Les objectifs sont multiples :
- fournir aux élèves des images concrètes, passer par les ressentis pour leur faire comprendre l'importance du traumatisme causé par les conséquences sociales de la plus grave crise économique du XXe siècle,
- réactualiser avec eux les fondements de l'analyse marxiste de l'économie capitaliste,
- poser, si nécessaire, les bases de l'analyse filmique,
- leur faire comprendre que tout peut être source pour l'historien.
On commencera par présenter l'oeuvre de Steinbeck et le film de J. Ford. S'appuyer éventuellement pour cette présentation sur les supports proposés par le dossier 187 de "Collège au cinéma".
En version courte, il faut insister sur le fait que le livre comme le film sont contemporains des années de crise (film de Ford date de 1940) et que Ford fut considéré comme un cinéaste du New Deal.
Puis rapide présentation de l'argument : Après avoir purgé une peine de prison, Tom Joad (Henri Fonda) revient dans la ferme familiale alors que la crise de 29 ruine tout le pays et qu'une grave sécheresse achève d'expulser les paysans de "leurs" terres. Avec les siens, il décide de partir en Californie dans l'espoir de trouver du travail comme ouvriers agricoles.
Analyse de plusieurs séquences du film
1° Une crise économique absurde aggravant la violence sociale.
Extrait scène 5 dans le découpage du DVD (de 12 min à 18 min : le flash back du voisin)
Que se passe-t-il ? Quelle est la condition sociale de cette famille paysanne ?
En quoi cette scène est une critique du système ?
=> assez facilement (et le prof structurera) les élèves en disent que c'est une critique du droit de propriété (propriété d'usage "les tombes des ancêtres" contre "papiers avec des écritures"), que la mécanisation dévalorise le travail de l'homme, que la toute puissance de l'argent/manque d'argent déshumanise les rapports humains + la question de la responsabilité individuelle dans ce système économique (qui est responsable ?)
Bilan : c'est la fin d'un monde
Dernière question sur les procédés proprement visuels, filmiques qui indiquent et renforcent cette idée de fin du monde (jeu sur les ombres, bande son...)
apport extérieur (du prof) pour compléter les relevés d''analyse de la scène : explication du système du fermage + Dust Bowl
synthèse rédigée à distribuer aux élèves
On complètera avec l'extrait du livre ci dessous
Doc
: L’absurdité de la crise
« Des hommes capables
de réussir des greffes, d’améliorer les produits, sont incapables de trouver le
moyen pour que les affamés puissent en manger (…)
Le travail des hommes et
de la nature doit être détruit pour que se maintiennent les cours, et c’est là
une abomination qui dépasse toutes les autres. Des chargements d’oranges jetés
n’importe où. Les gens viennent de loin pour en prendre, mais cela ne se peut
pas. Pourquoi achèteraient-ils des oranges à 20 cents la douzaine, s’il leur
suffit de prendre leur voiture et d’aller ramasser pour rien ? Alors les
hommes armés de lances d’arrosage aspergent de pétrole les tas d’oranges, et
ces hommes sont furieux d’avoir à commettre ce crime et leur colère se retourne
contre les gens venus ramasser les oranges. Un million d’affamés ont besoin de
fruits, et on arrose de pétrole les montagnes dorées. Et l’odeur de pourriture
envahit toute la vallée (…)
Il y a là un crime si
monstrueux que cela dépasse l’entendement. Les enfants atteints de pellagre
doivent mourir –de sous nutrition- parce que chaque orange doit rapporter un
bénéfice. »
John Steinbeck, Les
raisins de la colère, 1939, 1947 pour l'édition et la traduction française.
- Présenter
le document et expliquer le qualificatif "roman social".
- Relever,
nommer et expliquer les aspects économiques de la crise
- Relever,
nommer et expliquer les aspects sociaux de la crise
- Justifier
le titre en reformulant l’idée principale du texte.
- Montrer
que la crise et le système économique en général délite les rapports
sociaux.
2° Libéralisme versus socialisme : face à la crise des choix moraux et des choix de société
Plusieurs scènes qui se répondent et se complètent :
Extrait scène de l'arrivée dans le camps Hooverville (scène 13 à 1H04 jusqu'à la fusillade)
Identifiez les habitants de ce camps (qui sont-ils ? pourquoi sont-ils là ? comment survivent-ils ?)
Pourquoi le début de la scène n'a aucun dialogue ? Quel est l'effet recherché ?
Qu'auriez-vous fait à la place de Ma Joad ? (scène du repas)
Comment est construite (image et son) l'opposition habitants du camps/sheriff ?
Pourquoi l'homme qui proteste est qualifié d'agitateur ?
Extrait 3 l'arrivée au Ranch jusqu'au dialogue Casey/Tom Joad (scènes 15 et 16 : de 1H16 à 1H26)
En général, les élèves ne comprennent pas ce qu'il se passe devant le Ranch (lock-out) car ils ne font pas le lien entre la fin de la séquence et son début. Ne pas hésiter à leur apporter cet élément de réponse
Quelles sont les conditions de travail au Ranch ? Pourquoi peut-on affirmer que les ouvriers agricoles se font exploiter ?
=>Au prof de faire le lien avec les explications économistes et notamment marxistes : salaire/temps de travail ; appropriation de la valeur ajoutée / salaire versé ne permet que de reconstituer sa force de travail / prolétariat
Quand Tom Joad retrouve Casey, on comprend que le Ranch recrute car les ouvriers précédents se sont mis en grève. Quelle est la conséquence directe de cette grève sur les salaires ? Pourquoi ?
=>Fonctionnement du marché du travail, les prolétaires mis en concurrence. Prolonger sur les conditions de succès de ce mouvement et discuter autour de la réponse de Tom Joad ("tout ce qu'ils voient, c'est 5$ aujourd'hui")
3° L'Etat social ou la révolte ?
Extrait 4 : L'arrivée au camps fédéral (scène 18 )
5 minutes pour opposer ce camps et celui vu précédemment. Quel est le message ?
Extrait 5 : la scène finale
Expliquer aux élèves pourquoi Tom Joad doit partir.
Les deux fins / En quoi la 2e fin imposée par le studio rend le ton plus optimiste, mais désamorce la portée révolutionnaire de la première fin ?
Conclure sur les récompenses obtenues par le livre comme le film et ouvrir sur le titre de Bruce Springsteen, the ghost of Tom Joad, qui témoigne de l'actualité des thèmes abordés par le film.