jeudi 9 avril 2020

Humanisme et réforme : cours 2nde

Repère chrono : Epoque moderne = XVIe siècle jusqu’à la révolution française. Les 15e siècle (en Italie) et 16e siècle (pour toute l’Europe) sont appelés « Renaissance ». Comme le nom l’indique, il s’agit d’une période où les changements de société sont visibles pour les contemporains parce qu’ils sont importants et rapides. Les hommes de la Renaissance se rendent compte qu’ils sont sortis des « temps obscurs » de la fin du Moyen Age (guerres, peste, famines, troubles …)

Thèses du cours : La Renaissance est une époque de rupture avec le Moyen Age, marquée par l’idée de progrès. Pourtant, malgré les progrès intellectuels, économiques (chapitre suivant), artistiques, la Renaissance reste une période de crises, du fait de l’intolérance des hommes et des sociétés de l’époque.
Manuel (Hachette) pp.134 à 159 + EDC pp.168-169

Fiche d’activité 1 : les grands repères de la Renaissance pour découvrir le chapitre dans le manuel

I/ Une nouvelle conception du monde à partir de la renaissance
A) La philosophie humaniste : une nouvelle manière de concevoir les rapports de l’Homme et du monde
Il y a deux grandes « causes » à l’essor de l’humanisme
  • Point de départ = 1453, prise de Byzance par les Turcs seljoukides => arrivée, avec leurs manuscrits, des lettrés de l’empire byzantin => en occident, découverte de nouveaux auteurs grecs (Platon par exemple), essor de l’étude du grec (p. 140, Erasme, surnommé le « prince des humanistes » enseigne le grec).
  • Un facteur d’expansion des idées nouvelles : l’imprimerie, mise au point à Mayence par Gutenberg vers 1450. Regardez la carte p. 136 sur la diffusion des ateliers d’imprimerie en Europe. Vous constatez qu’on les retrouve partout où il y a des lieux d’enseignement et de diffusion des idées humanistes. L’imprimerie rend le livre plus abordable c’est-à-dire moins rare et moins cher. Alors qu’au MA, le livre est un objet de luxe accessible aux seuls évêques et abbayes qui ont le quasi monopole de la culture, avec l’imprimerie, les laïcs aisés mais pas forcément très riches, vont pouvoir s’acheter des livres et donc accéder à la culture. La Renaissance est un phénomène qui ne concerne qu’une élite. Mais cette élite est plus large qu’au MA .
Naissance d’un nouveau courant de pensée = les philosophes humanistes qui tentent de concilier les valeurs chrétiennes avec les nouvelles idées généralement issues de la philosophie grecque. La définition se trouve à la page 135
Quelles sont les idées humanistes ?

1) En matière de religion, c’est la remise en cause des certitudes catholiques
a) Par exemple beaucoup d’humanistes sont aussi des philologues = ils recherchent des manuscrits oubliés dans les bibliothèques, les font imprimer, étudient les textes, les comparent et essaient de restaurer la version originale déformée par les traductions. Comme ils ont désormais accès à des textes grecs de la Bible, ils reprennent la traduction de St Jérôme (doc 1p.134) et ils constatent des erreurs. => la possibilité de critiquer les textes sacrés les désacralise.
Lire le doc 1 p. 140 sur Erasme qui entreprit de re-traduire tout le Nouveau Testament. Quelle est sa méthode ?
Lire la suite du texte. Erasme veut que le texte de la Bible soit traduit en toutes les langues (jusqu’alors seul le texte en latin de St Jérôme qu’on appelait la Vulgate était disponible, or à part le clergé et l’administration royale, personne ne maîtrisait le latin). Pourquoi Erasme veut traduire la Bible en « langue vulgaire » (français, anglais, allemand, italien …). Relever la phrase de sa lettre dans laquelle il explique pourquoi il veut que « les plus humbles lisent les Evangiles »
« la religion chrétienne ne peut pas se fonder sur l’ignorance », dit-il dans un autre passage => c’est un premier pas vers un rapport autonome, intime à Dieu et vers la libre-pensée. Le clergé catholique n’est plus le seul à pouvoir commenter les textes sacrés, chacun peut le faire pour lui-même. En faisant ceci, les humanistes préparent le terrain pour la Réforme protestante, ce que nous verrons plus tard dans le cours.
Remarque : Les bibles traduites sont les premiers best-sellers de la toute nouvelle imprimerie.
b) Il y a aussi une nouvelle manière de concevoir les rapports entre l’être humain et Dieu, ainsi que l’être humain au sein de la création.
Doc Leonard de Vinci (homme de Vitruve) image 3 p.142 + texte Pic de la mirandole = Préparer la fiche d’activité 2

[ Comme pour la fiche d'activité 1, je suis partie de la base fournie par Corine Mathieu sur le site de l'académie de Guyanne. Corine Mathieu est la reine des powerpoint, je vous recommande ++ ses productions qui sont à la fois hyper-soignées et très efficaces]

A propos du texte Pic de la Mirandole
Quelle sont les préoccupations de ces philosophes ? Il s’agit de questions éternelles et fondamentales : qui sommes-nous ? Que faisons-nous sur cette planète ? Est-ce que la vie a un sens ?...
·      En premier lieu , il y a la place de l’homme dans l’univers. Les grecs ont apporté à cette question des réponses qui n’ont (forcément !) aucun rapport avec la vision catholique et la redécouverte de leurs textes permet donc de renouveler le débat sur cette question.
Pic de la Mirandole, l’homme qui représente sans doute le mieux l’esprit de la renaissance humaniste, place l’être humain au sommet de la création : « Je t’ai placé au centre du monde ». Conçu en dernier, l’Homme est la plus parfaite des créatures de Dieu parce qu’elle possède « (le) désir et (le) jugement » c’est-à-dire la volonté et la raison. Elle est donc sur terre pour dominer le reste de la création divine, c’est-à-dire le monde. L’Homme peut user du monde (la nature) comme il lui plaira : « ...afin que tu puisses avoir et posséder, selon ton désir et ton jugement, la place, la forme et les fonctions que tu désireras ». On retrouve les 2 mêmes idées chez L. de Vinci. Lui aussi cherche à comprendre « le mystère de la nature humaine » et lui aussi pense que l’Homme peut, par sa curiosité, par sa réflexion, satisfaire sa « volonté de puissance »  et « dompter le monde ».
·      De ce premier point découle logiquement l’analyse des rapports entre l’Homme et Dieu.
Comme Pic de la Mirandole le dit , « l’Artisan voulut une créature capable de concevoir le plan d’une si grande création, d’aimer sa beauté et d’admirer sa grandeur ». Les humanistes pensaient que puisque l’être humain est capable de comprendre le fonctionnement de la nature, qui est une création de Dieu, il est alors aussi capable de comprendre une petite partie des volontés de Dieu. De plus il doit être capable d’atteindre l’élément divin qui est en lui. D’ailleurs, à l’image de Dieu, il crée lui aussi des mondes et des machines. Dans son Traité de la peinture, L. de Vinci se voit lui-même comme un petit dieu : «  Si le peintre veut voir des beautés capables de lui inspirer l’amour, il a la faculté de les créer, et s’il veut voir des choses monstrueuses qui font peur, ou bouffonnes pour faire rire, ou encore propres à inspirer la pitié, il est leur maître et leur dieu ».

Bilan de la fiche d’activité. Pour les humanistes, l’espèce humaine n’est plus écrasée par le péché et par sa petitesse face à Dieu. L’Homme est à l’image de Dieu, le monde est son royaume. Platon et d’autres philosophes ont montré la voie d’une démarche rationnelle, quasi mathématique pour comprendre et dominer le monde. La foi religieuse devient une préoccupation déconnectée de la démarche scientifique de compréhension et de conquête du monde. C’est ce qui permet les progrès scientifiques nombreux à partir de la Renaissance (voir suite du cours)



2) Les humanistes rêvent d’un monde idéal = C’est une philosophie positive qui croit au progrès
Naissance des utopies : cf L’Utopie (en grec = le lieu qui n’existe pas) est un livre de Thomas More paru en 1516 => invention d’un monde qui n’existe pas mais qui propose un autre modèle de société. Il y a donc une dimension critique de la société du temps de l’auteur et une réflexion sur ce que doit être un bon gouvernement.
Le Prince (par le florentin Machiavel en 1513) prétend dresser la liste des règles pour un bon gouvernement. Le bon prince doit être efficace et savoir prendre en compte les rapports de force pour les équilibrer afin de protéger son Etat et son peuple, au besoin en ne respectant pas la morale chrétienne. Machiavel justifie le pouvoir des tyrans du XV et XVIe siècle (la fin justifie les moyens => machiavélisme). Il est le premier penseur à dissocier le pouvoir de la religion et de la morale. Au contraire Erasme insiste sur la nécessité morale du pouvoir (dans Eloge de la folie, 1514 et surtout L’institution du prince chrétien, 1516).
Contextualisation : comme nous le verrons dans le thème 3, le XVIe siècle est une période où les Etats royaux (et donc le pouvoir royal) s’affermissent en prônant de plus en plus l’absolutisme, organisent une administration plus ample et surtout développent une société de cour : le prince est aidé dans sa tâche par les courtisans (def de « cour » p. 174), nouvelle élite qui n’est pas forcément noble, mais qui se met au service de l’Etat.

ð  Les humanistes réfléchissent sur la réalité politique qui les entoure et les causes de la floraison des mauvais gouvernements et ils proposent aussi des modèles de gouvernement idéal. 


Les humanistes se préoccupent aussi d’enseignement : comment former des esprits libres pour bâtir la société idéale ?
Texte Rabelais + doc 3p.147 : L’éducation humaniste est extrêmement ambitieuse et s’adresse aux futurs courtisans. C’est une rupture avec la méthode médiévale qui était essentiellement faite de commentaires de textes préexistants et d’apprentissage par cœur et qui divisait les domaines d’enseignement. Ici, il s’agit de former l’esprit critique par une culture plus universelle (langues antiques parfaitement maîtrisées, sciences de la nature, médecine, philosophie, théologie…), par l’accompagnement de la curiosité de l’enfant et par une éducation qui cherche à former un lien harmonieux entre le corps et l’esprit (mens sana in corpore sano : c’est une citation de Juvenal, auteur latin) tout en respectant la morale (« science sans conscience n’est que ruine de l’âme », Rabelais dans Pantagruel)
Mais attention, seuls les fils de bonne famille (nobles ou bourgeoises) profitent de cette éducation.
Remarque : cette préoccupation se retrouve dans le discours de François 1er sur l’utilité de l’enseignement. « Nous sommes persuadés que ces bonnes études produiront dans notre royaume des théologiens qui enseigneront les saines doctrines de la religion ; des magistrats qui exerceront la justice non avec passion mais avec un sentiment d’équité publique ; enfin des administrateurs habiles (...) qui sauront sacrifier leur intérêt privé à l’amour du bien public ». En bref, François Ier affirme qu’en protégeant les humanistes et en développant leur enseignement auprès des jeunes élites du royaume, il travaille au bien de la France en la dotant de futurs agents de l’Etat capables et dévoués.

3) La République des Lettres
Les nouvelles idées circulent grâce à l’emploi par tous d’une langue commune, le latin et à l’imprimerie qui permet l’accès aux livres nouveaux plus facilement. Les humanistes et hommes de science circulent aussi à travers l’Europe, allant de villes en villes (souvent là où se trouvent des imprimeurs comparer carte p. 136 et carte des voyages d’Erasme p. 140) et de cour en cour, invités par des princes mécènes. Cette circulation des hommes et des idées, qu’on a appelé « république des lettres » permet l’émergence de débats contradictoires et animés qui sont facteurs de progrès intellectuel et scientifique.





B) Une nouvelle manière de représenter le monde
1) un art plus réaliste : l’art comme témoignage
Représentation réaliste du corps humain , des paysages, des situations
Comment ? = nouvelles techniques (voir le dossier p.137 : art médiéval/art de la Renaissance . A compléter  par le Fra Angelico et ses predelles -fiche wikipedia ici- pour le passage de l’art médiéval « Gothique International » à l’art de la Renaissance, passage qui se fait en Italie avec les innovations picturales des Siennois et des Florentins)
  • Plusieurs plans dans l’image = perspective (d’où de nombreux décors architecturaux qui permettent les lignes de fuite), sfumato (perspective chromatique : un paysage en arrière-plan dans les tons froids renforce l’illusion de la profondeur)

Explication des techniques de la perspective à partir du tableau de Piero della Francesca, la ville idéale, 1485-1492 ?



R) Ce tableau est intéressant à plus d’un titre : il permet de montrer les procédés de perspective, le retour à l’antiquité latine (temple central /baptistère, intérêt pour la ville comme lieu de la civilisation et du progrès : policie/policé/politeia/ polis) et d’évoquer l’essor urbain qu’a connu l’Italie puis toutes les villes européennes ayant profité, à partir du XIIIe siècle, du grand commerce international. Il montre aussi les transformations des villes (palais urbains, comme sur le tableau cf palais des Medicis à Florence), pavage des rues, élargissement des voies … Enfin, c’est une ville idéale, donc cela renvoie aux utopies de la renaissance + cf la ville de Pienza, réorganisée par le cardinal Piccolomini, futur pape Pie II (1464)

  • Une représentation plus dynamique = des mouvements, des jeux de regards…. Les tableaux comme les sculptures identifient des individualités et racontent une histoire grâce à une composition savante.
Tableau de L. de Vinci, Ste Anne, vers 1500
Faire repérer aux élèves la perspective colorée, la perspective mathématique (ligne de fuite => arbre plus petit que les personnages du 1er plan), la composition en triangle du groupe de personnage (symbolisme du triangle = perfection des proportions par l’utilisation du nombre d’or, renvoi à la Sainte Trinité, élévation de la terre vers le ciel donc symbole du sacré et de l’élévation de l’âme)
Ensuite repérer les jeux de regards, les gestes => quelle est la scène représentée ?
Ensuite identifier les personnages (expliquer que la Vierge est, depuis le Moyen Age, identifiée par sa robe rouge et sa cape bleue) : Ste Anne, mère de la Vierge, la Vierge et l’enfant Jesus.
Enfin, comparer les expressions, les gestes de la Vierge avec une représentation médiévale d’une madonna col bambino






Duccio di Buoninsegna pour la cathédrale de Sienne, Maesta (Vierge en majesté) 1308-1311.
Alors qu’au MA, l’objectif des peintres est de montrer à travers cette scène à la fois l’adoration de Jésus en tant que fils de dieu mais aussi la prescience chez Marie et chez l’enfant Jésus de la crucifixion => attitude hiératique et regard triste + Jésus n’est pas représenté en enfant, mais comme un adulte en miniature.

  • Peinture à l’huile. Son adoption permet un plus grand réalisme grâce aux ombres et aux nuances. Sur le tableau de L. de Vinci (Ste Anne comme la Joconde), l’utilisation de la peinture à l’huile permet de ne pas dessiner les contours des personnages, mais de les modeler par le jeu des ombres et des lumières.



Les artistes s’attachent à montrer les sentiments humains et les passions sur les visages, ce qui est nouveau par rapport au MA. et même à l’Antiquité. « Nous autres peintres, nous voulons par les mouvements du corps, montrer les mouvements de l’âme » ( Léon Battista Alberti 1435). Dans ce domaine, les artistes du XVIe siècle dépassent en réalisme ceux du XVe s. Leur peinture est plus expressive.

2) Des nouveaux thèmes (quelques exemples)
On comprend avec les exemples qui précèdent que l’art se libère des codes religieux : si l’on n’hésite plus à représenter Jésus comme un charmant bambin ordinaire, alors tout devient possible !
- L’Antiquité est une source d’inspiration nouvelle. Les artistes de la Renaissance reprennent volontiers des images, des personnages, des situations issus de la mythologie. Dans le célèbre tableau de Botticelli, la primavera (le printemps) réalisé à Florence entre 1478 et 1482, on retrouve cette influence antique. Un petit amour volette au centre du tableau , 3 jeunes femmes qui font penser aux 3 Grâces sont en train de danser ; à l’extrémité droite du tableau, un homme bleu, les joues gonflées (sans doute un dieu du vent, un vent d’hiver...) tente d’enlever une autre jeune femme.

- Le corps humain : Le même Botticelli est l’auteur du 1er nu féminin de la période (La naissance de Venus, 1485). En grandeur nature, au centre du tableau, la déesse de l’amour, Aphrodite, née de l’écume de la mer, s’apprête à poser pied sur la terre. Elle est représentée comme une statue grecque (même pâleur de la peau qui évoque la pierre blanche des statues, même posture déhanchée). Le nu devient un thème majeur des artistes de la Renaissance, leur permettant de mettre en valeur la perfection du corps humain et la précision de leur technique picturale (encore une fois, on retrouve cette volonté d’un art réaliste, d’un art du détail : carnation, musculature …)

=>Même si la Bible reste une source privilégiée d’inspiration, l‘art se libère partiellement de l’emprise de la religion catholique.

- L’art du portrait (voir p. 143). Alors qu’au Moyen Age, les portraits sont rares et réservés aux princes et princesses (portraits de fiançailles et mariage, scènes enluminées de dédicace des livres, profils royaux sur les monnaies …), le portrait se démocratise et se transforme. Qui est la Joconde par exemple ? Une jeune épouse qui vient de donner un fils à son marchand de mari et celui-ci est si content qu’il demande à Léonard de Vinci de peindre sa femme. Alors que seuls les dieux et les rois pouvaient être représentés de face et que le commun des mortels était forcément représenté de profil, les portraits de la renaissance se tournent de ¾ puis finissent par regarder le regardeur (nous) directement dans les yeux. D’ailleurs, on trouvera souvent dans les compositions de groupe un ou plusieurs personnages qui accrochent du regard le regardeur de la fresque (cf Ecole d’Athènes). Ce jeu regardeur/regardé est comme une main tendue, un lien entre les deux réalités, celle du tableau et celle du monde réel dans lequel se tient le regardeur. Ce jeu fait du cadre du tableau une fenêtre vers une autre réalité qu’on nous invite à regarder.



3) Liens privilégiés entre les artistes et leurs commanditaires => début du mécénat
En ce qui concerne les « clients » des humanistes et des artistes, les documents nous permettent de dire qui ils sont : soit des princes comme François Ier et Laurent le Magnifique à Florence, soit de riches bourgeois. Curieux, amateurs d’art, ils cherchent à embellir leur vie quotidienne, à fixer les images des moments importants de leur vie ou des êtres chers. L’art et la culture sont aussi pour eux un moyen d’affirmer leur position sociale. C’est un signe de leur richesse et de leur éducation. Les artistes sont, et ce n’est pas nouveau, au service des princes pour en exalter le pouvoir. L’artiste est au service de la propagande des hommes de pouvoir. Du point de vue des princes, patronner des artistes (leur passer des commandes, les avoir à leur service) est une manière incontournable d’affirmer ses vertus personnelles (magnificence, sagesse, science…). La représentation de la cour est une mise en scène qui affirme au reste du monde la gloire de son prince et renforce sa légitimité. Ainsi les princes s’arrachent les meilleurs artistes : ce qui est donc nouveau à la Renaissance, c’est le statut de l’artiste qui devient une « célébrité » : ils signent leurs œuvres et n’hésitent pas à se représenter eux-mêmes dans leurs tableaux (cf Ecole d’Athènes). De plus en plus nombreux sont les grands artistes qui,  à partir du XVIe siècle, sont anoblis par leur mécène, tel le Titien anobli par Charles Quint en 1533.

 Activité groupe pour réinvestir et approfondir en classe (virtuelle en l’occurrence) : Analyse de l'école d'Athènes de Raphaël. Comptez 1H30

= Peut-on comprendre le monde ? retour à l’Antiquité, ouverture aux sciences
+ mécénat + évolution des codes artistiques


C) L’essor d’un nouvel esprit scientifique et technique – XVI°->XVIII° siècle
De façon logique, le 16e siècle marque aussi le début de progrès scientifiques et techniques qui vont propulser la civilisation européenne au rang de civilisation dominante au niveau mondial car ils permettent la colonisation (voir leçon suivante)

1)    Méthodes et domaines de recherches
Ici encore, il s’agit d’une rupture avec le Moyen Age, car dans la droite ligne des idées humanistes, les savants du XVIe s privilégient l’étude de la nature et du corps humain, selon une méthode empirique (partir des observations pour déduire les éléments de compréhension) et sans a priori religieux.

Par exemple, en médecine, l’anatomie profite des dissections des cadavres, en bravant les interdits religieux, ainsi que de la médecine de guerre sur les blessés.
Exemple développé : Vésale, père de la médecine moderne ?
Eléments biographiques
  •        1533-1536 : Etudie la médecine à Paris. Y reçoit l’enseignement strictement inspiré de Galien.
  •      1537 : Est reçu Docteur de l’Université de Padoue, est nommé professeur d’anatomie et de chirurgie. L’Université de Padoue soutient les innovations et idées nouvelles.
  •      1543 : Publie à Bâle du livre De humani corporis fabrica (663 pages). Il y dénonce environ 200 erreurs de Galien.
  •     1544 : Devient médecin de l’empereur Charles Quint et l’accompagne dans ses déplacements.

Doc 1: Une critique des pratiques traditionnelles
L’abandon aux barbiers de toute la pratique fit non seulement perdre aux médecins toute connaissance réelle des viscères, mais aussi toute habileté dans la dissection. Cependant, les barbiers à qui ils avaient abandonné la technique étaient tellement ignorants qu’ils étaient incapables de comprendre les écrits des professeurs de dissection […]. Dans les Ecoles*, on confie aux uns la dissection du corps humain pendant que les autres commentent les particularités des organes. Ces derniers, à la façon des geais, parlent de choses qu’ils n’ont jamais abordées de près, mais qu’ils ont prises dans les livres […]. Les autres sont tellement ignorants des langues** qu’ils ne peuvent fournir aux spectateurs des explications sur les pièces disséquées. Ainsi tout est enseigné de travers ; les journées passent à des questions ridicules et, dans tout ce tumulte, on présente aux assistants moins de choses qu’un boucher, à l’abattoir, ne pourrait en montrer à un médecin.
André Vésale, La Fabrique du corps humain, 1543
* Ecole de médecine ** langues anciennes : latin, grec
1) Relever dans le texte les deux critiques essentielles de Vesale sur l’enseignement de la médecine du corps humain. (Pour vous aider, la critique repose sur le constat d’une séparation des domaines de compétences entre théoricien -professeurs- et praticiens -barbiers-)

Doc 2 : Planches anatomiques
1)      Comparer les deux planches anatomiques (à gauche, médecine traditionnelle / à droite médecine nouvelle) : que constatez-vous ?
2)      Comment expliquait-on le fonctionnement du corps humain au Moyen Age (planche de gauche)

  
Doc 3 : la leçon d’anatomie du Dr. Tulp, Rembrandt, 1632 (manuel p.224)



Ce tableau montre que le public bourgeois est curieux de ces innovations scientifiques. L’intérêt pour les sciences est le même que celui pour les arts (c’est aussi un moyen de distinction sociale par exemple). Aussi les publications scientifiques se développent et il est bon de posséder des livres de science dans sa bibliothèque.
Les rois et princes soutiennent le plus souvent la recherche scientifique et au XVIIe siècle, ils l’organisent en créant des Académies. Par exemple, sur le modèle italien, Louis XIV fonde l’Académie de danse (1661), l’Académie de musique (1669), l’Académie d’architecture (1671) s’ajoutent à l’Académie française (1635) et à l’Académie de peinture et de sculpture, créée en 1648, réformée par Colbert en 1663.  La création de l’Académie des sciences en 1666 s’intègre dans ce grand projet de la monarchie absolue visant à placer l’ensemble de la vie culturelle sous sa tutelle, d'autant que Colbert a compris que les progrès scientifiques pouvaient se traduire en progrès techniques capables d’accroître la puissance de la France tout en exaltant la gloire du roi. manuel p.232

Exemple n° 2 : les cartes géographiques

Doc 1 : Le monde connu en 1492 Le globe de Martin Behaim (1492)




Réalisé en 1492, le globe de Martin Behaim, commerçant et cartographe allemand, est le plus ancien globe terrestre connu. Il reflète la vision du monde des Européens à la fin du Moyen Âge, avant la découverte de l’Amérique. A consulter en 3D dans Gallica => https://c.bnf.fr/CnE 
Les Globes étaient à la fois des objets de science et des objets de luxe : Objets coûteux et prestigieux, les globes terrestres peints sont produits majoritairement en Hollande au XVIIe siècle et en Italie. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, profitant de l'engouement pour les voyages d'exploration, le globe devient un objet plus familier.

Jusqu'au milieu du XVIe siècle, plusieurs concepts de Terre coexistent sans fusionner : à la fois un élément qui, avec le feu, l'eau, l'air, entre dans la composition de toute chose et une création de Dieu donc objet de la théologie; enfin, comme la demeure des hommes, elle est souvent représentée de façon carrée (les 4 points cardinaux). Le XVIe siècle voit l'apparition d'une conception géographique unifiée de la Terre. Celle-ci est à la fois pensée, décrite et perçue comme Terre universelle, comme surface parcourable et mesurable. Les cartes se précisent et utilisent de plus en plus des outils mathématiques : lire par exemple la détermination de la latitude et de la longitude sur la fiche wikipedia :
(= doc 2)

Fiche d’activité en autonomie à partir du site : (Questionnaire : activité Magnard)


Remarque : compléter le cours en lisant le manuel pour les progrès scientifiques aux XVII et XVIIIe siècles = à partir de la p. 225

 2) La confrontation avec l'Eglise

Cependant, les progrès scientifiques se heurtent parfois à l’intolérance de l’Eglise catholique. Certes, il y a des cardinaux, comme d’autres grands seigneurs, qui sont mécènes et très favorables aux innovations dans les Sciences et les Arts. Mais l’Eglise catholique est sur la défensive (voir suite du chapitre) car elle répond aux critiques du Protestantisme. Elle utilise donc les outils traditionnels, hérités du Moyen Age, de lutte contre l’hérésie pour condamner les idées scientifiques ou humanistes qui contredisent le dogme. Le tribunal de l’Inquisition est à la manœuvre (il a été créé en 1233) pour intimider les savants et la censure permet de réduire la diffusion des idées nouvelles (ouvrages interdits sont mis à l’Index = catalogue de l’Eglise qui recense les livres interdits)

fiche d'activité Galilée ou manuel p.228-229

1564 : naissance de Galilée à Pise

1592 : enseigne à l’université de Padoue les mathématiques et l’astronomie selon le système de Ptolémée.
1609 : perfectionne une lunette apportée par un artisan hollandais.
1610 : publie le résultat de ses observations dans Le messager des étoiles.
1632 : défend la thèse de Copernic dans son livre Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, celui de Ptolémée et celui de Copernic écrit en italien.
1633 : condamnation de Galilée à Rome par le tribunal de l’Inquisition. Menacé de torture, Galilée abjure.
1642 : mort de Galilée, en résidence surveillée à Florence.
 + texte abjuration manuel p.242 + peinture procès p.245


BILAN
La science moderne est caractérisée par une nouvelle méthode qui privilégie l’expérience et l’induction. Elle adopte un langage spécifique, les mathématiques, qui permettent de rendre compte du mouvement de phénomènes naturels. Des instruments sont nécessaires pour préciser et quantifier les résultats des expériences. Il en découle une nouvelle conception de la science qui est déclarée autonome et non plus soumise au contrôle de la théologie. Cependant, l’Eglise qui reste puissante s’inquiète de ces progrès scientifiques et tente d’en limiter la diffusion.


II/ Une période de crises :  Les guerres de religion et guerres civiles
A)    La réforme protestante
1)                  Luther
Dossier manuel pp148-149
Qui est Luther ? Moine de l’ordre des Augustins => un clerc de l’église catholique. Révolté par les Indulgences et la corruption de l’Eglise.

Doc : Une indulgence de 1521
Une indulgence est un "bout de papier" officiel, délivré par les clercs de l'Eglise catholique et qui vaut rémission de péchés (les péchés sont pardonnés et donc le temps de purification que l'âme du fidèle aurait dû passer au Purgatoire est réduit). Vous observez que le texte se compose d’une partie qui est stéréotypée avec des zones laissées blanches et complétées au moment de la « vente » avec le nom du « vendeur » et celui du fidèle qui a acheté l’indulgence.
(p.135)Pourquoi cette pratique peut scandaliser le fidèle ?


Doc 1p.148 : les 95 thèses sont affichées sur la porte de l’Eglise de Wittenberg (Allemagne). Le texte circule rapidement
La dénonciation d’une pratique pontificale
« Les prédicateurs de l’indulgence sont dans l’erreur quand ils disent que les indulgences du pape délivrent l’homme de toutes les peines et le sauvent. Pourquoi le pape dont le sac est aujourd’hui plus gros que celui des plus riches, n’édifie-t-il pas au moins la nouvelle basilique Saint Pierre de Rome avec ses propres deniers, plutôt qu’avec l’argent de ses fidèles […]. Tout vrai chrétien vivant ou défunt, participe à tous les biens de l’Église par la grâce de Dieu et sans lettre d’indulgence. Le véritable trésor de l’Église, c’est le sacro-saint Evangile… »
Citation de Luther dans « thèse sur les indulgences » (1517)
Comment croire ?
« C’est la foi seule, sans aucun concours des œuvres qui confère la justice, la liberté, la félicité. Si tu crois, tu obtiendras, si tu ne crois pas, tu n’obtiendras pas. Tu dois t’abandonner [à Dieu] avec une foi robuste et lui faire hardiment confiance, alors, à cause de cette foi, tous tes péchés seront pardonnés. »
Citation de Luther extraite de « De la liberté du chrétien » (1520)
Citation 1 : Luther critique le fait que le pape vende des indulgences afin de financer la construction de l’église Saint-Pierre de Rome. Il considère que c’est contraire aux Evangiles car, selon lui, Dieu accorde sa grâce « sans lettre d’indulgence ». Les sources de l’enrichissement de l’Eglise catholique sont menacées.
ð  Citation 2 : Luther affirme que seule la foi du chrétien va lui permettre d’obtenir son salut. Les « œuvres » dénoncées par Luther sont : l’achat d’indulgences mais aussi les messes, les pèlerinages, les cultes des saints. Mais si seule la foi sauve, le contrôle de l’Eglise catholique sur la vie quotidienne des fidèles est lui aussi menacé.

MAIS ce n’est pas une nouveauté. Déjà au MA, il y a eu d’importants mouvements réformateurs qui voulaient revenir à ce qu’ils estimaient être la pureté originelle de l’Eglise : pauvreté, vie communautaire, vie conforme à la morale chrétienne, autonomie par rapport à la hiérarchie de l’Eglise. Certains parviennent à négocier une place AU SEIN de l’Eglise catholique ex. L’ordre cistercien qui se crée contre l’ordre clunisien (Robert de Molesmes 1098)+ ex l’ordre mendiant mineur (= dit aussi ordre Franciscain du nom de son fondateur St François d’Assise 1210)  ; mais d’autres mouvements sont considérés comme hérétiques et sont persécutés : c’est le cas des cathares, laïcs du sud de la France qui refusaient les sacrements catholiques, écrasés par l’armée royale au début du XIIIe siècle (bataille de Muret 1213) , le mouvement des bégards et des béguines, laïcs qui vivaient en commun dans la pauvreté, condamnés en 1311 par le pape …

Qu’est-ce qui change avec Luther ? Pourquoi Luther réussit la Réforme, alors que les mouvements précédents du MA ne l’avaient pas réussi ? = Texte 2 p.148
Relevé d’information : appui des humanistes + un message rassurant pour les fidèles car le message luthérien est simple (il suffit d’avoir la foi pour gagner le paradis) + une diffusion plus large des idées dans le peuple grâce à l’imprimerie et aux écrits en langue vernaculaire. Et je rajoute ce qui n’est pas dans le texte, l’appui de certains princes (cf courte bio de la p.148 : Luther, alors qu’il est excommunié, est protégé par l’électeur de Saxe, Fredéric III qui refuse de le livrer à l’empereur Charles Quint, au risque de déclencher une guerre.

+ agitation sociale en Allemagne (ce qui n’est pas nouveau non plus): soulèvement paysan entre 1524 et 1526, à l’initiative de Thomas Münzer, prédicateur allemand en Bohème qui s’inspire des idées de Luther mais va encore plus loin que lui dans la rupture avec le catholicisme (Son texte = Protestation date de 1522) et il appelle à détruire les « souverains impies ». => répression


2)                  Une nouvelle religion ?
Doc 3 p. 149
Cette gravure rehaussée de couleurs de Lucas Cranach est clairement anti-catholique
Qu’est ce qui est reproché à l’Eglise catholique ?
A l’inverse, quelles sont les grandes caractéristiques de la vie religieuse protestante ?


Quelles sont les différences de croyances ?
Répondre à la question posée par le titre : le Luthérianisme est-elle une nouvelle religion ?


Bilan
Dans les milieux humanistes où règne une liberté d’esprit et un esprit de plus en plus critique vis-à-vis de l'église catholique, des voix s’élèvent réclamant une réforme de l'Eglise. L’humanisme a préparé la Réforme. Les Protestants condamnent certains éléments du culte catholique qu’ils considèrent comme quasiment païens. Ainsi, le culte rendu aux saints (et à leurs reliques) les gêne énormément car cela revient pour eux à des pratiques quasi magiques. Les Protestants reprennent aussi  les idées humanistes autour le libre-arbitre : c’est à lui de décider de conformer ses actes à sa Foi, qui seule sauve. Obéir aux rituels de l’Eglise catholique sans comprendre véritablement le sens de ce que l’on fait n’a aucun intérêt. Pour lutter contre cette déviation de la croyance, ils comptent sur l’instruction des fidèles qui doit être, selon eux, plus poussée. Ceci est obtenu par la prédication du texte même de la Bible, faite par le Pasteur. Cette étude du texte sacré directement par les fidèles est centrale dans le culte protestant. Mais la volonté de réforme est surtout motivée par les nombreux abus auxquels se livrent les gens d’Eglise à commencer par le premier d’entre eux : le Pape. C’est ce qui explique que pour la première fois, le peuple (une grosse minorité) approuvait et soutenait les réformateurs et que  les critiques débouchent sur un schisme, sur la création d’une nouvelle Eglise qui se présente comme Eglise réformée.
A la suite de Luther, le mouvement protestant se divise en deux
Le calvinisme : il est fondé par le français Jean Calvin, un humaniste qui se rallie aux idées de Luther. Il s’exile en 1534 à Genève, où il élabore sa propre doctrine. Elle reprend l’essentiel des idées luthériennes, mais s’en distingue par la croyance en la prédestination (croyance selon laquelle Dieu aurait choisi dès l’origine la destination finale de chaque homme : l’enfer ou le paradis). A partir de 1541, Calvin organise et dirige l’Église de Genève. Celle-ci est indépendante du pouvoir civil et impose aux fidèles une discipline de vie à la fois stricte et austère : surveillance de la moralité de chacun, interdiction des jeux et représentations théâtrales.

3)                 La réaction catholique : la contre-réforme
Dossier p. 150-151 : Pour contrer l’expansion protestante, l’Eglise catholique va aussi entreprendre de se réformer par le Concile de Trente (1545-1563) tout en gardant ses dogmes et en considérant les protestants comme des hérétiques.


Les décisions du concile visent à moraliser et discipliner le clergé de l’Eglise catholique, à accentuer l’instruction religieuse des fidèles, confiée aux jésuites (La Compagnie de Jésus est fondée en 1534 par Ignace de Loyola). Pour contrer l’austérité protestante, l’Eglise catholique réaffirme que la splendeur des églises est des œuvres d’art, par analogie, est le reflet de la gloire divine au ciel.



B) Les guerres de religion
1) Massacres et intolérances religieuses
Au XVIe siècle, des guerres de religion opposent les souverains catholiques aux populations protestantes dans l’Empire allemand, en France et dans les Pays-Bas espagnols. Le principe largement admis à l’époque c’est que les peuples doivent avoir la religion de leur prince : aussi, il n’y a pas de tolérance religieuse. La France est un pays catholique avec une minorité de protestants

Deux exemples : le sac de Rome et le massacre de la St Barthélémy



Deux exemples : le sac de Rome et le massacre de la St Barthélémy


Le massacre de la St Barthélémy (manuel pp. 168-169) est un des épisodes des guerres de religion françaises. C’est le point culminant de la guerre civile et religieuse qui déchirait le royaume depuis 1562 : il y avait eu des tensions et des massacres avant, mais à partir des 1562, les Huguenots, organisés et ont l’appui des grandes familles nobles dont la famille de Navarre qui appartient à la famille royale s’opposent militairement au parti catholique, la Ligue, dirigée par Henri de Lorraine, duc de Guise, proche du roi et de la reine.
Que s’est-il passé ? Comment interpréter cet événement ?
Regarder les extraits de la reine Margot + faire l’activité du manuel (fiche à compléter ici)

Durant l'été 1572, les princes protestants, qui, à l'image de Coligny, préféraient se tenir éloignés de la cour où ils craignaient d'être assassinés, se réunirent à Paris pour assister au mariage d'Henri de Navarre avec Marguerite de Valois, soeur de Charles IX.
Le 22 août au matin, un attentat fut perpétré contre l'amiral de Coligny, auquel celui-ci réchappa. On a longtemps cru que Catherine de Médicis était le commanditaire de l'attentat, mais la responsabilité du duc de Guise, chef de la ligue catholique, et derrière lui de l'Espagne, pays leader du monde catholique, est plus vraisemblable. Ce qui est certain, c'est qu'ensuite plus personne ne paraît avoir été en mesure de contrôler la situation, et les événements se précipitèrent. L'attentat attisa l'inquiétude légitime des protestants et la crainte de la famille royale, alimenta le bruit d'une conjuration huguenote, et fit se multiplier les critiques contre le roi, accusé d'avoir commandité l'assassinat de Coligny. La décision du massacre des chefs protestants aurait été prise par le roi (et Catherine de Médicis) en son Conseil.

La première partie du massacre se déroula au Louvre et dans les hôtels des princes protestants. Au Louvre, certains, tels Henri de Navarre et Henri de Condé, princes du sang, furent contraints d'abjurer et ne furent épargnés qu'à cette condition. Quant à Coligny, il fut assassiné par des hommes du duc de Guise.
Par la suite, les hommes de l'ancien prévôt des marchands, Claude Marcel, un catholique guisard, poursuivirent l' œuvre des tueurs mandatés par le roi, et ils multiplièrent les assassinats non commandités par quelque autorité que ce soit. Tous les contemporains insistent sur le caractère inattendu d'une «fureur incroyable», brusquement surgie du peuple et impossible à contrôler. Les massacres ne cessèrent pas avant le 29 août. Pour comprendre la dimension populaire du massacre, il convient de rappeler l'atmosphère parisienne en cette fin du mois d'août 1572 : la cherté des prix renforcée par l'afflux d'aristocrates venus pour le mariage royal ; des sermons violemment antiprotestants dans les églises, dénonçant en particulier «l'accouplement exécrable» entre Marguerite de Valois et Henri de Navarre ; des pamphlets annonçant la colère de Dieu pour punir les hommes pécheurs ; des bruits et des rumeurs suivant lesquels le roi lui-même «voulait se faire huguenot» ; enfin de fortes chaleurs et une ville surpeuplée. Bref, Paris était virtuellement en état d'émeute dès le 23 août. Aussi, dès que la nouvelle se répandit du massacre des chefs protestants, une partie de la population passa à l'action. Partout le pillage accompagna le massacre, et aucun ordre ni aucune force ne semblent avoir été en mesure de pouvoir l'arrêter.
Bilan : En province aussi des massacres eurent lieu. Peut-on établir un bilan ? Les historiens contemporains parlent de 5'000 (chiffre minimal) à 100'000 (chiffre maximal) victimes pour la France, dont sans doute 2'000 à Paris, ce qui représente environ 1 % de la population de la capitale.


Le mardi 26 août, devant le parlement de Paris, lors d'un solennel lit de justice, Charles IX déclara que «ce qui est ainsi advenu a été son exprès commandement (...) pour obvier et prévenir l'exécution d'une malheureuse conspiration faite par ledit amiral et sesdits adhérents et complices». Ainsi, le souverain décidait de prendre officiellement en charge la responsabilité du massacre.
Désormais, et pour longtemps, le fondement même de la monarchie - c'est-à-dire la conception d'un roi de justice institué par Dieu pour l'ensemble de ses sujets, bouclier protecteur de tout son peuple contre les ennemis, intouchable parce que résolument situé au-dessus de tous les partis - se trouvait fragilisé. Après le massacre, de nombreux et violents pamphlets huguenots dénoncèrent, par le texte et par la gravure, la barbarie catholique et royale. Ainsi l'événement fit-il resurgir la théorie de la résistance à l'Etat, une résistance qui pouvait aller jusqu'au régicide si le souverain outrepassait certaines limites.
Mais dans le même temps, Charles IX, en invoquant l'imminence du péril pour justifier le massacre, mit en pratique une notion nouvelle, qui sera théorisée à peine quinze ans plus tard, et dont l'histoire n'est toujours pas close : la «raison d'Etat», par laquelle justifier l'abus de pouvoir peut se faire au nom même de l'exercice du pouvoir. En cela, la Saint-Barthélemy est l'un des événements fondateurs de la modernité en politique.



2) La division de l’Europe
Carte p.138 : la division religieuse de l’Europe.
Cas particulier de la France, qui depuis l’édit de Nantes de 1598 (manuel pp.170-171 et notamment le doc 1) est un pays qui non seulement tolère l’existence et la pratique religieuse d’une minorité protestante (les Huguenots), mais leur fournit les instruments de sa protection (place-fortes…). Cependant, Louis XIV met fin à cette exception en révoquant l’édit de Nantes en 1685. A nouveau, la France est un Etat où il n’y a qu’une seule foi et qu’une seule loi

Persécutées par le roi d’Espagne, les provinces protestantes des Pays-Bas espagnols fondent un nouvel Etat, les Provinces-Unies en 1578. Cette République est donc le seul Etat à pratiquer la liberté religieuse. Beaucoup de Huguenots français iront s’y installer. Voir carte p.171

Entre 1618 et 1648, c’est la guerre de Trente ans entre les Etats catholiques et Etats protestants du Saint-Empire. En 1648, les guerres de religion prennent fin. A cette date, la chrétienté occidentale se partage « définitivement » entre Etats catholiques et Etats protestants.




mercredi 8 avril 2020

Elites urbaines et honorabilité dans les villes "françaises" des XIVe et XVe siècles

Quelques éléments tirés de l'ouvrage de Thierry Dutour, Une société de l'honneur : les notables et leur monde à Dijon à la fin du Moyen Age, Paris, Champion, 1998

Les épithètes d'honneur sont utilisés avec parcimonie dans les sources urbaines et ils se diversifient à partir du XIVe siècle.
L'adjectif "sire" est utilisé pour qualifier les hommes de pouvoir : il correspond à la traduction française du latin dominus.  Souvent utilisé seul, il peut être combiné avec d'autres épithètes ("honorable personne, sire Untel"). C'est un adjectif utilisé depuis le XIIIe siècle et qui semble moins courant à la fin du XIVe. Il est le plus souvent donné à de grandes et anciennes familles, pas forcément nobles, mais quasiment toujours bourgeoises.
Les adjectifs nouveaux sont "sage", "honorable", "honnête". en général, ils ne sont pas utilisés seuls, mais combinés, associés ("honorable discrète personne et sage"). L'adjectif "honnête" est le moins employé et semble le plus modeste : à Dijon, il qualifie des individus qui ne participent pas au pouvoir ducal, mai sont bourgeois et échevins. Les seuls autres dijonnais à être dits honnêtes sont des ecclésiastiques. Il souligne donc à la fois l'honorabilité et la probité (vient du latin honestus qui signifie à la fois honorable et conforme à la morale). On le trouve donc plus employé pour des personnes qui s'occupent des comptes municipaux.
L'adjectif "sage" (prudenter) toujours associé par "et" à "homme" ou "personne" est secondaire et n'est pas constitutif de l'honorabilité. Il a le sens d'expert : on affirme par là une compétence, acquise souvent par les études en droit et/ou par l'expérience de fonctions importantes. C'est aussi le cas du titre de "maître" qui est lié à la graduation en droit. L'importance que la société du XIVe siècle accorde à cette compétence est telle qu'il devient un aspect de l'honorabilité, mais qui ne se suffit pas à lui seul.

Ces épithètes d'honneur manifestent l'honorabilité, mais ils indiquent surtout les qualités sociales attendues des membres de l'élite.

Les activités des membres de l'élite urbaine dijonnaise sont toujours multiples.  C'est sans doute aussi pourquoi les dijonnais les plus éminents indiquent rarement leurs activités dans les actes notariés. Mais on peut tout de même avancer :
- Chez les riches, la diversité des  activités est grande et toujours combinée : (par nombre décroissant) le commerce -draps, laine, épicerie-, l'administration du duché -conseillers du duc, maîtres des comptes, baillis ou lieutenants du bailli-, la gestion des finances publiques -receveurs ducaux, monnayeurs- puis les professions juridiques -jurisconsultes, procureurs, notaires-
-Chez les non-riches, moins nombreux, ils appartiennent aux mêmes groupes d'activité (marchands, juristes), mais aussi sergents, un artisan. La spécialisation/mono-activité les caractérise. Globalement, les notables ne sont pas artisans : quand un artisan réussit, il est  artisan-marchand, par exemple les pelletiers. Les activités artisanales ne confèrent pas une notabilité propre à introduire dans l'élite, et n'enrichissent pas suffisamment. Un procureur désargenté aura plus de chances d'accéder à l'échevinage qu'un artisan, même enrichi.
- Les membres des grandes et anciennes familles sont principalement marchandes (en combinaison avec d'autres activités) tandis que les isolés (qui n'apparaissent qu'une fois dans les listes d'échevinage et/ou sans autre membre de leur famille) sont des "hommes nouveaux", des dijonnais d'adoption, membres d'une famille en général récente ou de noblesse rurale et ils sont d'abord des administrateurs au service du duc, des gestionnaires des finances publiques.
- On remarque que sur la 2e partie du XIVe siècle, les positions des anciennes familles s'érodent. Elles perdent leurs positions dans le service du duc avec Philippe le Hardi qui introduit ses hommes...lesquels profitent aussi pour se positionner dans le commerce réglementé du sel (la gabelle du sel est établie en 1383) => la stratification de l'élite n'est pas figée, l'élite se renouvelle.

Résumé de la conclusion générale :

1- la banalité dijonnaise
La ville qui se développe de façon visible à partir du XIIe siècle apparaît comme l'un de ces innombrables marchés d'importance locale dont la prospérité est intimement liée à celle des campagnes avoisinantes. La ville, en fait puis en droit, n'a qu'un seul seigneur. Elle forme, depuis la construction de l'enceinte de 1137, une seule unité topographique. Les habitants jouissent de franchises au XIIe s, on ne sait pas exactement quand et possède depuis 1183 une commune au sein de laquelle l'aristocratie des chevaliers citadins joue, comme ailleurs, un  rôle de 1er plan. Dijon n'est pas un foyer industriel et commercial important, comme le sont bien des villes de Flandres, ou d'urbanisation récente, elle n'est pas non plus une ville qui s'éveille aux libertés communales avec la bienveillance intéressée d'une monarchie aux abois. Elle n'est ni ville royale, ni ville frontière, ni ville épiscopale. Mais y siègent les organes centraux de l'administration méridionale des possessions du duc de Bourgogne.
2- les principes de cohésion de la société urbaine
---------------------> La société urbaine est hiérarchisée. Pour les citadins, hiérarchie et organisation sont synonymes. La stratification s'organise en fonction de l'estime social accordée à chacun, estime sociale qui dépend de la notabilité, elle-même liée aux activités, au mode d'insertion dans la société et au niveau et au type de fortune de la famille.
On distingue 4 strates sociales principales. Les exclus du discours, les menus (de 60 à 65% de la population citadine). Entre eux et les moyens (environ 20%) et les notables (10%) il y a une vraie barrière sociale hermétique : les moyens peuvent par des mariages et des relations économiques conclure des alliances avec les notables, en revanche il n'y a que des rapports de soumission économique entre les menus et les autres.
---------------------> L'intégration à la société locale est permise par une installation stable et par l'appartenance à une famille. Celle-ci est le lieu naturel des activités, courantes entre parents, relativement rare entre individus qui ne le sont pas et alors toujours conçue sur le modèle des relations familiales.
=> La société urbaine est conçue comme une association de chefs de famille
=> La notabilité est liée à l'ancienneté de l'installation des famille à Dijon ainsi qu'à leur taille. cf Christine de Pisan "bourgeois sont ceulz qui sont de nation ancienne, enlignagiez ès citéz".
Ainsi richesse et notabilité ne coïncident pas exactement. Voilà pourquoi les chiffres moyens du nombre d'activités économiques exercées par les membres de l'élite s'ordonnent en une progression rigoureusement inverse de celle des degrés de notabilité.
3- une organisation des relations sociales
-------------------> Il y a consensus des habitants de la ville sur des conceptions sociales et politiques : il n'y a pas contestation de la supériorité de ceux qui satisfont à leurs critères d'attribution de la prééminence sociale + consensus sur la justification et les buts du pouvoir municipal (servir le prince et le bien public) et sur ses formes d’organisation (participation des habitants aux affaires communes qui en  confient la direction à l'élite sociale, mais celle-ci doit consulter pour les affaires les plus graves un conseil élargi aux "moyens", voire organiser des assemblées ouvertes au "commun".
------------------> L'élite se présente comme une minorité organisée formant une unité sociale cohérente, même si on peut distinguer des sous-groupes
-------------------> On ne distingue pas d'opposition entre l'élite et les "moyens", à la différence de ce qui se passe dans bien d'autres villes. Certes, les artisans installés et les chefs des métiers n'exercent pas le pouvoir, mais ils sont associés de diverses façons à son exercice et physiquement comme socialement, les notables ne s'isolent pas du reste de la société : ils fréquentent des "moyens", prêtent de l'argent, parfois même se marient (surtout élite nouvelle)
-------------------> Il y a parfois des conflits entre la ville et le duc (défense, impôts, finances...) et parfois, en général pour des questions fiscales, la violence de la rue nécessite l'intervention de l'armée du duc. Dans ce cas, on ne voit pas les moyens prendre la tête du mouvement populaire.
4- Permanences et évolutions
---------------> L'accroissement des compétences du pouvoir municipal, comme ailleurs dans le royaume au XIVe siècle. Après 1350, le pouvoir municipal jouit de compétences administratives et financières plus étendues.
---------------> Le renouvellement de l'élite, par sédimentation successives. Il n'y a pas remplacement. Après 1341, ascension de nouvelles familles et d'isoles qui font souche grâce au service du duc. Le renouvellement des activités se fait plus rapide. La physionomie de l'élite change lentement, mais pas son organisation en degré de notabilité. Globalement, les membres des grandes familles récentes prospérèrent dans le négoce tandis que les isolés se signalent d'abord dans le service du prince et que les anciennes familles connaissent à partir des années 1370 un effacement relatif sans doute liée à la conjoncture économique générale en Bourgogne (baisse de la population, baisse de la demande de biens de consommation courante)
---------------> Une importance de plus en plus forte de l'honorabilité dans la conception de l'organisation sociale de la part de l'élite. On le devine à divers indices dont la signification apparaît quand on les réunit : diversification du vocabulaire de l'honorabilité et des formes de distinctions sociale (consommation somptuaire ...), importance plus forte attribuée à l' "estat" qui est notée plus systématiquement dans les sources, par exemple les contrats de mariage, discrétion plus grande dont ils entourent les prêts d'argent (et donc le versement d'intérêt), place très restreinte des professions artisanales dans les activités de l'élite, plus forte endogamie entre familles appartenant à l'élite. Cette période est celle aussi de la prédominance sociale des bourgeois. Ils représentent alors plus de 68% des membres de l'élite. Même les nobles se disent avant tout bourgeois dans les actes notariés. En fait, la bourgeoise a assimilé la noblesse urbaine.


Notes de lecture de l'article de Michel Hébert, "Communications et société politique : les villes et l'Etat en Provence aux XIV et XVe siècles" , dans La circulation des nouvelles au Moyen Age, XXIVe Congrès de la SHMESP, publications de la Sorbonne et de l'Ecole française de Rome, 1994

Sans reprendre les éléments concrets de la démonstration basée sur les délibérations de la ville de Sisteron à propos d'une levée d'impôt pour le roi en 1389, je vais directement aux conclusions et tout particulièrement à celle qui m’intéresse dans le cadre de ce post. La ville de Sisteron dépêche à plusieurs reprises des ambassadeurs pour négocier avec les commissaires royaux et l'affaire dure près de 8 mois, singulièrement auprès du sénéchal, dur à rencontrer car il bouge tout le temps. Ils offrent à ces occasions des cadeaux et multiplient les rencontres avec les envoyés des autres villes, avec des individus importants de la région (important car bien insérés dans les réseaux locaux et nationaux) et pour leur cause. => complexité du réseau des interlocuteurs : le sénéchal et/ou ses commissaires + mes subtilités juridiques rendent nécessaires de recourir à des avocats ou procureurs à la solde de la ville, en résidence permanente dans la capitale régionale (Aix, là où siègent les Etats provinciaux et les grands officiers de justice). Le réseau d'interlocuteurs des villes provençales est loin de se limiter à la cour royale (un recours direct au roi est toujours envisageable) ou à son personnel. Les villes entretenaient entre elles des réseaux serrés d'amitié et de conjonction d'intérêt (ex "je paye l'impôt si toutes les autres villes le payent aussi ..." , savoir où se trouvent les troupes de brigands, cf aussi la guerre de l'Union d'Aix) et on soupçonne, au hasard de quelques notations éparses, qu'elles cultivaient aussi des amitiés auprès des nobles et prélats généralement possessionnés à proximité de leurs territoire : dans le dossier présenté par l'article, on apprend que la ville de Sisteron consulte plusieurs seigneurs pour obtenir leur avis sur l'opportunité de conclure une alliance entre les villes de Sisteron, Apt et Forcalquier. => Dense réseau d'amitiés, mal connu + réseau coûteux qu'il faut entretenir au prix de beaucoup de cadeaux et d'attention (tout comme les ambassades auprès des officiers royaux sont toujours l'occasion de cadeaux apportés par la ville. Ces cadeaux sont codifiés : on voit souvent des ambassades des villes pour se renseigner sur ce qu'il est opportun d'offrir) + il faut aussi avoir les recommandations...= rituel de soumission et d'amitié.

Ainsi, pour élargir et synthétiser le propos, l'auteur conclut de la manière suivante : "il me semble que du point de vue des communautés d'habitants en Provence aux XIVe et XVe siècles, le développement extraordinaire de l'Etat et de la ponction fiscale a agi comme catalyseur de la formation d'une société politique, c'est-à-dire d'un groupe restreint d'élites urbaines de plus en plus spécialisées et ayant par nécessité un réseau complexe d'échanges entre elles." Ce petit groupe de gens fortunés qui partout accaparent le pouvoir urbain, se le "passent" entre eux par cooptation ou par élection, ne laissant que peur de place à l'arrivée d'homes nouveaux, se caractérise en relation avec les qualités attendues pour les fonctions et les charges qu'ils occupent. C'est sur ce point que je vois la jonction avec la première partie du post sur Dijon. 
  • la fréquence et la longueur des assemblées et ambassades exigent une grande disponibilité
  • la nature délicate des missions suppose un vaste et diversifié réseau d'amis et de relations
  • Exigence fréquente de se porter garants sur ses biens personnels ou d'avancer des sommes pour la cité suppose pour ces élites une assise financière solide

Printfriendly