TRANSITION
DEMOCRATIQUE ESPAGNOLE
Intro :
A servi de modèle pour élaborer la notion de « transition
démocratique ». Ce modèle sera appliqué ensuite à d’autres expériences de
passage d’un régime dictatorial à un régime démocratique, comme la révolution
de velours en Tchécoslovaquie par exemple après la chute du mur de Berlin.
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L’Europe achève sa démocratisation et son
unification puisque tous ces pays vont adhérer à la CEE (1986 Espagne+ Portugal)
ou l’UE (anciennes démocraties populaires d’Europe de l’est)
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La Transition démocratique a été invoquée par
tous ceux qui ont voulu y voir le signe de la supériorité de ce régime sur tous
les autres et la marche inévitable de la démocratisation du monde
R) Péninsule
ibérique = les plus longues dictatures d’Europe
* Portugal de Salazar
(puis M. Caetano, son successeur) : 1933-1975. Régime nommé Estado Novo
* Espagne de
Franco 1936/39-dec 1976, date de l’autodissolution des Cortes franquistes. TRANSITION de 1975 à nov 1982, date de l’arrivée
au pouvoir en Espagne du parti socialiste et de son chef, Felipe Gonzales.
1-
Une transition voulue par les élites
qui avaient soutenu le régime de Franco
R) Le régime franquiste reposait
sur l’alliance et le soutien des pouvoirs économiques, de l’armée et de l’Eglise
catholique : valeurs = tradition et ordre + anticommunisme.
Car Franco n’a pas désigné de successeur.
Dans un texte « testament », il se contente de recommander d’obéir au
roi d’Espagne, censé être le garant de la continuité. La mort de Franco ouvre
un moment d’incertitude politique, d’autant plus qu’il n’y avait aucune constitution.
Car le contexte économique est
mauvais. Le recul de la croissance, la crise économique touche l’Espagne comme
les autres pays européens dans les années 1970, mais plus fortement encore qu’ailleurs.
La courbe de la croissance du PIB (cf pwpt) montre l’ampleur de la récession dont l’Espagne ne
sortira qu’à la fin des années 1980, essentiellement grâce à la CEE/UE et à ses
transferts financiers. Les milieux économiques en ont bien conscience, mais il
était inconcevable que l’Espagne adhère à la CEE sans se démocratiser. Les EUA
(diplomatie secrète) poussent à la démocratisation.
Car le contexte social est
également mauvais. Multiplication des manifestations et des grèves dans les
usines + tensions séparatistes (surtout montée du terrorisme basque de l’ETA
qui se convertit à cette époque aux idées de l’ultra-gauche cf les années 70
sont surnommées « les années de plomb ». C’est un phénomène
général Italie « Brigade rosse »/ Allemagne « RAF-Fraction armée
rouge »/ France « Action directe »). La mort de Franco (nov 75)
redonne espoir aux aspirations républicaines, voire révolutionnaires.
2- Une
transition pilotée par la monarchie qui est en mesure d’organiser le compromis
politique.
Le jeune roi Juan Carlos 1er,
tout juste intronisé en 1975, adopte très vite l’idée de la transition
démocratique. Eté 1976, il nomme comme chef du gouvernement Adolfo Suarez,
ancien franquiste. Après la dissolution des Cortès, il organise les premières
élections législatives démocratiques pour une assemblée constituante (la
nouvelle constitution qui instaure la monarchie parlementaire date de dec 1978.
Elle est adoptée par referendum à une majorité de 88%). De nouveaux partis émergent,
et le principal est l’UCD, parti d’A. Suarez. (cf pwpt).
Ensemble, Suarez et Juan Carlos
vont négocier avec les partis de gauche un compromis. En échange de leur légalisation,
PSOE et PCE abandonnent leur revendication de 3e République (avril
77) et modèrent les revendications sociales. En oct 1977, le pacte de la
Moncloa, signé par l’ensemble des forces politiques et syndicales signe
cette alliance consensuelle. En oct 77, la loi d’amnistie (cf pwpt) permet aux
anciens franquistes de vivre tranquillement dans le nouveau régime sans être
inquiété pour leurs éventuels crimes. Cette impunité, au nom d’une « responsabilité
collective » (tous les espagnols seraient responsables des horreurs
commises, notamment durant les 3 ans de guerre civile entre 36 et 39) permet de
renvoyer dos à dos les bourreaux et leurs victimes. Il y a donc un « pacte
d’oubli » (l’expression est de Santos Julia, historien sur l’Espagne
franquiste) qui à l’époque rassure une opinion publique encore traumatisée par
la guerre civile.
Autre explication de la
modération des forces de gauche : la menace, toujours présente, d’un putsch
militaire (l’armée restant majoritairement fidèle au franquisme). Sophie Baby
(autre historienne) rappelle que cette menace fut « fortement
inhibitrice » pour ceux qui négociaient la transition.
3) Le mythe de la
transition pacifique
Le compromis n’arrête pas la
violence. Du côté de l’extrême droite franquiste, l’éclatement en de nombreux
micro-mouvements, l’affaiblissement électoral (cf pwpt), le sentiment d’avoir été trahis, le
soutien d’encore de nombreuses personnalités importantes dans l’appareil d’Etat
et dans l’armée => espoir de reprendre le contrôle du pouvoir => rumeurs
incessantes de coup d’Etat + violences dans la rue, terreur. Le 23-2- 1981,
un putsch longuement préparé, mené par le général Tejero échoue de peu
parce que les putschistes avaient compté sur le soutien de Juan Carlos et ils ne
l’auront pas (discours
télévisé du roi voir manuel p.51). Le contexte était pourtant favorable
puisque leur autre ennemi, A. Suarez était tellement affaibli qu’il perd sa
place au gouvernement.
Les années de transition sont
aussi les pires années de la violence séparatiste, et notamment des attentats
terroristes. (cf pwpt).
Historiquement, l’Espagne a été formée de la réunion de royaumes indépendants. La
nouvelle constitution maintient l’unité de l’Etat (acquis franquiste), mais
concède de larges autonomies à des régions puissantes face à l’Etat central.
Les deux principaux séparatismes sont le catalan (renforcé par le souvenir de
la guerre civile quand la Catalogne fut le dernier bastion de résistance à
Franco) et le basque. Autant les Catalans décident de rejeter la lutte armée,
autant l’ETA (Euskadi Ta Askatasuna, « pays Basque et Liberté ») organise
des attentats visant, à Madrid et ailleurs, fonctionnaires et police +
enlèvement et exécution d’industriels.
CCL
(cf résumé Espagne, et maintenant la République ? +
pwpt) Avec l’arrivée d’une nouvelle génération, après 25 ans d’oubli,
les ratés de la transition démocratique ressurgissent :
·
il n’y a
pas eu de « dé-franquisation » => fin 2010’s, les
socialistes reprennent ce thème contre la classe politique de droite, héritière
du régime dictatorial. CF affaire du transfert de la dépouille de Franco (Valle
de Los Caidos)
·
La monarchie, lgtps considérée comme garante de
la démocratie, est désormais attaquée. Le roi a beaucoup de pouvoirs pol et
surtout accusations de corruption. => abdication de Juan Carlos en 2014 + résurgence
des revendications républicaines
R) Cette transition
incomplète, basée sur compromis, oubli et maintien des anciennes élites
donc plaies mal pansées, c’est aussi ce qui s’est passé au Chili après Pinochet
(écarté du pouvoir en 1988 après qu’il a perdu un referendum). Or, on voit
actuellement explosion sociale et politique de la jeunesse au Chili. Il n’est
pas étonnant que tout de suite ait émergé la revendication d’une nouvelle
constitution plus démocratique.
le pwpt