones rurales. De plus, l'augmentation des revenus permet aux enfants d'aller à l'école , ce qui profitera économiquement au pays quand ces enfants devenus grands seront une main d'oeuvre mieux formée.
En soutenant des projets communautaires, il contribue au développement social. Il développe l'entraide et la vie communautaire. Les coopératives ont un rôle d'éducation populaire.
Enfin, grâce au revenus garantis, les petits paysans ne délaissent pas leurs terres, pas plus qu'ils ne se lancent dans l'aventure des pesticides ou des OGM.

jeudi 9 janvier 2020

Révolution industrielle ex de Krupp



Un géant industriel : l’usine Krupp à Essen en 1912.


L'exemple le plus grandiose peut-être d'une concentration embrassant de multiples objets est offert par l'usine Krupp qui, en 1845 occupait 122 ouvriers; en 1887, 45 000 ouvriers et employés; en 1912, 70 000 ouvriers en chiffres ronds. Le charbon est extrait des fosses qui sont la propriété de l'établissement, et sa consommation annuelle s'élève à plus de 2 millions et demi de tonnes, dont 900 000 pour la seule aciérie d'Essen. Cela correspond par jour de travail à une arrivée d'environ sept trains de chemins de fer complets et à pleine charge. Plus de 7 500 machines-outils, 18 laminoirs, 80 presses hydrauliques, 430 générateurs, 550 machines à vapeur et presque 1 000 grues sont mis en marche à Essen. À la place du marteau-pilon, autrefois célèbre sous le nom de Fritz, qui possédait un poids de chute de 50 tonnes et contribua, pendant plus de 50 ans, à la renommée de la maison, se trouvent aujourd'hui de puissantes presses à forger hydrauliques, dont la monstrueuse puissance de 5000 tonnes peut être à peine conçue par notre imagination. [...] En fait de machines-outils et de machines de travail, l'aciérie en renferme 7 200 qui produisent les objets pacifiques les plus variés, mais aussi le matériel de guerre. Un chemin de fer étreint l'ensemble de l'usine de ses 150 kilomètres de voies, relie les ateliers séparés et assure les transports au moyen de 50 locomotives et de 2 400 wagons. [...1 Dans le laboratoire chimico-physique, où chaque coulée de l'usine est éprouvée dans sa composition et ses qualités, il est annuellement accompli environ 60 000 essais, dont l'exécution finale nécessite plus de 500 000 opérations séparées. [...] Les forges Frédéric-Alfred sont ainsi les plus importantes de leur espèce en Europe. Un port long de plus de 500 mètres forme la voie nécessaire à leurs arrivages. Les bateaux du Rhin leur amènent les minerais des armateurs de Rotterdam, aussi bien que ceux des mines de l'Allemagne occidentale. Le long du quai vertical, de puissants ponts roulants assurent le transport du minerai vers les places de déchargement et les réservoirs. Des ascenseurs l'élèvent de là jusqu'aux gueulards des hauts-fourneaux pour y subir la fusion après mélange avec le coke. Toutes les quatre ou six heures environ a lieu la coulée. Fort heureusement avec les progrès techniques marche de pair le développement grandiose des institutions de prévoyance ouvrière. La caisse auxiliaire de maladie, fondée en 1853, s'est développée par l'adjonction d'une caisse de retraite pour les veuves et les orphelins qui dispose, aujourd'hui, d'un avoir de plus de 22 millions de marks. En outre, il existe une société d'assurances sur la vie, qui facilite aux employés les contrats de cette nature; une fondation pour les ouvriers et invalides, destinée à compléter les versements des différentes caisses et possédant un capital supérieur à 7 millions de marks; une assurance contre les accidents des employés et une caisse d'épargne. Comme autres institutions prospères en faveur des ouvriers, il faut citer l'économat d'Essen, le casino des employés, le casino des maîtres ouvriers, une école ménagère, quatre écoles industrielles, une salle de lecture de plus de soixante mille volumes, une bibliothèque scientifique professionnelle de cinquante mille volumes, une société d'éducation, une clinique dentaire, un hôpital, etc.; enfin, un asile de vieillards, où les ouvriers infirmes ou retraités peuvent, près de leurs femmes, terminer leurs jours.

                                            Wilhelm Roscher, Économie industrielle, Paris, Giard et Brière, 1918, p. 185-187. Traduit de la 8e édition allemande, 1913. La première édition avait été publiée en 1881.

Doc d’accompagnement :  une biographie de Krupp . Alfred Krupp, 1812-1887, né à Essen. Il reprend l’entreprise familiale fondée par son père qui ne comptait alors que 7 personnes. Il mit au point un procédé de production de l’acier (1847), fabriqua les 1ers canons lourds en acier, dont le tube était coulé d’une seule pièce et importa de Grande Bretagne, le procédé Bessemer (1862). Il développa considérablement le site de Essen en concentrant différentes activités depuis les mines de charbon et de fer, jusqu’aux chantiers navals et à l’armement.


Questions
  • Présenter le document
  • En quoi l’usine Krupp est elle à la fois le reflet de la 1ère révolution industrielle et de la modernité technologique de la 2e révolution industrielle ?
  • Quels sont les différents facteurs de développement qui ont permis la naissance de ce géant industriel ? 
  • Expliquer en quoi la politique sociale de Krupp est une avancée, un modèle dans l’ Europe de l’époque et met à mal l’idéologie marxiste ?
  • Concluez en évoquant l’intérêt et la portée générale d’un tel document



Proposition de correction.


Présenter le document :

Le texte présenté ici est extrait d’un livre intitulé l’Economie industrielle s’attachant à décrire les aspects de l’industrie et de son développement. L’auteur W. Roscher, probablement un économiste allemand, a réédité et mis à jour son travail depuis 1881. L’édition présentée ici est celle de 1913 qui a été traduite en français en 1918 ce qui est un signe du succès de son ouvrage. La date de 1913 est importante. En effet, l’Allemagne qui s’est industrialisée tardivement est, à cette date, la 1ère puissance industrielle d’Europe devant les Britanniques et les Français. Par ailleurs la situation internationale est tendue du fait d’une compétition internationale entre les puissances européennes.  L’auteur présente dans cet extrait l’usine sidérurgique Krupp à Essen en 1912. Il s’attache à montrer la puissance industrielle de cette usine par une description flatteuse de ses dimensions. Mais il évoque également les progrès sociaux que cette industrie permet. La fierté nationale apparaît derrière cet « exemple le plus grandiose » d’industrie.

En quoi l’usine Krupp est elle à la fois le reflet de la 1ère révolution industrielle et de la modernité technologique de la 2e révolution industrielle ?

L’entreprise Krupp est d’abord une entreprise familiale fondée au début du XIXe siècle et elle reste d’une taille modeste encore en 1845 puisqu’elle emploie « 122 ouvriers ». Cette entreprise s’appuie sur les ressources de la 1ère révolution industrielle qui est d’abord le charbon, lequel est « propriété de l’établissement » (l3) La spécialité de l’entreprise est d’abord la métallurgie, autre secteur de la 1ère révolution industrielle avec un marteau pilon « d’un poids de chute de 50 tonnes » mais également des « forges Frederic Alfred » et des hauts fourneaux. L’entreprise a ainsi pu se développer avec la demande croissante de charbon et de fer permettant de développer les machines à vapeur, mises au point par James Watt en 1769 et qui sont au nombre de 550 dans l’usine (L6), mais également les chemins de fers et les rails qui se développe dans toute l’Europe depuis l’Angleterre mais également en Allemagne puisque autour de l’usine Krupp existent « 150 kilomètres de voies, relaint les ateliers séparés (…) au moyen de 50 locomotives et de 2400 wagons. »
Mais l’entreprise s’est surtout développée à la fin du XIXe siècle puisqu’en 1887, « 45000 ouvriers et employés « travaillent à Essen.  Alfred Krupp a mis au point un procédé de production de l’acier et importé le procédé Bessemer (1862) permettant une production massive d’acier « puisque une coulée à lieu toutes les quatre ou six heures ».(L21) et que la production nécessite 900000 tonnes de charbon à elle seule (L4). L’acier, nouveau produit beaucoup plus résistant bénéficie des recherches en physique-chimie puisque un laboratoire réalise environ 60000 essais. La chimie est effectivement une branche industrielle développée en Allemagne. La production bénéficie également d’une nouvelle source d’énergie à travers les « 430 générateurs » fournissant l’électricité permettant un travail plus sûr et plus rapide avec un gain de place pour remplacer certaines machines à vapeur. Enfin, les nouvelles machines pour la production et le travail de l’acier sont légions chez Krupp « 7500 machines outils, 18 laminoirs, 1000 grues » et de puissantes presses à forger hydrauliques » d’ ‘une « monstrueuse puissance de 5000 tonnes » (L8-10)
 Quels sont les différents facteurs de développement qui ont permis la naissance de ce géant industriel ? 

L’auteur nous livre dès la 1ère ligne son admiration devant « l’exemple le plus grandiose (…) d’une concentration embrassant de multiples objets. » Le mot est lâché. La concentration financière et verticale des Konzern allemands permettent de prendre le contrôle d’une filière à tous les stades de production puisque Krupp est propriétaire des mines de charbon (L3) et produits « des objets pacifiques les plus variés mais aussi le matériel de guerre » (L 12 ) Ce contrôle permet de réaliser des économies sur les stades de production en limitant les intermédiaires et d’être en situation de contrôle des prix afin d’être compétitif face à la concurrence. 
Le rôle de l’entrepreneur est ensuite évoqué par le document d’accompagnement puisque Alfred Krupp met au point un procédé de production de l’acier et se dote des meilleures techniques par l’achat outre-manche du procédé des fours Bessemer en 1862. C’est l’essor des progrès techniques (L21).
Les transports jouent également un rôle clé dans le développement de l’usine Krupp qui est doté « d’un port long de 500 mètres » permettant les importations de minerais de Rotterdam  et d’Allemagne occidentale. (L 17) Les chemins de fer permettent également la circulation des matières 1ères et des produits. Les échanges peuvent donc se développer et les ports permettent l’essor du commerce qui tire la croissance et la production industrielle.
Le rôle de l’Etat est évoqué dans le texte à travers ses commandes de « matériel de guerre » (L12) ce qui témoigne du contexte tendu de l’époque et de la réussite d’une entreprise à s’adapter à des demandes militaires.
La main d’œuvre abondante fournit ensuite une explication au développement de Krupp qui emploie « 70000 ouvriers en 1912 ». L’industrie bénéficie d’un exode rural massif et d’une population abondante, vivant près du site, permettant d’augmenter la production. Cette productivité est d’ailleurs accentuée par les nouvelles méthodes de travail évoquées dans le texte. L’exécution finale de l’acier nécessite « plus de 500 000 opérations séparées » (L15) C’est un référence à l’OST organisation scientifique du travail qui est divisé, simplifié, chronométré  selon les méthodes de F.Taylor. La productivité s’en trouve accrue et les coûts de production réduits.

Expliquer en quoi la politique sociale de Krupp est une avancée, un modèle dans l’ Europe de l’époque et met à mal l’idéologie marxiste ?

L’auteur évoque le « développement grandiose des institutions de prévoyance ouvrière » allant de pair avec les progrès techniques (L21). Visiblement, l’entrepreneur Krupp mène une politique sociale avant gardiste pour l’époque puisqu’il fonde une caisse auxiliaire de maladie dès 1853 (L 23) qu’il y adjoint une caisse de retraite pour les veuves et les orphelins, des sociétés d’assurance, un économat, des casions, des écoles, bibliothèques, cliniques etc. (L27 à 32). C’est une avancée pour les ouvriers d’Essen car en Europe,  les caisses de retraite, les allocations diverses, les assurances maladies sont encore rares. En France, il faut attendre l’intervention de l’Etat et des lois au début du XXe siècle pour voir une amélioration des conditions de vie des ouvriers (1910 : loi sur les retraites ouvrières ; 1930 assurances sociales ». dans la majorité des cas, les ouvriers sont mal lotis et ont des conditions de vie et de travail déplorables.
Krupp semble faire exception et mène une politique sociale favorable aux ouvriers, empêchant ainsi les conflits et les luttes de classes développées par Marx. Mais cette politique paternaliste  d’aide « aux veuves, aux orphelins, aux vieillards »(l 27-32) a des objectifs. Elle peut attirer la main d’œuvre vers l’entreprise mais elle la garde également.  Les « quatre écoles industrielles, les société d’éducation » permettent de former une main d’œuvre pour l’avenir tandis que les hôpitaux permettent de soigner et de recueillir les naissances qui feront de futurs ouvriers. Derrière cette politique sociale se cache une politique de recrutement.

Concluez en évoquant l’intérêt et la portée générale d’un tel document

L’auteur de ce texte nous montre à travers sa description emphatique de l’usine Krupp toute sa fierté du développement industriel de l’Allemagne qui est venue tardivement à l’industrialisation. L’auteur est fier de la réussite industrielle de son pays qui est passé rapidement en tête des pays industrialisés européens. Sa description précise, détaillée de l’usine et de son développement permettent de mieux cerner le processus de développement industriel d’une entreprise et d’un pays. Mais l’optimisme, la joie des progrès sociaux permis par les progrès techniques ne doivent pas cacher certains aspects moins joyeux. Les conditions de travail restent pénibles, même avec le fordisme et le taylorisme qui se mettront en place. De plus, la pratique paternaliste de Krupp a pour effet de garder l’ouvrier sur place, disponible en permanence et de permettre un renouvellement facilité de la main d’œuvre.

J.D. Rockfeller et la Standard Oil Compagny


Montrer en organisant vos connaissances de cours au service de l’analyse des documents que le cas de Rockefeller et de sa compagnie est exemplaire de l’économie capitaliste libérale qui se met en place à la fin du 19e siècle.


Doc 1 : Eléments de biographie
Ce fils de colporteur américain (1839- 1937) se lance dans les affaires à 16 ans. Il investit à partir de 1863 dans une branche industrielle naissante, les raffineries de pétrole. En 1870, il dirige la Standard Oil company, un cartel puis un trust qui assure plus de 80% des activités pétrolières des EUA. Cette firme est au début du XXe siècle (avant les lois anti-trust américaines 1911-1914) la plus puissante au monde. Il fut l'homme le plus riche de tous les temps, avec une fortune estimée à environ 200 milliards de dollars américains de 2012. Sa famille a été à la tête d'un empire durant près de deux siècles : la Standard Oil deviend Esso (des initiales SO), puis ExxonMobil. Rockefeller voyait volontiers dans son succès un signe d’élection : « L'argent me vient de Dieu », disait-il.


Doc 2 : La Standard Oil, de la naissance à l’empire mondial
« Nous avons progressivement étendu notre marché au monde […] La production pour l’exportation était plus économique si elle était effectuée dans les villes côtières. Des raffineries furent donc installées à Brooklyn, Bayonne, Philadelphie et Baltimore.[…] Nous avons aussi découvert que le transport en barils coûtait plus cher parfois que le contenu.[…]Nous avons donc opté pour le système de l’oléoduc.[…] En 1867, toutes les firmes Rockefeller se sont unies. En 1870, nous avons organisé la Standard Oil Company (en rachetant des concurrents) avec un capital d’un million de dollar.[…] Nous avons trouvé des investisseurs : le capital a atteint 2,5 puis 3 millions de dollars.[…] Nous n’avons pas hésité à investir des millions de dollars dans les méthodes de baisse des coûts en multipliant les oléoducs, les tankers et les wagons-citernes. Nous avons construit des stations-essence dans les centres ferroviaires de chaque partie des Etats-Unis.
Pendant des années, la SOC s’est développée pas à pas […] La compagnie a aujourd’hui 3000 wagons-citernes qui approvisionnent en essence les villes et les plus petits hameaux d’Europe, du Japon, de Chine, d’Inde et des principaux pays du monde.[…] Depuis de nombreuses années, elle rapporte chaque semaine aux Etats-Unis plus d’un million de dollars-or.[ …] La compagnie paie bien ses 100 000employés, elle les prend en charge lorsqu’ils sont malades et les pensionne lorsqu’ils sont vieux.[…] Elle lutte contre la concurrence du pétrole extrait des vastes gisements de Russie… »
J.D.Rockefeller, Random Reminiscences of Men and Events, 1909.

Doc 3 : L'université Rockefeller

Prestigieuse université privée américaine, spécialisée dans la recherche médicale. Elle fut fondée en 1901 grâce à des capitaux donnés par J.D. Rockefeller.




Doc 4 : Caricature américaine contre la Standard Oil(1884)





















Doc 5 : Une publicité pour l’essence de la Standard Oil (1913)








La correction :

Objectif : Un destin d’homme et une entreprise exemplaires de l’économie libérale de la fin du 19e s.
= Le sujet nous invite à reconstruire à partir de l’exemple une def du libéralisme et du capitalisme,
à la fois dans son aspect économique : économie de marché, du libre-échange et de la liberté laissée aux entreprises + économie financiarisée (circulation de l’argent, investissements/profits/ banques)
et dans son aspect « social » : rôle des chefs d’entreprises qui prennent des risques et sont récompensés (ou non) de ses risques car ils possèdent leurs entreprises.

Doc 1 nous apprend :
Un self-made-man qui a su “investir (ses économies de 8 ans de travail comme ?) dans une branche industrielle naissante” : raffinage de pétrole
Une industrie qui se développe rapidement, permettant la naissance de fortunes rapides (R = « homme le plus riche de tous les temps »)
Possession privée des moyens de production puisque la SOC appartient à la famille de Rockefeller.
Croyance dans des capacités particulières (« l’argent me vient de Dieu ») : la réussite vient récompenser le mérite.
La croissance économique  de la fin du 19e siècle est tirée par des trusts (groupes industriels = cartel, concentration horizontale. La S.O.C. contrôle « 80% des activités pétrolières US ». cf doc2 « en rachetant les concurrents »)
Doc 2 nous apprend :
Développement mondial quasiment dès l’origine de la compagnie vers Europe, Asie… Bénéfices rapatriés dans le pays d’origine (EUA)
Implantation des usines (raffineries) en fonction des objectifs commerciaux => sur les ports.
Innovation technologique (oléoduc etc) née de considérations de réduction des coûts de production.
Nécessité de l’investissement. L’argent se trouve auprès des banques.
Production de masse + méthodes pour développer une consommation de masse (pub, stations essence)
Paternalisme et pol salariale généreuse.
Grande entreprise (100 000 employés)
Doc 3 nous apprend :
La société se préoccupe de son image de marque. Nouvelle forme de marketing : le mécénat caritatif.
Doc 4 nous apprend :
Critique contre les trusts (« la pieuvre ») => action de l’Etat pour distorsion de la concurrence => (doc 1) lois anti-trust.
Doc 5 nous apprend :
Pol de franchise pour des agents qui commercialisent l’essence de la compagnie (« special agent SOC »)

Correction rédigée (à partir de la copie de Sabrina)
Au 19e siècle, la révolution industrielle s’accompagne d’un long cycle de développement économique qui touche les EUA dans le dernier tiers du siècle. C’est également au 19e siècle qu’une pensée libérale naît pour accompagner le capitalisme qui soutient la circulation généralisée des biens, des personnes et de l’argent. En quoi le cas de R. et de sa compagnie sont exemplaires de cette économie capitaliste libérale qui se met en place. Pour répondre à cette question, nous allons  tout d’abord constater que R. a utilisé des méthodes capitalistes pour développer la Standard Oil Company puis qu’il répond de façon libérale à la question posée par son enrichissement « excessif ».
En quelques décennies, Rockefeller a bâti un empire industriel basé sur les activités de raffinage pétrolier. La S.O. emploie en 1909 100 000 employés et a déployé ses activités sur tous les continents (Europe, Asie et pas seulement en Amérique du nord où elle contrôle absolument tout le marché). La recherche de nouveaux marchés, tout comme la sécurisation de ses parts de marchés est une caractéristique de l’économie capitaliste basée sur la concurrence (ici le pétrole russe). C’est pourquoi, en plus de la mondialisation, il a progressivement racheté tous ses concurrents sur son marché domestique (constitution d’un cartel) puis a opéré une concentration verticale en se positionnant sur toutes les activités pétrolières, jusqu’à constituer un trust. Par ailleurs, comme tout chef d’entreprise capitaliste, R. a constamment cherché à augmenter les profits de son entreprise en réduisant les coûts de production. Il a localisé ses raffineries sur les ports des littoraux américains ; Il a investi d’énormes sommes d’argent dans le développement de nouvelles technologies de transport du pétrole (oléoduc, tankers, barils). Il a aussi cherché à augmenter ses ventes en comprenant très tôt l’intérêt de la publicité qui vante le produit, en créant un logo pour sa marque, en franchisant ses distributeurs. Comme beaucoup de grands patrons de son époque, il pratiqua aussi le mécénat caritatif : l’université Rockefeller, spécialisée dans la recherche médicale, fonctionnait grâce à ses dons. Celui-ci, outre l’aspect moral, présentait comme autre avantage de servir à améliorer l’image de marque de l’entreprise et donc ses ventes.
Au début du 20e siècle, la SO faisait donc des chiffres d’affaire faramineux : un million de $-or par semaine, pour un capital investi de 3 millions de $. Rockefeller a fait appel à des investisseurs privés (banques t/ou actionnaires) qui ont fait de bonnes affaires en lui prêtant de l’argent. Ils étaient intéressés aux résultats de l’entreprise. Pour autant, la SO appartenait à Rockefeller, puis à ses descendants. C’est lui qui en 1863 a investi ses économies dans la société d’origine et a donc pris le risque financier initial. Sa bonne gestion, le pari qu’il a fait, au bon moment, de miser sur une industrie naissante et pleine d’avenir, lui ont permis de devenir l’homme le plus riche de tous les temps. Sa fortune est estimée à 200 milliards de dollars actuels. Il avait donc bien fait fructifier son capital de départ et retiré la majeure partie des bénéfices de son entreprise. R. est le parfait exemple du patron libéral. Il possède son entreprise et les personnes qui y travaillent sont ses employés. Il les paye bien, dit-il. Il est paternaliste : la SO « les prend en charge lorsqu’ils sont malades et les pensionne lorsqu’ils sont vieux ». Mais ils ne partagent pas les bénéfices. Pour R., ils ne sont pas responsables du succès de la SO. Ce sont sa chance, sa vision claire, ses bons choix, bref ses capacités particulières, dont il pense qu’elles sont un don de Dieu, qui lui valent sa fortune.

En conclusion, l’histoire de R. et de la SO sont un bon exemple des réussites industrielles et personnelles permises au tournant du XXe siècle par l’économie capitaliste. Cependant l’exceptionnelle domination économique du trust fondé par R. est aussi sa faiblesse. On lui reproche son gigantisme tentaculaire et entre 1911 et 1914, l’Etat américain démantèle l’entreprise avec ses lois anti-trust établies pour restaurer une concurrence libre et non faussée.


Un autre sujet possible : la version courte

John D Rockefeller et la Standard Oil Compagny 
 « Nous avons progressivement étendu notre marché au monde […] La production pour l’exportation était plus économique si elle était effectuée dans les villes côtières. Des raffineries furent donc installées à Brooklyn, Bayonne, Philadelphie et Baltimore.[…] Nous avons aussi découvert que le transport en barils coûtait plus cher parfois que le contenu.[…]Nous avons donc opté pour le système de l’oléoduc.[…] En 1867, toutes les firmes Rockefeller se sont unies. En 1870, nous avons organisé la Standard Oil Company (en rachetant des concurrents) avec un capital d’un million de dollars.[…] Nous avons trouvé des investisseurs : le capital a atteint 2,5 puis 3 millions de dollars.[…] Nous n’avons pas hésité à investir des millions de dollars dans les méthodes de baisse des coûts en multipliant les oléoducs, les tankers et les wagons-citernes. Nous avons construit des stations-essence dans les centres ferroviaires de chaque partie des Etats-Unis.
Pendant des années, la SOC s’est développée pas à pas […] La compagnie a aujourd’hui 3000 wagons-citernes qui approvisionnent en essence les villes et les plus petits hameaux d’Europe, du Japon, de Chine, d’Inde et des principaux pays du monde.[…] Depuis de nombreuses années, elle rapporte chaque semaine aux Etats-Unis plus d’un million de dollars-or.[ …] La compagnie paie bien ses 100 000 employés, elle les prend en charge lorsqu’ils sont malades et les pensionne lorsqu’ils sont vieux.[…] Elle lutte contre la concurrence du pétrole extrait des vastes gisements de Russie… »
J.D.Rockefeller, Random Reminiscences of Men and Events, 1909.

En organisant vos connaissances de cours au service de l’analyse de ce texte, montrez que le cas de Rockefeller et de sa compagnie est exemplaire de l’économie capitaliste, industrielle et commerciale, paternaliste, qui se met en place à la fin du 19e siècle


Revolution Industrielle - Exemple de question problématisée : l'analyse du sujet


                                        
En quoi la révolution industrielle a-t-elle changé les structures de production économique et les modes de vie des Européens au 19e siècle ? Etablissez une liste organisée d’exemples.

Analyse de la question

Un thème, une période, un lieu. Fixe les bornes de la question à ne pas dépasser (sinon = Hors-sujet) => colonisation, commerce, cycles de croissance et de crise,  ou transformations économiques au XXe siècle, tout cela est HS => au pire, ça vous coûte des points, au mieux, c’est du temps passé pour rien.

Des mots clefs = de quoi il va falloir parler => vous permet de sélectionner plus finement dans les connaissances de cours. => Structure de production = où (=> usine + pays), comment ? (mécanisation, grands ateliers, innovations), qui ? (développement du prolétariat) ////Modes de vie (= consommation, lieux de vie, loisirs, confort…

Le groupe verbal est le plus souvent l’élément le plus important à prendre en compte, car il désigne quasiment toujours  l’objectif de la question : ici, il faut montrer des changements structurels donc définitifs => démarche avant/après = comparaison. Il faudra utiliser du vocab qui montre le chgt (ex. urbanisation).


Une réflexion plus approfondie sur l’objectif de la question doit vous permettre d’aboutir au sens à donner à votre argumentation. Ici, il faut lier les deux thématiques ensemble. Structures de production et modes de vie ont été transformées. Sont-ce deux phénomènes distincts ? Non, c’est parce que les structures de production changent que les modes de vie changent.


Une consigne. = Comment organiser la réponse. La consigne ici insiste sur le fait qu’il faut apporter des exemples et les organiser (chronologiquement ou thématiquement ou dialectiquement 
ici = cause/csq tout en faisant attention à la chrono et à classer par type de csq) + en quoi = dans quelle mesure ? De quelle ampleur ? => changements radicaux ou pas ? choisir donc les exemples qui marquent le plus la nouveauté.


Plan possible pour la réponse argumentée

Commencer par situer la « révolution industrielle » = fin XVIIIe s, Angleterre, machine à vapeur et charbon, passage de l’atelier à l’usine. Puis généralisation dans le courant du 19e siècle.

Csq1 CHANGEMENT DE CADRE: 
augmentation md’o industrielle venue des campagnes, urbanisation (Ex. mi 19s, la pop. urb. du RU = 50% pop. tot.) et croissance du PIB (Ex. chiffre pour le RU), enrichissement mais au prix des inégalités sociales

Csq2 DE NOUVEAUX HORIZONS: 
création de nvx secteurs d’activités qui permettent un élargissement des cadres de vie des pop : Ex1 nvx moyens de transport (1830 chemin de fer Manchester-Liverpool , steamers puis fin 19e siècle, voitures individuelles). Ex2 Idem pour les medias, le transport et la conservation du son et de l’image (photographie, cinéma, téléphone, télégraphe => donner les dates)

Csq3 VERS LA FIN DE LA SURVIE ?: 
le passage à l’industrialisation s’accompagne d’un dvlppt inoui des sciences et des techniques débouchant sur des innovations qui améliorent le mode de vie des pop. Ex1 : chimie + médecine => hygiénisme, médicaments => baisse de la mortalité. Ex2 : énergie => éclairage au gaz puis à l’électricité dans les villes puis les logements. + chauffage => confort …

dimanche 18 août 2019

L'automobile dans la 2e révolution industrielle

Un exemple de réponse argumentée


La seconde révolution industrielle (1850-1960) a définitivement ancré le monde occidental dans la modernité économique. A ce titre, on peut faire du secteur de l’automobile un modèle d’industrialisation de la 2nde révolution industrielle.

            Le secteur de la construction automobile naît au tournant du XIXe siècle et du XXe siècle. C’est d’abord une industrie de luxe, qui fait construire encore essentiellement à la main, des automobiles pour une toute petite frange très fortunée de la population. Les choses changent cependant assez vite à la faveur de la première guerre mondiale, et sous l’influence d’innovations venues des Etats-Unis.
L’industrie automobile se lance dans la production de masse dès les années 1910. Le mouvement part des usines Ford qui en 1908 produisent les premiers une voiture en grande série = la Ford T. En France, grande patrie de l’automobile européenne, André Citroën lance en 1919 la Torpedo A 10 CV, première voiture française produite en grandes séries. Ce changement d’échelle dans ce secteur d’activité est rendu possible par des innovations dans le mode de production. En 1912, Frédéric Taylor, un ingénieur américain publie les Principes d’organisation scientifique des entreprises. Ses expérimentations sur la parcellisation du travail, la réduction des temps inutiles, ses nouvelles fixations de normes de production en fonction de la rentabilité et de la productivité sont tout de suite adoptées par les chefs d’entreprises les plus novateurs. C’est dans l’automobile, couplé avec la mécanisation, que le taylorisme est d’abord appliqué (1913). La chaîne est née, d’abord dans les usines Ford, puis vite adoptée partout ailleurs. Les ateliers s’agrandissent jusqu’à devenir gigantesques : Dans les années 30, à l’usine Ford de Red River, 80 000 ouvriers travaillent ; chez Renault ; 25 000 employés ; chez Citroën, l’usine parisienne du quai de Javel s’étend sur 90 hectares. Les voitures ne sont plus seulement des objets de luxe, façonnées par des ouvriers spécialisés amoureux de leur métier. Elles deviennent essentiellement des objets standardisés, de conception assez simple, destinés à une consommation de masse. La Ford T est produite à une moyenne de un million d’exemplaires par an. Ceci caractérise la 2nde révolution industrielle et la différencie de la 1ère révolution.
Ceci dit, les modèles doivent tout de même évoluer et le secteur automobile est porté par des innovations permanentes : en 1922, la Citroën B-12 est la première voiture au monde dotée d’une carrosserie monopièce en acier. En 1934, la Citroën 7 CV est la première traction avant : sa suspension et ses roues indépendantes en font une voiture d’une « conception entièrement nouvelle ».
La révolution des modes de production dans le secteur automobile s’explique par la nécessité pour les chefs d’entreprise d’adapter leur activité à une concurrence extrêmement forte. On compte aux Etats-Unis, déjà avant la 1ère guerre mondiale, pas moins de 7 marques différentes qui se partagent le marché intérieur. Le marché étant tout de même encore limité, le secteur était donc très concurrentiel : les marques automobiles sont obligées d’innover dans tous les domaines si elles veulent survivre. Les modernisations productives permettaient donc de produire plus, plus vite (650 tractions avant sortent tous les jours des usines Citroën en 1934) et moins cher. L’argument du prix devient en effet primordial. Les ventes de la Ford T ont commencé à décoller quand son prix a baissé de 850 $ en 1909 à 550 $ en 1915.
Pour ces mêmes raisons, les industriels automobiles innovent dans les méthodes de vente et de marketing. Ils utilisent massivement la publicité pour se vanter leurs produits (forcément plus rapides, plus confortables que les autres …) et se différencier de la concurrence. En France, André Citroën fait figure de pionnier : il invente la communication événementielle avec les « croisières » noire (1924) et jaune (1933) : parce que les voitures de cette marque se sont montré capables de traverser les continents africain et asiatique, elles acquièrent de ce fait une réputation de robustesse et de fiabilité. De plus, ces événements associent à la marque des valeurs positives comme l’aventure et l’exotisme si en vogue en ces temps d’expositions coloniales. Pour ancrer encore davantage la marque dans l’esprit des futurs consommateurs, Citroën a aussi l’idée en 1925 d’illuminer la tour Eiffel, monument patrimonial français et symbole de modernité industrielle, avec des lettres de 30 mètres de haut à son nom. Enfin, comme toutes les autres marques d’ailleurs, il dote ses voitures d’un logo facilement identifiable, les doubles chevrons renversés.
Toutes ces innovations marketing permettent le passage à une consommation de masse. Ford le premier avait d’ailleurs mis en place une politique salariale élevée (5$ par semaine) pour permettre à ses propres ouvriers d’économiser et d’accéder au crédit pour acheter leurs voitures. Cette politique connue sous le nom de Fordisme n’est pas immédiatement reprise par les autres constructeurs qui, eux, continuent longtemps à payer mal leurs salariés à la pièce, mais elle préfigure ce qui se fera de façon massive après la 2nde guerre mondiale, dans tous les secteurs industriels d’ailleurs. D’une autre manière, mais pour obtenir les mêmes résultats, le directeur de General Motors, entre 1923 et 1956, « planifie l’obsolescence [des modèles] et les politiques de prix » permettant de faire changer les goûts des consommateurs tout en leur donnant la possibilité de changer de voiture assez souvent.
            Enfin, les politiques industrielles et financières des groupes automobiles sont elles aussi des modèles pour les autres secteurs industriels. Le cas de General Motors est à bien des égards exemplaire. Le fondateur William Durant en fait, presque dès sa création, une société par actions, côtée en bourse. Ce système lui permet  d’obtenir des fonds propres, sans dépendre des banques, et avec l’avantage que, si son entreprise fonctionne bien, le cours de ses actions montant, son capital grossit de façon automatique. Mais les besoins en capitaux sont si importants qu’il doit tout de même emprunter à des banques d’affaires 15 millions de $ en 1909. Il perd son indépendance (les banquiers entrent au conseil d’administration et peuvent nommer le PDG : d’ailleurs ils « démissionneront » Durant en 1910) mais il gagne en puissance financière. Cette puissance lui permet de poursuive ses opérations de concentration industrielle. Entre 1908 et 1910, GM devient un groupe détenant plusieurs marques automobiles qui se complètent plutôt que de se concurrencer. La concentration est aussi verticale, avec le rachat de fournisseurs de composants et de fabricants de camions. Par ailleurs, la taille, la puissance financière et industrielle du groupe lui permet d’être en position de force dans ses rapports avec les pouvoirs publics et donc d’obtenir l’octroi de marchés avantageux : le remplacement des tramways par des bus par exemple. Pourtant, cette puissance n’est parfois pas suffisamment importante pour éviter d’être intégré à des holding détenu par de riches familles capitalistes industrielles venues d’autres secteurs comme les Dupont de Nemours, qui ont fait leur fortune dans la chimie, ou comme A. P. Sloane, l’industriel du roulement à billes.

Au total, nous avons effectivement montré que le secteur de l’industrie automobile fut particulièrement innovant, tant dans le domaine de la production et des innovations, que dans celui de la commercialisation, du marketing et des opérations financières. Ces avancées sont le fait de capitaines d’industrie caractéristiques du premier âge capitaliste et qui utilisent tous les moyens que l’économie moderne met à leur disposition. Leurs groupes industriels tirent la croissance des économies des pays occidentaux. La révolution automobile qu’ils initient change aussi considérablement les paysages et les modes de vie des sociétés modernes.



Identifier les différentes étapes formelles de l'exercice
puis reconstituer le plan détaille.

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